✧ Chapitre 4 ✧

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Une fois l'entrevue sous tension terminée, Marta Keppler le prit de nouveau sous son aile pour l'emmener voir son "tuteur", autrement dit le matelot qui allait s'occuper de lui et le former jusqu'à ce qu'il puisse se gérer seul à bord.

Ils montèrent à la batterie, un niveau plus haut. Celle-ci était constituée de deux rangées de canons, sans doute armés des poudres les plus efficaces de Meeryn. L'air ici était plus frais, malgré les quelques trappes ouvertes sur l'extérieur au niveau des pièces d'artillerie. L'odeur âcre de la poudre donna un sourire nostalgique à Thomas : cela faisait des mois qu'il n'en avait plus sentit.

— Suivez-moi, annonça la capitaine en contournant une malle à boulets.

Il la suivit entre tout le matériel d'artillerie accroché aux différents éléments de la charpente du navire. Contrairement à ce qu'il s'était imaginé, le Liberate ne possédait pas une centaine de canons comme les navires royaux, mais seulement une vingtaine. C'était très peu pour un bateau d'une telle renommée. Le jeune se demanda donc grâce à quoi les Keppler tenaient leurs exploits si cela ne venait pas de leur puissance de frappe.

Tandis qu'ils approchaient du fond du niveau, Thomas aperçut un matelot de dos, assis à califourchon sur l'un des canons. Il était penché vers une trappe ouverte, concentré sur un carnet qu'il tenait entre ses mains. Les boucles brunes de ses cheveux touchaient à peine ses épaules couvertes d'une chemise trop grande.

Bien qu'ils s'approchaient, l'inconnu ne bougea pas d'un poil, même lorsque Thomas trébucha contre un sac de cordages. Soudain, Marta Keppler s'arrêta d'un coup pour se poster devant lui avant qu'ils n'atteignent le matelot. La faible luminosité ne l'empêcha pas de distinguer son regard hostile :

– Je vous préviens, Moore. Nous vous avons accepté sur le Liberate, aux côtés du plus puissant équipage de Meeryn. Rien ne nous empêche de vous jeter par-dessus bord au moindre écart, que ce soit avec l'équipage, ou elle. Me suis-je faite comprendre ?

Son regard s'ancra dans celui du blond avec détermination, si bien qu'il peina à le soutenir. Les capitaines avaient le droit de vie ou de mort sur leur équipage. En effet, le Codex le stipulait très clairement, c'est pourquoi les paroles de Marta Keppler n'étaient pas discutables. Il fut tant déstabilisé par sa menace, que le blond en oublia presque l'usage de sa voix et hocha la tête en guise de réponse.

La capitaine le toisa une nouvelle fois, comme pour s'assurer qu'il avait bien saisi le message, puis tourna les talons pour rejoindre la silhouette assise sur un canon :

– Thaalya, je t'avais demandé de nous rejoindre sur le pont supérieur.

Ce fut à cet instant précis que le blond eut le déclic. Il fronça les sourcils et posa immédiatement son regard sur la jeune femme – et non le moussaillon – qui était assise devant eux. La large chemise qu'elle portait ainsi que ses cheveux courts l'avaient porté à confusion.

La jeune brune se retourna enfin face à eux, en repassant agilement une jambe par-dessus le canon. C'est à cet instant précis que leurs regards se croisèrent pour la toute première fois, avec méfiance.

Perplexe, Thomas fronça davantage les sourcils en étudiant le visage de la jeune femme. Une peau mate, un regard noisette brillant de curiosité, un nez parsemé de tâches de rousseurs, mais surtout une impression de déjà-vu à bord du navire.

C'était du délire. La légende était donc vraie ?

Thomas eut l'impression de voir un personnage mythique prendre vie sous ses yeux ébahis. Les Keppler avaient réellement un enfant, une fille comme certaines rumeurs le supposaient depuis des années. Il reconnut au premier coup d'œil les tâches de rousseurs si particulières du capitaine Orel et le regard noisette de Marta, bien qu'illuminé d'une lueur plus paternelle.

Meeryn's Tales - Edimas : Tome 1 [EN COURS]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant