Chapitre 44

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Je prenais une tasse de thé sur la terrasse. Il y avait sur la balustrade un couple d'hirondelle qui se taquinait gaiment en piaillant. Je les regardais amusée. Je me surpris même à pouffer d'attendrissement.

Le banc était encore humide de roser et le ciel était encore rosé et parsemé de nuage vaporeux.

-Il est tôt pour être déjà debout.

Je resserrais le châle sur mes épaules. Alexandre vient s'assoir à coté de moi. Je posais machinalement ma tête sur son épaule. Il passa un bras autour de moi et me serra contre lui. Il me prit la tasse des mains et en sirota quelques gorgées.

-C'est lorsqu'on en est privé que l'on prend la mesure de l'importance de ce genre de moment. Une bonne tasse de thé qui vous coule dans la gorge et vous procure une sensation de chaleur. Le soleil qui vous caresse la peau et le vent qui vous fouette le visage. Vous voir, vous voir sourire ça aussi ça m'a manqué.

Il sourit et me rendit ma tasse vide. Je haussais les sourcils et posais la tasse en riant.

-Pourquoi riez-vous ? Demanda naïvement mon frère.

-Vous m'avez manqué voilà tout. Je rie de bonheur. Expliquais-je simplement en me serrant un peu plus contre lui.

Mes longs cheveux châtains tombaient négligemment sur mes hanches. Alexandre attrapa une mèche qu'il se mit à enrouler autour de ses doigts.

-Je sais tout.

Je levais mollement la tête vers lui.

-Hm c'est-à-dire ?

Alexandre déposa un baiser sur mon front avant de prendre ma main.

-Cette bague ne ressemble pas vraiment à celle que James vous à offert. Non on dirait plutôt celle... celle de Théodore. Ainsi vous avez suivi mon conseil ?

-Oui et non, commençais-je, au début j'ai essayé de lutter mais quand tout est contre vous cela devient difficile. Aussi je me suis fait une raison et je m'étais préparé à l'épouser. Je n'en étais pas spécialement apaisé mais comme nos relations s'étaient améliorer je n'en éprouvais plus le même dégout. Puis il y a deux jours, Théodore est venu me trouver... il m'a expliqué que James et lui s'étaient rendue chez le régent. Ils ont réussi à le convaincre en employant des arguments plus ou moins éthiques. Théodore m'a alors renouvelé sa demande que je me suis empressé d'accepter.

-Vous vous étiez fait une raison ? S'exclama Alex.

-Oui, il le fallait. Vous m'avez beaucoup appris.

-Moi ? S'étonna-t-il.

-Oui vous ! Vous m'avez appris l'abnégation vous avez endossé des responsabilités qui n'étaient pas toujours les vôtres.

Je vis que je l'avais mis mal à l'aise. Il se redressa et s'écarta un peu de moi.

-Ce n'est pas pareil. Vous ne pouvez pas comparer nos deux situations. Sissi, j'ai tué un homme pour l'amour du ciel ! Et je n'en ai même pas été reconnu coupable. Je crois que c'est cela qui me sidère le plus. Ma véritable peine c'est de vivre avec cela sur ma conscience pour le reste de ma vie. Ce poids est parfois insupportable. Lorsque j'étais en prison j'ai eu tellement de temps pour réaliser la conséquence de mes actes. J'ai tué un homme mais combien ai-je brisé de vie ? Pourquoi vous semblez tous agir et vous comporter comme si j'étais vraiment innocent. Comme si rien ne s'était passé ! Je crois que vous ne vous rendez pas vraiment compte des enjeux et de ce que moi j'ai vécu. La prison n'est que la partie visible du problème. Mes actes me reviennent sans cesse en mémoire. Et je dois apprendre à vivre avec. Apprendre à boire une simple tasse de thé sans culpabiliser. Car lui ne le pourra plus jamais.

Moi, deux ducs et cinq frèresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant