Chapitre 13

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Le mois de Juillet touche à sa fin et m’oblige à rentrer au foyer, seulement pour laver mes vêtements et refaire ma valise. Cette fois, je pars en direction de Dax, dans une énième famille d’accueil. Natacha et sa fille Manon m'accueillent sous un soleil de plomb. Nous partons dans un camping, dans lequel elle a un mobile home, pour profiter des vacances pleinement.

Encore une fois, je me laisse aller aux activités, mais rarement à la piscine, ne voulant pas montrer mon corps que je trouve trop gras et difforme. Mes hanches sont développées, ainsi que mon fessier, tandis que ma poitrine ne pousse pas assez à mon goût. Être adolescente, c’est compliqué. Je sens pourtant le regard des garçons se poser sur moi, mais ça me dérange plus que je ne l’apprécie.

Je n’en ai qu’un en tête depuis plusieurs semaines, qui m'étale ses pensées par SMS, du matin au soir. Je glousse à chaque nouveau message, imaginant ses bras me serrer fort, comme un bon chocolat chaud en plein mois de décembre. Il me dit que je suis belle. Qu’il souhaite juste être avec moi. Même s’il faut qu’on ne se voit qu'un weekend sur deux.
Alors, de retour sur Paris, nous officialisons notre relation. Nous passons la dernière semaine de vacances ensemble, à rire et à s’aimer, avant de reprendre la route du collège, en quatrième année.
Je découvre la sensation du manque de l’être aimé, lorsqu'il est l’heure de rentrer. Il me promet de venir me chercher après les cours, tous les soirs, juste histoire de se voir sur le trajet.
— T’es fou, il y a une heure trente de métro… lui rappelé-je.
Pourtant, il le fait.
Tous les soirs, à la même heure.
Son sourire charmeur et ses yeux rieurs.
Comment sommes-nous passés de l’amour à la haine ?

•••

— Tu me les brises, Romain. Lâche-moi.
— Mais regarde dans quel état tu te mets ! Regarde tes bras, putain ! Tu peux pas me demander de te regarder te faire du mal, sans rien faire ! m’implore-t-il.

Je le sais, mon état mental ne s’arrange pas et j’embarque mon mec dans ma descente aux enfers.
Depuis fin septembre, soit deux mois, je loge chez lui, ayant décidé de moi-même que le foyer, c’était fini.
Je me roule un joint et l’allume, à même le matelas posé au sol dans lequel nous dormons.
L'amour a laissé place aux engueulades à longueur de journées. Ma susceptibilité et mes crises de nerfs à excès n’arrangent rien.
Pour passer le temps, je sors dans Nogent retrouver nos potes. Le soir, je vais chercher Célestin à la sortie du collège, ce qui me permet de le voir tous les jours à présent. Je le raccompagne jusqu'au bout de la rue du domicile familial avant de retourner vadrouiller ailleurs. Il m’arrive aussi de faire la manche. Romain ne gagne pas énormément sa vie, donc même une pièce de deux euros se fait rare, surtout quand on doit s’acheter de la drogue ou de l’alcool. Boire ou vivre, il faut choisir. En général, la réflexion ne dure que quelques micro-secondes avant de déposer notre seul billet dans la main de notre dealer. À défaut de pouvoir manger, on a de quoi se vider la tête.

Pourtant, aucun de nous deux ne semble s’épanouir dans cette relation qui tourne vers quelque chose d’extrêmement toxique. Et ce qui devait arriver, arriva. Alors qu’une énième dispute se déclenche lors d’une soirée à l’extérieur, arrivant jusqu’aux mains, nos amis nous éloignent avant d’aller trop loin. Je pars en courant dans les rues de Nogent, tandis que le froid s’infiltre dans mes vêtements. En pleurs, et sans la moindre affaire, mis à part mon sac, je me retrouve sur le trottoir de la maison. Là où tout à commencé. J’escalade le portail pour toquer à la fenêtre de la chambre de mon frère, mais il est quatre heures du matin et personne ne répond. Alors, je sors à nouveau. Deux jeunes hommes m’interpellent, me reconnaissant comme étant la petite sœur de leur ami d’enfance. Je leur explique ma situation. Ils me laissent recharger mon téléphone chez eux, au bout de la rue, afin que je puisse appeler un ami, qui accepte de me loger pour la nuit.

Le lendemain matin, à peine le soleil s’est-il levé que je descends à pas de loup, laissant un mot dans un cahier trouvé dans ce qui me paraît être son sac de cours, pour le remercier de m’avoir sauvé du froid, en cette nuit glaciale, et quitte la maison pour aller au seul endroit qui, à mon sens, m'accueillera, sans jugement.

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Merci pour les épinesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant