J'ouvre la porte, la boule au ventre. La colère contre lui est si forte que j'ai envie de fuir, de le laisser là. Mais la peur me retient.
Je referme la porte derrière moi, silencieuse. En observant son bureau, je remarque un changement subtil par rapport à hier, sans pouvoir en identifier la cause. J'examine la pièce avec des yeux neufs. Adossé à son bureau, les bras croisés, il me fixe en silence. Son visage est marqué par la fatigue, ses traits tirés et son t-shirt froissé révèlent sa tension.
Je décide de ne pas prendre l'initiative de la conversation ; c'est à lui de faire le premier pas. Avançant doucement vers le bureau, je prends une chaise, la tire délicatement et m'assieds. Toujours sans un mot, je croise les bras et le regarde intensément.
Il ne lui faut que quelques minutes pour décroiser les bras et engager la conversation. Je l'ai bien observé, ce n'est pas un homme très patient.
– J'espère que tu as passé une bonne nuit.
Un sourcil se lève devant sa tentative d'approche. Se moque-t-il de moi ?
– Oui, très bien, dis-je d'une voix ferme.
– Je suis content de te voir. Nous devons parler. Je tiens à m'excuser pour mon absence et mon manque de communication.
À ces mots, je vois ses mains se crisper. Il lève les yeux vers moi, et l'agitation intérieure transparaît dans son regard. Son corps tendu, il tient fermement le dossier de son siège comme une bouée de sauvetage.
– Pourquoi ton attitude a-t-elle changé ? Pourquoi me montrer une façade si ce n'est pas toi au final ?
– C'est moi. Tu as découvert mon véritable moi pendant ces quelques jours, mais... des événements m'ont rendu méfiant.
– Quel est le rapport avec moi ? J'ai montré, malgré mes barrières, que je voulais suivre le destin. Pourquoi ne fais-tu pas de même ? Ne ressens-tu pas ce lien entre nous ?!
Ma voix monte presque au cri sur cette dernière phrase. Je ferme les yeux quelques instants pour reprendre ma respiration. Je ne dois pas m'énerver, je suis ici pour comprendre ce qui se passe. J'ouvre mes yeux bleus pour le regarder attentivement.
Son corps se relâche soudainement alors qu'il contourne le bureau pour venir s'asseoir à mes côtés. Il me fait face et prend mes mains dans les siennes.
– Je vais te dire ce qui m'a bloqué. Je te demanderai juste de ne pas m'interrompre jusqu'à la fin.
– Je ne veux pas remuer ton passé douloureux, je cherche seulement à comprendre pourquoi je suis rejetée par mon âme sœur. Je ne te couperai pas.
Il hoche la tête, un faible sourire apparaissant au coin de ses lèvres. Voir cet Alpha imposant, charismatique et parfois effrayant, réduit à cet état de faiblesse, me touche profondément. Je serre ses mains en signe de soutien.
– Merci. Il y a environ deux ans, une femme est arrivée dans notre meute. Seule et perdue, nous l'avons recueillie sans poser de questions sur son passé. Elle s'est fondue dans la masse puis a gagné en assurance. Elle s'appelait Anae, brune avec de très longs cheveux et de beaux yeux bruns. Tout en elle inspirait confiance. Elle a réussi à tous nous charmer, y compris moi. Je ne trouvais pas mon âme sœur. À force de chercher, j'ai fini par me dire que comme bon nombre de loups, je ne trouverais pas la mienne. Complètement sous son charme, je lui faisais confiance. J'ai convaincu le conseil des anciens qu'elle ferait une très bonne Luna. Eve aussi a fini par l'accepter. C'est cela qui a failli nous conduire à notre perte.
Il fait une pause, posant une main sur sa nuque, secouant légèrement la tête pour se ressaisir. Perdu dans ses souvenirs, je presse son genou de mes doigts pour lui apporter un soutien silencieux. Il revient à moi avant de reprendre.
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Enchaîné à son Destin
WerewolfPour notre espèce, la quête de l'âme sœur est une quête sacrée. C'est un principe immuable - sans notre moitié destinée, nous ne pouvons être entiers. Ainsi, nous consacrons nos vies à rechercher cette part de nous. Choisis par notre déesse la Lune...