✧ Chapitre 46 ✧

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Le cri de la capitaine fut le signal annonçant le début de l'assaut.

Avant même que les adversaires sortent de leur stupeur, les hommes sur le pont du Liberate lancèrent habilement leurs grappins dans les cordages et contre les garde-corps du navire. D'autres, présents au niveau de la batterie, déployèrent de grandes perches afin de maintenir les trappes à canons de l'ennemi, fermées.

C'est sous leurs cris de panique que les membres du Liberate grimpèrent à bord du navire adverse, sans rencontrer la moindre résistance. Pris par surprise, aucun homme sur le pont extérieur n'eut le temps d'aller chercher la moindre arme pour se défendre. Certains tenaient encore leurs balais dans leurs mains tremblantes lorsque les premiers matelots se jetèrent sur eux, sabres bandits. Sans plan de riposte, ni préparation, il leur était complètement impossible de répliquer. La plupart ne cherchèrent même pas à opposer la moindre résistance et se jetèrent au sol, démunis, les mains derrière la tête en signe de retraite.

Cependant, leurs hurlements de panique furent suffisant pour alerter ceux qui se trouvaient dans les ponts inférieurs et qui ne tardèrent pas à sortir des cales du navire, armes au poing. C'est alors que les premières détonations des mousquets et autres armes à feu éclatèrent sur le pont, couvrant l'atmosphère d'une odeur de poudre. Mais cet échange fut très bref. Les déflagrations cessèrent dès que les premiers corps tombèrent sur le sol à la sortie de l'escalier menant aux ponts inférieurs.

Les pirates enjambèrent sans mal les wéliviens à terre pour encercler en un instant l'unique sortie des soldats, piégés dans les entrailles de leur propre navire. D'un même geste, ils braquèrent tous leurs mousquets sur les plus courageux qui tentèrent de monter l'escalier malgré leur présence.

— Plus un pas ! hurla Luke en mettant en joue le soldat qui, malgré son pistolet à la main, n'osa pas contredire son ordre.

Son regard déterminé se planta dans le sien, effrayé. Le wélivien s'immobilisa net dans la cage de l'escalier, malgré les cris furieux de ses coéquipiers derrière lui.

Luke ajusta le canon de son arme afin de pointer directement la tête de l'homme à quelques mètres de lui. Les autres membres du Liberate firent de même sans un mot. On n'entendit plus que les sécurités métalliques des mousquets sauter, preuve irréfutable qu'ils étaient prêts à faire feu au moindre geste.

Leur stratégie était infaillible. En bloquant le seul point d'accès au pont d'un navire, cela rendait impossible toute sortie de l'équipage qui, pris par surprise, se retrouvait totalement piégé dans leur propre navire. Dans la majorité des cas, les adversaires qui se trouvaient à l'extérieur lors de l'abordage se rendaient sans opposer de résistance, effrayés par l'apparition soudaine d'un des navires pirate les plus redoutés par leur patrie. Mais rapidement, le reste de l'équipage sortait des soutes souvent armés, alertés par leurs coéquipiers. Pour éviter cela, il suffisait aux pirates de se placer à l'entrée de celles-ci et tirer dans le plancher pour dissuader la moindre riposte. Le prochain qui tentait de sortir le ferait au risque de se prendre une balle au milieu du front, comme les premiers avant lui.

— Apportez la poudre cendrée ! hurla Luke, qui tenait toujours en joue l'homme tétanisé dans l'escalier, devant tous ses autres coéquipiers terrifiés eux aussi.

Pour ces hommes, il incarnait la mort. Pour lui, ils n'étaient que des intrus qui, depuis des siècles, envahissaient leurs mers sacrées sans relâche.

Son regard glacial ne quittait plus le soldat qu'il avait dans sa ligne de mire. Il savait qu'à la moindre erreur d'inattention, c'était lui qui finirait à l'agonie. Mais un chef d'équipage ne pouvait pas se permettre de mourir sans avoir pu, au préalable, ramené tous ses hommes à bon port. Sa mission avait déjà à moitié échoué. Il ne pouvait pas se permettre de perdre davantage de confères au cours de cette ultime aventure. Ses doigts resserrèrent leur emprise sous le canon de son mousquet. Pour la mémoire de leurs frères, il ne pouvait pas se permettre de faire la moindre erreur. Dans quelques mois, ils profiteraient tous ensemble d'une retraite méritée au calme d'une île illinoise.

Meeryn's Tales - Edimas : Tome 1 [EN COURS]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant