33. Barreaux de fer

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La porte de la salle de réunion des commandants se referma derrière Désirée d'un bruit sourd.
Enfin, il aurait été plus juste de dire derrière eux.

Car les commandants des 3ème et 12ème divisions, Joz et Haruta, et bien qu'ils soient aussi silencieux que des tombes, étaient toujours là. Chacun la tenant fermement par un bras, la portant presque entièrement puisque la brune était toujours à moitié sonné du coup que lui avait envoyé le commandant Marco en pleine tronche.

Les paupières à moitié refermées, l'infirmière luttait sérieusement contre l'envie de se laisser aller à ce brouillard qui la guettait aux frontières de son esprit. Prêt à l'attraper pour jamais ne la laisser repartir.
Elle pourrait se laisser aller, mais pas tant qu'elle aurait du public. Pas avant que ces hommes qui ne connaissaient rien à rien sur sa personne puissent se permettre de la juger elle et ces choix de vie.

Encore moins quand la seule vérité qu'ils pensaient connaitre était à ce point éloignée de celle qui dictait son existence.
Et qui l'avait désormais conduit à l'inévitable. La chute de Damoclès. L'arme de la faucheuse.

Soudain, on lui donna un coup.
Un soubresaut.

Pas violent. Pas cruel.
Mais pas non plus taquin ou tendre. Un donné pour la secouer, rien de plus rien de moins.

Alors Weller-Smith Désirée mit toute son énergie dans le geste "redresser sa tête", affirmant sa prise sur ses jambes tremblantes au passage pour se retrouver face au regard imperturbable de Joz, l'homme diamant.
Il ne lui sourit pas. À vrai dire, rien ne transparaissait dans ces yeux sombres et qui pour beaucoup, semblaient remplis de bêtise.

Or ce n'était pas le cas. Le commandant de la 3ème flotte parlait peu, c'était vrai ; et même dans les moments décisifs il intervenait rarement.
Mais la femme de 35 ans connaissait peu de pirates aussi attentifs aux autres que lui ; elle le savait bien, après tout à ses débuts d'espionne il lui avait donné du fil à retordre.

- Tiens toi, il faut qu'on avance.

- Et on n'a pas particulièrement envie de te porter ! rajouta celui qui ressemblait tant à un lutin, que ce soit du fait de son apparence ou par sa personnalité.

Cependant Désirée ne dit rien. Elle se contenta d'un vague accord de la tête avant de le remettre de nouveau, ce masque.

Avant de serrer les dents, forçant ses muscles à stopper leurs tremblements ininterrompus. Avant de ne réussir à puiser elle ne savait comment les dernières volontés qui sommeillaient en elle. Elle devait marcher. C'était tout.
Et la seule manière de les faire, ces quelques pas, c'était de redevenir ce marbre inébranlable qui pour elle, avait déjà traversé les pires des épreuves.

Or c'était un mensonge. Rien de plus, rien de mieux qu'un cruel mensonge. Car vivre la situation actuelle était bien différent que de la ressentir lointainement dans ses cauchemars.
Tout était plus réel, plus dur. Mais parce que c'était cela aussi, la réalité. Et voilà pourquoi elle voulait s'en couper.

Elle n'avait plus besoin de tous ces sentiments inutiles, de tous ces désirs qu'elle avait difficilement réussit à reconquérir.
De toute manière, elle allait mourir, n'est-ce pas ?...

La brune laissa s'échapper un petit gémissement de douleur, soudainement ; faisant s'arrêter ses deux gardiens pour quelques courts instants. Ils étaient à peine hors du couloir ou encore, la porte de laquelle ils venaient de sortir les baignaient de son importance, la tension y résidant semblant sur le point d'exploser le battant, et eux avec.
Parce que trop perdue dans ses pensées, la survivante de Teïre c'était simplement mordue la langue. Et que ça faisait mal... qu'à cause de cela, elle ressentait de la douleur.

Mon épée fleurieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant