Chapitre 43

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Mon cœur se serra de crainte et d'incompréhension. Ma main sur la poignée, j'hésitai un long moment à ouvrir la porte. Est-ce Haysen? Ou bien quelqu'un d'autre? Si c'est Haysen qui souffre, vais-je pouvoir le défendre et venir à son secours ? Mais si cette souffrance est provoquée par lui, que vais-je bien pouvoir faire?

Pendant qu'un millier de questions se bousculaient dans ma tête avec précipitation, je réalisai une nouvelle fois qu'Haysen m'était totalement étranger. Je ne le connais pas. Si j'apprenais en ouvrant la porte qu'il était effectivement le bourreau à l'origine de ces cris, qu'allai-je faire? Pendant un instant, j'hésitai à fuir. Peut-être serait-il préférable de ne pas savoir. A cette pensée, ma main quitta la poignée de la porte. Je fis demi-tour, et après quelques pas, un cri plus profond m'arrêta.

Je sentais des gouttes de sueur froide couler le long de mon dos, mes mains moites froissaient ma robe de nuit, et ma mâchoire crispée me faisait mal aux dents. Désespérée. J'étais désespérée en comprenant que malgré ma peur, ma curiosité prendrait le dessus. Redoutant l'inévitable, mon corps s'approcha de la porte comme si je n'avait plus le contrôle. Ma main, sans que je ne le veuille, agrippa la poignée, et mon bras tira la porte, sans que je ne lui autorise, la laissant entre ouverte.

Par une petite brèche discrète, mon œil analysa l'angle de la pièce sombre qui m'était visible. Mais personne, j'ouvris alors un peu plus la porte, et pus distinguer la silhouette de deux hommes éclairés par la fenêtre. Mon œil s'adapta à la lumière, me permettant de voir qui était présent.

Haysen, les mains jointes dans son dos, se tenait debout face à son bureau, la tête trempée. L'autre homme, plus robuste, se tenait à sa droite. Sans bouger, tout deux restaient étrangement silencieux. Quand soudain, l'inconnu agrippa l'arrière de la tête d'Haysen, et enfonça sa tête dans une bassine d'eau posée sur le bureau.

Mon cœur s'arrêta. Immobile, je ne sentais plus mon corps. Seul le bruit de son souffle transformé en bulles d'eau résonnait dans la pièce. Puis vint les cris étouffés d'Haysen. Etouffés par l'eau. Des cris de douleur et de supplications. Mon cœur, arrêté, tout comme ma respiration, se serra douloureusement. Pendant que je retenais ma respiration et ma voix, les larmes de stupéfactions et de frayeur s'abattaient sur mes joues. Enfin, l'homme retira sa tête de l'eau, le laissant reprendre son souffle saccadé de toussotement. Il est vivant.

Après avoir repris sa respiration, Haysen se redressa. Je remarquai qu'il n'avait pas fait signe de résistance, ses mains toujours dans son dos, il était sage, obéissant.

CLAC!

Sans que je ne mit attends, l'homme gifla Haysen. Mais à ma plus grande incompréhension, Haysen, mon époux, le puissant Duc de l'empire, reprenait sa position, droit comme un piquet.

- Tu ne t'es toujours pas amélioré, dit l'inconnu. Comment se fait-il que tu remportes des batailles, mais que tu n'arrives pas à me vaincre en duel?, il continua tout en s'écartant d'Haysen, se dirigeant vers le sofa.

?? En duel? Malgré les questions, Haysen restait à sa place, muet et immobile.

- Tu as faibli. A plusieurs reprises, tu aurais pu le remporter, mais à chaque fois, tu finis par hésiter. Hhaaa, tu es toujours le petit garçon peureux que tu étais. Tu es toujours décevant.

Terminant sur ces mots, l'homme s'assit sur le sofa, et par un heureux hasard, un reflet de lune éclaira son visage. C'était Cairn. L'homme à la balafre dont Haysen m'avait parlé tout à l'heure. L'homme avec qui Haysen s'était venté, et avait été satisfait d'avoir combattu lors de l'entraînement d'aujourd'hui.

Plus d'informations m'avaient été données et pourtant, je me retrouvais encore plus démunie face à l'incompréhension.

Cairn posa son pied sur la petite table face à lui, et d'un coup la fit reculer. Levant la main gauche, il claqua de ses doigts, et à cet appel, Haysen vint à lui. Dans un silence de plomb, Cairn, accoudé sur ses genoux, attendait patiemment. Haysen, arrivé face à lui, descendit, s'asseyant sur ses genoux. Cette scène m'effraya davantage. Je n'étais plus curieuse. Je ne voulais plus savoir.

Cette dernière vision de Cairn regardant avec un calme inquiétant Haysen, qui lui avait les yeux baissés, je ne pus m'empêcher de refermer discrètement la porte. Lentement, je reculai. Retirant mes souliers de mes pieds, je marchais quelques pas, et lorsque je fus assez éloignée, mon cœur reprit son pouls et mon estomac se crispa, donnant à mes jambes toute la vitesse et la force dont j'avais besoin pour fuir.

De retour dans la chambre d'Haysen, je me précipitai dans le lit, hantée par ce que je n'aurai pas dû voir. Mon corps recroquevillé et caché sous la couette, je peinais à reprendre ma respiration que j'avais trop longtemps ralentie.

***

Les oiseaux chantaient, et je n'avais pas dormi de la nuit. Mes yeux étaient secs, déshydratés par mes pleurs. Ma gorge douloureuse et un mal de crâne infernal. J'étais seule. Haysen n'était pas revenu de la nuit, et ce silence, transpercé par les chants des oiseaux dans la lueur du jour, me pesait. Je voulais me réveiller, et rire de ce cauchemar.

Je n'étais physiquement, ni visuellement pas présentable. Mes yeux gonflés et ma migraine m'empêchait de sortir. Heureusement, je sus rassurer Ophélia que mon état était dû à mes règles douloureuses, ce qui me permit de rester au lit tout la journée.

***

Une sensation agréable caressait mon corps. Pourtant, j'étais gênée. Je désirais ce toucher, mais me questionnais sur la provenance, son origine. J'ouvris les yeux de panique, réalisant que je ne savais pas ce que c'était.

- Iridessa, vous allez bien? me demanda Haysen, sa main posée sur mon ventre.

Je le regardais surprise.

- Vous avez dormi toute la journée, voulez-vous que je vous ramène de quoi manger?

- ...non.

Il embrassa mes paupières bouffées et me blottit contre lui. Par une répétition de caresses sur ma tête, il conclut " Dormez, reposez-vous encore."

Deux Ans Après Notre MariageOù les histoires vivent. Découvrez maintenant