16. Une main gantée de blanc

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Le roulis familier des vagues contre la coque du navire.
Les voix lointaines des hommes de quart. Les grincements du bois.

Le chatoiement du tissu contre sa peau nue. Les caresses que ses boucles brunes laissaient sur sa peau.
La force encore endormie contenue dans ses muscles au repos qui n'attendait plus que de s'éveiller. La langueur couvrant son esprit.

C'est ce tout qui réveilla Vista ce matin-là, avec les premiers rayons du soleil qui perçaient dans sa cabine, passant par le rideau qu'il avait intentionnellement entrouvert la veille au soir. Toujours un excellent réflexe, parmi les nombreux qu'il possédait et qui persistait durement.
Parce qu'après la journée éreintante de la veille, soit le départ d'Estellar pour effectuer une courte mission qui lui avait été attribuée par le paternel il n'en aurait pas fallu moins pour le sortir du monde des songes.

Et quel monde...
Vista grogna pour lui-même, enfouissant un peu plus son visage dans son oreiller, la couette le recouvrant glissant à moitié de son corps tout en muscles.

Il aurait tout donné pour y retourner, là maintenant.
Loin de sa cabine qui empestait la masculinité, de ce bateau privé de toute présence féminine, de cette mission ne s'annonçant pas particulièrement difficile...
Il aurait tout donné pour se téléporter à Estellar, cette ile de leur territoire où la flotte principale resterait au moins une bonne petite semaine pour se réapprovisionner, donnant suite à l'intégration de ce gamin d'Ace et de ses anciens membres d'équipage.

Pour refaire de ce moment qui ne quittait désormais plus son esprit une réalité. Il avait finalement pût gouter les lèvres de Désirée.
Après sept longues années à fantasmer comme un adolescent en chaleur. À chaque fois que son imagination prenait trop le dessus, il s'empressait d'aller au bordel et s'il ne pouvait se le permettre ou était perdu en pleine mer, il s'occupait tout seul de lui comme un grand.

Mais maintenant... maintenant qu'il avait touché à l'original...

L'épée fleurie sentit sa moustache s'hérisser à ses pensées. Il grogna une énième fois, retournant son corps presque nu dans son lit proportionnel à sa taille.
Privilège de commandant, il avait toujours une cabine privée que ce soit sur le Mobydick ou l'un de leurs navires secondaires. Et il le savourait pleinement aujourdhui, parce qu'il n'avait pas particulièrement envie que ses frères le voient ainsi, transformé en gamin incapable de contenir ses premières émotions amoureuses.

Enfin, Marco et Thatch l'avaient vu. Le commandant de la 5ème flotte fut incapable de faire taire le rictus peignant ses lèvres.
Ces saligauds. Ils lui avaient effectivement prodigué des conseils. Mais pas sans le railler de tous les côtés...

Il soupçonnait sincèrement Marco de s'être fait jeter par l'une de ses nombreuses conquêtes et Thatch... eh bien de s'être pris un énième râteau dans la gueule par Toto. N'arrivait-il donc pas à comprendre que leur infirmière blonde en cheffe préférait réellement les femmes et non, ne voulait pas tester avec lui parce que "on ne savait jamais ces autres coups masculins étaient sans aucun doute merdiques".

Tout cela il s'en fichait.
La seule chose qui comptait réellement c'était ce qu'il s'était passé. Et ça... ça, ça avait été une belle réussite.

L'épée fleurie sourit, enfonçant l'arrière de son crâne dans son oreiller, ses boucles décoiffées lui piquant les tempes alors qu'il grattait la naissance de sa moustache par pur réflexe.
Ses iris sombres, elles qui brillaient si souvent quand elles étaient portées sur l'objet de leur désir s'ancraient sur le plafond en bois, faisant le tour des nœuds et couleurs le parsemant.

Embrasser Désirée à leur premier rendez-vous.
Il ne s'y était pas attendu.

Mais quand elle lui avait chuchoté avec tant de conviction de faire attention à lui lors de sa mission il ne s'était même pas vu faire le premier pas.
En moins de temps qu'il n'en fallait pour dire Roger, leurs bouches s'étaient liées et la sublime infirmière brune avait fondu entre ses bras.

Mon épée fleurieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant