Chapitre 37

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Mon sommeil fut interrompu par le bruit et les mouvements me dérangeant.

- Vous partez, demandai-je?

Etant toujours allongé à mes côtés, il embrassa mon front et s'excusa en répondant qu'il irait dormir dans ses appartements. Le regardant se rhabiller, j'étais confuse et inconsciemment, je pris sa main et lui demanda de rester.

Peut-être était-ce à cause de mon expression, mais après un moment d'hésitation, il accepta. Haysen se rallongea près de moi, l'atmosphère était étrange et pesante. Le mal aise que je ressentais me donnait envie de fuir, l'impression que je l'avais obligé à rester m'embarrassait.

- Excusez-moi, je ne veux pas vous obliger à rester... vous pouvez partir si vous le souhaitez.

- ... Non, je resterai si c'est ce que vous souhaitez.

Ce que je souhaite ? Décidément, il aurait peut-être fallu que je ne le retienne pas. Après un moment de silence, où nos corps allongés comme deux lignes parallèles étaient immobiles et rigides, j'osai une seconde fois:

- Vous n'avez pas aimé?

- Pardon??

Hésitante, un nouvel élan de courage me poussa à me répéter. Par un regard perplexe, il s'empressa de répondre à mes craintes.

- Si, bien sûr que si, me dit-il en se tournant de trois-quarts vers moi. ... Je ne voulais simplement pas vous déranger durant votre sommeil.

- ... Pourtant, c'est en partant que vous avez perturbé mon sommeil, répliquais-je avec un sourire.

Comprenant ma blague légère, il me sourit également et dit "Veuillez m'en excuser". Je sentais ses doigts s'entremêler dans mes cheveux. Il tortillait une mèche autour de son index pour défaire la boucle et recommencer. Mes craintes n'étaient pourtant pas atténuées.

- Haysen, si... si jamais vous n'avez pas aimé, je le comprendrai, vous savez. C'était ma première fois, je peux donc apprendre. Permettez moi alors d'user de votre patience.

Après avoir jeté cette pensée à haute voix, je tournai ma tête d'embarras à son opposé. Son bras entrelaça ma taille pour rapprocher d'un coup ferme mon corps vers le sien.

- J'ai aimé. Pourquoi pensez-vous le contraire?

- Parce que vous vouliez partir.

-... Comme je vous l'ai dit, c'était pour ne pas vous déranger dans votre sommeil.

- Il est pourtant courant que les époux dorment de temps en temps dans le même lit, répliquai-je avec tact.

Mon dernier argument le laissait silencieux, et par cette réaction, je regrettai instantanément de m'être mise dans une position désavantageuse face à lui. Cachant mon visage avec mes mains, je me tournai pour lui faire face.

- Je sais que vous avez beaucoup d'expérience, alors apprenez moi. J'apprends vite, je ne vous décevrez pas.

Ces phrases me faisaient honte, comme une impression de supplier quelque chose que je ne pouvais contrôler me gênait au plus haut point.

- Vous savez, je n'ai pas beaucoup d'expérience.

Cette phrase éveilla en moi une curiosité sans limites. Par ses mots, je levai ma tête vers la sienne, laissant apparaître mes yeux.

- Pourtant, quand je vous ai demandé si c'était votre première fois, vous ne m'aviez pas répondu.

- Et si je vous disais que ma première fois était ma seule et unique expérience?

Plusieurs questions se bousculaient dans ma tête, mais si je devais en poser quelques-unes, il faillait être stratège pour ne pas qu'il me trouve pesante.

- Etait-ce votre premier amour, demandai-je timidement.

Etonné de ma question, il ria, s'allongeant sur le dos pendant que je m'élevais sur mes coudes pour voir son visage.

- Non, haha, loin de là.

- Peut-être étiez-vous curieux?

- Non plus, dit-il comprenant par mon regard que je désirais en savoir plus. Je suis parti à la guerre pour la première fois à l'âge 16 ans avec mon père. L'empereur nous avait demandé de combattre à la frontière sud contre les barbares, et j'avais la majorité pour combattre. Un jour, après une journée sur le champ de bataille, mon père est revenu sans vie, ramené par son bras droit. Ça faisait un an que nous combattions chaque jour, étrangement, j'étais persuadé que mon père ne mourrait jamais, en tout cas, pas avant moi. Le soir, lorsque que j'ai vu son corps froid et sans couleur, je n'étais pas triste. J'ai juste accepté l'inévitable et le naturel des conséquences de la guerre. Mmmh, peut-être bien une semaine plus tard, la guerre s'acheva, un homme avait réussit à avoir la tête du chef barbare. Au campement, pour fêter la victoire, les hommes avaient fait appel aux femmes de joie et à l'alcool. Ni l'un, ni l'autre ne m'intéressaient, je m'étais alors éloigné de la foule bruyante. En entrant dans ma tente, quelques heures plus tard, une fille nue était allongée sur ma paillasse. Je me suis simplement laissé entraîné par ses mouvements et invitations. Plusieurs semaines plus tard, j'ai appris que c'était le bras droit de mon père dont je vous avais parlé qui avait demandé à cette fille de me servir, haha.

Pourquoi riait-il ? Plutôt que le rire, je ressentais de la peine pour son histoire.

- La rencontre avec cette femme a dû vous soulager.

- Vous vous moquez?

- Non! Pas du tout! Je suis sérieuse. Vous n'aviez que 17 ans, et vous veniez de perdre votre père, je suis reconnaissante envers le bras droit de votre père. J'espère simplement que cela vous a apporté du réconfort.

Il était étonné de ma réaction, pourtant je trouvais ma manière de réagir totalement adéquate et sensée. Nous nous regardions, et je sentais dans ses yeux le doute de ma sincérité, mais surtout la surprise. Posant ma main sur sa joue, je lui posai une question risquée. Risquée de par sa signification, mais aussi de par l'importance que je pouvais me donner.

- Serait-ce présomptueux de ma part de vouloir vous consoler aujourd'hui?

Deux Ans Après Notre MariageOù les histoires vivent. Découvrez maintenant