41. C'est un au revoir

71 11 12
                                    

Mélydre.
Une île estivale où le soleil régnait toujours en maitre intransigeant. Des maisons hautes en couleurs, des tissus riches ou un peu moins ainsi que des odeurs envoutantes.

Un pivot de commerce du territoire de Barbe Blanche, approvisionnant nombre des îles alentours. Voilà l'un des principes que l'Empereur avait mis en place, un partage équitable des richesses.
Certes ses hommes et lui prenaient des taxes irrégulières sur ces pieds à terre pour le bien de leur vie en mer, sans jamais laisser pour autant le reste du territoire mourir de faim.

On aidait ces prochains, un peu comme une famille en agrandie. Les échanges étaient facilités et les gens, bien qu'ils ne soient pas les plus riches du monde pouvaient vivre sans problème.
Vivre, sans subsister.

Pour que jamais des enfants ne grandissent comme ceux qui arpentaient le pont du Mobydick. Enfin, elle exagérait peut-être un peu. Certes le vieillard venait de l'île très pauvre de Sphynx vers laquelle l'équipage allait désormais faire voile, une soudaine envie du père de famille de retourner à ces racines ; mais la plupart des hommes et femmes de ce navire avaient choisis d'être ici.

Ils ne venaient pas tous de trous paumés et insalubres, n'étaient pas tous des rejetons de criminels. Certains venaient de famille de marchands, de docteurs, de professeurs et même de soldats de la Marine.
C'était l'appel de la mer qui les réunissaient, sous l'étendard de la liberté et d'enfin, une famille que l'on pouvait choisir.

Or Désirée Weller-Smith n'était pas concernée par cette description, ne serait-ce que pour un détail. Oui elle venait d'une famille de médecins, elle était elle-même infirmière, mais là était la seule ressemblance.
Elle n'avait jamais choisi de se tenir sur ce pont actuellement battu par la brise du large, le soleil dardant ces rayons brûlants sur sa peau si pâle.

Et la mer, elle détestait ça. L'aventure et l'inconnu ce n'était pas pour elle. Ce que cette femme brune aimait, c'était le calme, le confort. La banalité.

Voilà la conclusion à laquelle elle était arrivée. Elle en avait trop vue, trop ressentie, trop anesthésié ces mêmes sentiments. À ce rythme, jamais elle ne tiendrait la cadence.

Ce qu'elle voulait elle, c'était des journées faites de moments de vie. De la simplicité. Un réveil régulier, un lieu familier, même peut-être un chez elle, qui sait.
Les mêmes visages qu'elle croiserait tous les matins. Si elle arrivait à trouver, elle pourrait soigner. Aider. Se racheter. On avait toujours besoin d'une infirmière quelque part, n'est-ce pas ?...

Voilà son autre conclusion.
Ce qu'il lui restait d'avant tenait en deux faits. En premier, Kusu.

Elle ne savait rien d'Hana mais lui, ce petit idiot qu'elle avait quitté encore pleurnicheur s'était apparemment débrouillé pour survivre, rejoignant même les Révolutionnaires.
Cela ne l'étonnait pas de lui. Après tout, il parlait de faire la révolution même gamin. Et la brune imaginait bien que voir sa famille entière se faire massacrer lors d'un Buster Call, ça n'aidait pas.

Or elle ne savait rien de lui, d'où il se trouvait, où même de s'il souhaitait la voir. Cette piste était donc stérile.
Et puis, elle l'avait décidé après tout. Maintenant, c'était sa vie dont il était question. Une vie à elle.

Weller-Smith Désirée sourit faiblement, rabattant de l'une de ses mains svelte ses mèches de cheveux qui s'échappaient sous les coups de vents. C'était toujours aussi étrange, cette pensée.
Il lui faudrait du temps pour s'y faire, pour se reconstruire aussi. Beaucoup de temps.

Car la femme de 35 ans le savait mieux que quiconque, elle était à un rien de s'effondrer, à un rien de vouloir tout simplement se jeter du navire pour atterrir dans cette eau bienvenue. Elle qui l'emporterait loin de ce monde et de cette existence si difficile.
Il ne se passait pas une nuit sans qu'elle ne fasse un cauchemar. Sur l'amiral de lave, sur le cadavre d'Eris et de ses parents et même sur la tête de Vista suspendue au bout d'une lame d'exécution, ce sort que l'on réservait aux criminels.

Mon épée fleurieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant