Chapitre 41: Ce fut un plaisir de te revoir. Yury

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            J'accompagne Cody et ses hommes à The Goring, le grand hôtel cinq étoiles de Londres, à Westminster, près du Big Ben. Le lieu n'a pas été privatisé. Des gentlemen, âgés pour la plupart, dégustent des mets raffinés tandis que d'autres se contentent d'une tasse de thé à 50£.

Je reste sur les talons de l'homme de Lord Garett et slalome entre les tables et les fauteuils.

Mes dents se serrent. Mes muscles se tendent. Si l'entretien tourne au vinaigre, ça fera beaucoup de monde à protéger.

Nous arrivons au fond de la salle, près de la baie vitrée. Un homme, d'une quarantaine d'année tout au plus, est assis, les jambes croisées, sous le toit en verre qui laisse l'éclairage extérieur tamiser le coin tranquille qu'il a choisi.

Mes sens sont aux aguets.

Son visage est dur, sévère. Il ne semble pas de ceux à qui on peut faire renoncer à des milliers de Livres sterlings si facilement.

La tension monte.

Ma mission va être très délicate cette fois.

Cody s'assoit face à l'homme suivi par deux de ses collègues qui l'imitent. Je reste debout, derrière lui, les mains croisées devant moi, droit.

Le gentleman ne me porte aucune attention. Il ne fait aucun doute qu'il est habitué aux entretiens de ce genre.

Je n'aime pas ça.

Des claquements de talons attirent mon attention. Une femme s'approche de nous et pose une main sur l'épaule de l'homme avant de prendre place à ses côtés.

Mes yeux s'agrandissent.

Mon sang se fige dans mes veines.

Je reconnaitrais ce visage entre mille.

Elle croise ses jambes à son tour et dégage ses longs cheveux bruns de son épaule. Elle me fixe, me sourit.

Alors que Cody ouvre la mallette pour sortir les documents officiels, je ne peux décrocher mon regard grave de ce visage que je n'ai pas vu depuis des siècles.

Des yeux bleus perçants. Des sourcils épais. Pour tout humain, elle est d'une beauté à glacer le sang. Pour moi, elle est la Princesse de l'Infernal que je redoute le plus après Azazel.

Bélial, maitresse de la colère.

Mon cœur s'accélère.

Qu'est-ce que l'Infernal de la colère fait avec un investisseur de Lord Garett ?

Le visage du gentleman se tend au fur et à mesure de sa lecture. Bélial, semble avoir fait de l'excellent travail, son initié parait même plus furieux qu'elle.

Je ne tiens pas en place. Mes mains sont moites. Ma tête tourne dans tous les sens à l'affût d'une échappatoire, d'une solution pour éviter un futur carnage. Il y a trop de monde et Cody est du genre à avoir la langue bien pendue. Si le gentleman côtoie Bélial depuis un certain temps, je ne risque pas grand-chose à parier sur un bain de sang.

Mais elle se penche et lui chuchote à l'oreille.

— Bien, lâche-t-il, d'un ton calme.

Sa réponse attire toute mon attention. Je reste fixé sur eux, dubitatif, suspicieux.

Il dévisse le bouchon de son stylo plume et signe l'accord rédigé par l'avocat du Lord sans même sourciller. Qu'a-t-elle bien pu lui dire pour le faire renoncer si facilement à cet investissement ?

Elle pose une nouvelle main complice sur l'épaule de son initié et se relève, le regard dans ma direction.

J'ignore si l'homme connait l'identité de celle qu'il croit être son associée. Mais le document est signé et la mission s'est passée sans encombre.

— Maintenant que tout est réglé, permettez-moi de vous offrir un verre, continue le gentleman.

Cody sourit, fier d'avoir mené à bien sa mission sans dégât apparent. Il rit et gesticule comme le déchet qu'il est, se projetant déjà comme un homme d'affaire remarquable.

De mon côté, mon sang bouillonne de me savoir ici, à perdre mon temps. Je vais devoir rester en attendant qu'ils sirotent leur verre ou leur foutue tasse pendant que mon humaine dine avec Timothy Garett.

Bélial quitte la table et salue son initié. Elle se rapproche de moi et me fixe, le sourire aux lèvres.

— Ce fut un plaisir de te revoir, souffle-t-elle avant de s'éloigner.

Le plaisir n'est pas partagé. Je reste fixé sur elle, sur sa démarche sensuelle et démoniaque. Pourquoi a-t-elle convaincu l'homme de signer ? Pourquoi est-ce que j'ai cette foutue sensation de m'être fait berner ?  

Brutale RédemptionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant