Brutale Rédemption

Epilogue: Parce qu'elle est humaine, tout simplement. Yury

            Je caresse du bout des doigts, la cicatrice encore rougeâtre de ma Nastasia. Ses doigts glissent sur mon torse en de petits cercles avant qu'elle approche son visage près du mien pour déposer un délicat baiser sur mes lèvres.

J'existe depuis des milliers d'années. Depuis que le monde est monde mais ce n'est que depuis ces dernières semaines que je vis vraiment.

Je n'ai plus ni dons, ni pouvoirs, pourtant cela n'empêche en rien ma nature profonde. J'ai été créé pour être le protecteur et même si ma foi en l'être humain s'est perdue il y a des années, je me suis promis de veiller sur cette jolie blonde qui a ravivé la flamme au plus profond de mon être. Je suis Yury, ex-Ange de la protection et je promets solennellement de protéger Nastasia Volha au péril de ma vie.

Avant tout, il nous reste quelques histoires à régler. Comme chaque jour depuis ma renaissance et la sienne, nous nous préparons à arpenter les rues de Londres. Élégants, classes et distingués.

Ma Nastasia ouvre les portes de notre nouveau dressing, et comme à chaque fois, c'est à elle qu'incombe l'honneur de choisir parmi notre arsenal, ce qui m'accompagnera ce soir dans les rues sombres londoniennes. Une armoire dédiée aux artefacts Célestes et démoniaques que nous nous sommes offerts ou attribués par la force. Elle n'oublie jamais de me tendre une arme des plus banales. D'un clin d'œil aussi complice que sensuel, elle me tend un glock 42 qui se glisse très bien à ma ceinture que je recouvre par ma veste de costume. Quant à moi, je lui choisis une lame fine, élégante et aussi tranchante qu'elle.

Je m'agenouille. Je relève sa robe jusque sur le haut de sa cuisse. Je dépose la lame aiguisée dans le fourreau en cuir prévu à cet effet. Je baise sa cuisse jusqu'à son genou tout en replaçant sa robe correctement.

Comme tous les soirs, maintenant, nous quittons l'appartement, main dans la main, le sourire aux lèvres, plus heureux que jamais.

A l'extérieur, dans la nuit seulement éclairée par les pubs en fête, je parade aux bras de mon humaine qui, à mon grand soulagement, a troqué ses bottines contre une paire d'escarpins qui lui dessinent les jambes à la perfection.

Ce soir, nous rejoignons un investisseur d'EDCA. Un homme berné et en colère que j'aie rencontré ce fameux soir en compagnie de Bélial. Il semblerait que le Lord et son fils aient perdu les « bonnes grâces » des Infernaux en plantant une dague dans le corps de l'humaine dont ils avaient terriblement besoin.

Notre rencontre doit être soignée. Le gentleman a des informations importantes et cruciales à nous transmettre pour faire tomber les Garett. Des informations utiles à notre vengeance. Après tout, ne sommes que des humains.

Ma Nastasia s'arrête devant une affiche, postée à un arrêt de bus. Dessus, Timothy se tient debout, tout sourire, les bras croisés. Elle ferme un œil et vise le portrait du chien avec un pistolet qu'elle imite avec ses doigts.

— Pan, souffle-t-elle.

Je la ramène vers moi et lui dévore les lèvres sans craindre de perdre le contrôle. Il n'y a plus ni orage, ni éclair, je suis libre d'embrasser, de posséder, d'aimer mon humaine, aussi fort que je le peux.

— Allons-y, dit-elle en me repoussant, le sourire aux lèvres.

Je m'exécute comme je le fais à chacun de ses souhaits. J'entrelace mes doigts autour des siens et porte sa main à ma bouche pour lui déposer un tendre baiser.

Nous passons devant le pub où Asmodée passe la majeure partie de son temps. Comme à chaque fois, elle ne loupe pas une occasion de s'entourer de jolies filles. Elle me fixe, un petit sourire aux lèvres que je lui rends sans retenue.

C'est au tour de Mammon de croiser notre chemin. Je sens son regard sévère sur le trottoir d'en face. Il a perdu son entrain tout comme il a perdu son équipière, la belle Méphistophélès. Elle a renfilé son costume tentaculaire et est repartie à l'Infernal pour rester auprès de ses légions et de son Bouc, furieux qu'ils aient faillis à leur mission.

C'est moi qui me promène, ce soir, avec celle qu'ils espéraient transformer en huitième Princesse de l'enfer. La Vaine Gloire. Mais mon humaine a trouvé son humain et le vide béant qui la rongeait s'est remplit par tout l'amour que je lui porte.

Je le salue d'un geste de la tête pendant qu'il recouvre ses yeux de ce liquide noir, visqueux. Je luis souris avec toute l'arrogance dont un humain est capable et continue ma route en jetant un regard vers le ciel.

Je pose mes deux doigts contre ma tempe et offre un salut militaire et provocateur au Céleste qui m'espionne. A quoi bon mes chers frères ? Je ne suis plus qu'un simple humain et vous êtes toujours régis par vos règles barbares et stupides.

Nastasia et moi ne vivons plus que sous nos propres règles. Que cela ne vous déplaise, anges ou démons, vous ne valez pas mieux les uns que les autres. Vous ne valez pas mieux que nous.

En sauvant Nastasia pour la première fois, j'ignorais que c'est elle qui me sauverait. Aucun des Célestes ne lui arrive à la cheville et je promets que peu importe les conséquences, je mettrais ce monde à feu et à sang pour la garder près de moi.

Elle s'arrête devant le restaurant où nous avons rendez-vous. Je l'imite et regarde face à nous, le gentleman assit sur une chaise, le dos tourné, un cigare à la main.

— Monsieur Montgomery ! commence-t-elle en croisant ses jambes avec une sensualité folle.

Je m'assieds à mon tour tout en saluant celle qui accompagne le gentleman à chacun de ses rendez-vous. Bélial.

Je pose une main sur la cuisse de ma bien-aimée et la laisse parler. Lord Garett avait raison sur une chose. Nastasia est une oratrice hors pair qui happe l'attention comme personne et convainc chaque malheureux humain qui croise sa route.

A elle seule, elle est plus forte que le ciel et l'enfer réunit. Parce qu'elle a été brisée. Parce qu'elle n'a plus aucune foutue règle. Parce qu'elle est humaine, tout simplement.

FIN