✧ Chapitre 22 ✧

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Dans cette même cabine familiale, l'ambiance était bien plus tendue que sur le pont, où les derniers matelots rejoignaient le dortoir sans un bruit. En effet, dès que la porte s'était refermée, les masques étaient tombés. Orel avait adopté un air sévère, en se tournant vers Marta, agacé par ce qu'il venait de se passer :

— Tu ne veux pas le lâcher un peu ? demanda-t-il en prenant sa fille dans ses bras pour l'emmener jusqu'à sa petite chambre, dont Marta venait d'ouvrir la porte. Elle ne craint rien avec lui, nos recruteurs ont été formels à ce sujet là.

— Tu sais très bien pourquoi je suis méfiante. Nous pensions la même chose la dernière fois. Est-ce que je dois te rappeler comment ça c'est terminé ?

— Non. Mais tu...

— Orel, arrêtes. Tu devrais l'être autant que moi, au lieu d'encourager leur complicité. Ta confiance a déjà failli nous anéantir une fois. Je ne veux pas que cela se reproduise, déclara la capitaine aux longs cheveux bruns, qui retourna à son bureau.

Elle s'y pencha et arrangea plusieurs cartes disposées dessus avec préoccupation. La voix d'Orel lui répondit depuis la chambre de leur fille :

— Ne dis pas n'importe quoi. Thomas a quelque chose de spécial, tu le sais autant que moi.

Elle se tourna immédiatement vers lui lorsqu'il sortit, et planta son regard dur dans le sien.

— Notre intuition n'est pas infaillible Orel ! s'énerva-t-elle. Tu n'apprends toujours pas de nos erreurs.

— Si, nous...

— Non. Arrête de faire l'enfant et prends conscience que notre fille ne vit plus sur un bateau où elle est constamment en sécurité. Les menaces ne cessent de grandir partout où nous allons. Les patrouilles anti-pirates augmentent à vue d'oeil à Weliven, notre nouvelle recrue se fait prendre dans une embuscade avant d'embarquer à bord, les bateaux royaux se font de plus en plus présents en Mer de Téséhis et... Bon sang Orel, dois-je te rappeler qu'une guerre se prépare entre les deux plus grandes nations meeryniennes ?

— Je sais, mais Thomas n'est pas...

— Nous n'en savons rien ! Je resterai méfiante envers Moore tant qu'il ne m'aura pas prouvé qu'il est digne de confiance et que Thaalya est en sécurité avec lui.

— Ce n'est pas ce qu'il vient juste de montrer ?

— De quoi, ramener notre fille ivre ? Par Sorath ! Tu trouves cela responsable et digne de confiance ?

— Marta...

— Ecoute Orel, je n'ai pas encore confiance en lui. C'est un fait, et je ne suis pas prête à changer d'avis. Tant que je ne serai pas certaine que Thaalya ne court aucun danger avec lui, je resterai méfiante. Nous avons fait l'erreur une fois, je ne veux pas que cela se reproduise.

Le capitaine resta silencieux un instant, le regard planté dans celui de sa compagne. Ils échangèrent ainsi quelques paroles silencieuses, sans doute trop lourdes pour être prononcées à voix haute.

Ils restèrent ainsi immobiles l'un en face de l'autre, dans un silence presque pesant. Ce fut Marta qui bougea la première, pour replier la carte qu'elle venait de déplacer sur la grande table au centre de la pièce.

Orel la regarda faire sans un mot, avant de venir l'aider à ranger les papiers qui se trouvaient là, la mine préoccupée. Les paroles de leur conversation tournaient en boucle dans sa tête, sans parvenir à trouver de réponse convaincante. Une fois la table débarrassée, il suivit du regard Marta qui s'approcha du grand planisphère accroché au mur.

— Tant que nous serons à ses côtés, elle sera en sécurité, murmura-t-elle en suivant des yeux l'itinéraire qu'ils étaient en train de suivre.

— Et après ?

Il la rejoignit, le regard rivé sur la carte qui comportait la destination finale de leur long périple. Au même moment, il sentit les doigts de sa compagne chercher les siens avec hésitation. Sa paume se pressa contre la sienne avec tendresse.

— L'après se réfléchira demain, avoua-t-elle, mais demain lui appartiendra.

Orel serra sa main dans la sienne avec confiance bien qu'une once de nervosité tentait de se frayer un chemin jusqu'à sa gorge. D'une voix presque inaudible, il murmura :

— Rassurons-nous, les confins sont encore loins.

A cet instant, il fallu vivre et espérer que ce demain ne se transforme pas en lendemain.

A cet instant, il fallu vivre et espérer que ce demain ne se transforme pas en lendemain

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Meeryn's Tales - Edimas : Tome 1 [EN COURS]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant