Chapitre 6: C'était ma deuxième question. Anastasia

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            Mes yeux s'ouvrent. Je sursaute. Je suffoque. Mon cœur palpite à vive allure. Je me souviens de tout. Grand Daddy. Le parc. Le noir qui m'assaille. J'essaie de recouvrer une respiration normale et balaie les alentours du regard. Je suis toujours dehors et il fait toujours nuit.

— Bon Dieu de merde ! m'écrié-je lorsque mes yeux se posent sur celui assit à mes pieds.

— Tu vas vraiment finir par le contrarié à jurer comme ça.

Les connexions ont du mal à se faire dans ma tête. Qu'est-ce qu'il fout là ? Mais je me ressaisis et m'empresse de remettre ma veste comme il faut. Il était à deux doigts de voir mes bras. La chiasse, il s'en est fallu de peu.

— C'est bon ? T'as recouvré l'esprit ?

Je me contente de hocher la tête pendant qu'il se relève et tire sur sa veste de costume pour la défroisser. Il tourne les talons et s'éloigne.

— Tu me suivais ? reprends-je plus fort.

Il s'arrête, dos à moi et ne tourne que sa tête me laissant admirer ce profil, divin. Il pouffe. Il se moque de moi.

— Et pourquoi je ferais ça ?

— C'était ma deuxième question.

Ma pique fait son effet.

Il s'avance de nouveau vers moi et me domine de toute sa hauteur. A ce moment-là, je ne peux décrocher mes yeux de son visage parfait. Je ne pense pas au mien qui doit être affreusement ridicule au possible. Je ne vois que lui. Ses arcades prononcées recouvertes de ses épais sourcils bruns. Ses yeux noirs, intenses et brillants qui sondent mon âme. Sa peau rasée de près, sa mâchoire anguleuse. Il est aussi beau qu'il est glacial, c'en est envoûtant.

— Je n'ai aucun intérêt à suivre quelqu'un comme toi, crache-t-il. Mets ça sur le dos de ta bonne étoile. Tu as juste eu de la chance que je sois dans les parages.

— Ma bonne étoile, murmuré-je dans un rire incrédule.

— Vous êtes tous pareil, lâche-t-il en repartant. Vous ne cessez de pleurer sur votre sort.

Fidèle à moi-même, je le regarde s'éloigner, admirative de voir à quel point il est aussi beau de dos que de face.

Bravo, Nastasia, encore une fois, tu craques pour quelqu'un qui n'est pas fait pour toi.

Si j'avais les moyens de me payer des séances de psychanalyses, j'aurais eu le droit à tout un tas de conneries sur mon enfance qui a pourri et gâcher mon avenir.

Il ne faut pas avoir fait de longues études pour comprendre que le problème vient de l'enfance et des parents. Je m'appelle Nastasia Volha, il n'y en a pas des masses à Londres. La seule famille d'immigrés Russes portant ce nom, habite dans les quartiers difficiles de Peckham. Et c'est la mienne. Du moins ce qu'il en reste. Pavel Volha. Certainement en train de cuver dans une cage d'escalier à l'heure qu'il est. Les services sociaux de Londres me connaissent mieux que je ne me connais moi-même. Il n'est donc pas difficile de savoir d'où vient mon problème. Je ne suis qu'une pauvre fille qui cherche désespérément un sauveur. Quelqu'un qui l'aimera à en mourir, pour qui je serais la plus importante.

Mais pour l'instant, je suis seule dans un parc, en pleine nuit. Je reprends la route pour regagner mon appartement minable de neuf mètre carré, celui que Grand Daddy me loue pour la modique somme de huit cents Livres sterling. Si on fait le calcul, je lui dois plus de deux-mille-quatre cents Livres sterlings, avec les charges. Pas étonnant que le bougre soit à cran. Le jeu en vaut la chandelle. Je suis loin de Peckham. Loin de Pavel. Je rame, c'est vrai. Les choses ne sont pas aussi faciles que je le pensais. Mais quelque chose va se passer. Quelque chose de bien qui me sortira de cette vie merdique. Il n'y a pas d'autres choix. Je dois m'en sortir. C'est vital. 

Brutale RédemptionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant