Merci pour les épines

Chapitre 19

— Debout Marie, Momo t'attend en bas ! m’informe Catherine.
Je sors de mes songes difficilement. Je n’ai jamais été du matin et ce n'est visiblement pas maintenant que ça va changer. Je m’habille rapidement avant de descendre l’escalier, trouvant le directeur à la porte d’entrée.
— Bonjour ma fille ! me salue-t-il gaiement.
Je me frotte le visage, ne comprenant pas si je vais me faire réprimander pour je ne sais quelle raison. Je le salue à mon tour, avant de le suivre jusqu’au jardin accolé à la maison.

Une pelle à la main, je vois que l’un des jeunes s’est déjà mis à la tâche de retourner la terre. Vais-je devoir en faire de même ?!
Il me montre les gestes à avoir pour passer le râteau afin que le sol soit bien lisse. Contre toute attente, je m’attelle au travail bien plus appliquée que je ne le pensais. Mes bras forcent comme des dingues. Mon front sue à grosses gouttes. Nous y passons la matinée pour ne faire qu’un quart du terrain ! À midi, nous allons nous restaurer avant d’y retourner à quatorze heures, sous un soleil de plomb. L’après-midi s'écoule tandis que nous arrivons à la fin du projet.

Momo vient nous chercher, nous félicitant de notre assiduité, bien que je sois extrêmement fatiguée.
Il nous propose d'aller prendre le goûter chez lui, dans la maison qui se situe juste en face de la nôtre, après être passé dans son propre potager, dont il prend soin toute l’année. Il nous présente ses plantes, ses légumes et ses fruits, nous faisant découvrir la nature à l’état pur, sans artifices.
— Vous voyez les jeunes, ce que vous venez de faire n’est que le début d’un long processus pour atteindre la perfection. Il faut du courage, de la force, mais surtout de la volonté pour arriver à faire quelque chose de beau et de bon pour vous. Retenez ça, c’est important.
Pour la première fois de ma vie, je ressens de l’admiration pour un homme. En quelques phrases, il vient de nous donner une leçon, que je ne peux que retenir.

Assise dans un fauteuil, je découvre l'intérieur de cette maison. Tel un cabinet de curiosités, il y a des plantes un peu partout, des livres qui mangent les murs, des tableaux à l’huile peint par lui-même, et pour finir, ses dernières créations : des sculptures faites en argile. Je suis en totale admiration de ses œuvres et de son art. Cette maison regorge de simplicité et de culture.

Nous buvons un café en discutant de tout et de rien. Je me rends compte que je me sens reposée, malgré cette journée éreintante. La vie ici est calme et paisible. Était-ce trop demandé que de me laisser respirer l’air dont j’avais réellement besoin ?
Je n’en demandais pas trop, je demandais juste aux mauvaises personnes.

Et si ma vie avait simplement débuté au mauvais endroit ?

•••

Les mois d’avril et mai se sont écoulés bien plus rapidement que je ne le croyais. Mes journées sont fatigantes, mais remplies. Lorsque je ne m'occupe pas du jardin avec Momo, nous nous baladons dans la forêt parfois durant trois heures. Le simple fait de marcher, de respirer l’air frais de la nature et de profiter de celle-ci en m'extasiant à chaque nouveau pas que je fais, me requinque, comme si j’avais franchi la ligne d’une nouvelle étape.

Aujourd'hui, comme tous les samedis, nous partons tous en ville. Généralement, nous nous dirigeons vers la plus proche qui se situe à trente minutes et qui n’est autre que Millau. Toutefois, pour changer, nous décidons ensemble que nous irons à Rodez, qui est à une heure de chez nous. Je découvre cette ville qui n’a rien à envier à la capitale. Sa cathédrale est majestueuse, tandis que le vieux centre regorge de mystères entre ses petites ruelles faites en pierre. Je tombe littéralement amoureuse de cet endroit.

Lorsque nous rentrons au foyer, je me dirige d’un pas décidé chez Momo. Ma décision est prise.
— Je veux retourner en cours, l’informé-je sûre de moi.
Seul son sourire me répond.

Il est grand temps de reprendre ma vie en main.

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