La porte s'ouvre sur Monsieur-tête-de-con. Il est parti longtemps. S'il avait au moins eu l'obligeance et la délicatesse de me rendre mon foutu téléphone, j'aurai pu passer le temps.
Il balaie le salon du regard, interloqué.
— Il y a une télé, lâche-t-il, dubitatif. Et elle s'allume.
Je reste silencieuse. Je suis prise par la curiosité de le dévisager pour voir si je pourrais remarquer un détail particulier, une caractéristique physique qui le différencierait de nous, les humains. Mais je choisis de baisser la tête et de jouer avec la peau de mes ongles que je torture depuis mon réveil.
Mon ventre est encore douloureux. Moins qu'hier, certainement plus que demain. Je sais que la douleur finira par passer. On finit toujours par l'oublier sinon il n'y aurait plus aucun junkie.
— Il te restait des vêtements propres ?
Je finis par poser mes yeux sur lui. Est-ce un ton sympathique que je viens d'entendre ? Vient-il vraiment de me parler chiffon ?
Mes muscles se détendent et mon attention est toute à lui. Je ne pense pas me tromper en disant que Yury veut discuter. Il a l'air de meilleure humeur qu'hier.
Il se dirige vers la desserte pour se servir un verre. Mon regard se fait insistant, sans doute trop.
— Il est à peine 16h10.
— Je sais.
Il se serre son verre sans gêne et vient prendre place à l'autre bout du canapé.
— Sache que l'alcool n'a aucun effet sur moi. Je ne sens que cette agréable brûlure se déverser dans ma gorge. Les...
— Anges, le coupé-je avec une conviction sans faille.
Pour la première fois depuis notre rencontre, un sourire sincère étire ses lèvres.
— Qu'est-ce qui t'a fait changer d'avis ?
— Gabriel, quand il t'a rejoint sur la terrasse, hiers soir.
Il hoche la tête et boit son verre d'une traite.
— Je croyais que tu dormais, dit-il dans un souffle sans me regarder.
— ça fait quoi de...voler ?
Mon ton se veut bas comme si j'étais honteuse de croire à toute cette histoire. Mais je l'ai bien vu, cet ange en costume trois pièces rétractant ses ailes jusqu'à les faire disparaitre.
Yury se relève rapidement, le visage soudain fermé. Il se serre un deuxième verre pendant que mon cœur s'accélère. Cette sensation ne s'effacera donc jamais ? La vue de l'alcool me fait pâlir. Mes mains sont moites. Le sang quitte mes lèvres.
— Je n'en sais rien, lâche-t-il près de la desserte, le regard rivé sur le mur face à lui. Ça fait trop longtemps. Je ne m'en rappelle plus.
Le deuxième fini dans le fond de sa gorge en moins d'une seconde.
— Si j'avais des ailes, je ne serai ni à Londres ni autre part que dans le ciel. Seule, au-dessus des nuages, murmuré-je.
Je sens ses yeux noirs se poser sur moi. Un regard qui se veut insistant. Déstabilisant. Il n'est ni mauvais, ni moqueur. Il est curieux, presqu'empathique.
— Je t'ai trouvé un job, dit-il d'un ton plus enjoué.
Je n'ai pas le temps de profiter de ce revirement de comportement tant ma surprise est grande.
— Quoi ? m'égosillé-je comme une enfant.
Mes yeux brillent, mon corps tremble. Je frappe dans mes mains et m'agenouille sur le canapé.
— Et pas n'importe lequel. Un travail digne d'une Lady, alors tu n'as pas le droit à l'erreur, Volha.
Je hoche frénétiquement la tête, acceptant les moindres conditions qu'il s'apprête à m'énoncer sans même les connaitre. La simple idée de sortir de cet appartement me remplit le cœur de joie. Il vient se rassoir pendant que je me glisse jusqu'à lui, excitée.
C'est à s'y méprendre, mais je crois distinguer un deuxième sourire sincère. Un sourire qui rend ce visage encore plus beau qu'il ne l'est sous son masque froid et distant. Un sourire digne d'un Ange. Chaud, apaisant et réconfortant.
— Il va falloir apprendre à bien te tenir.
— J'apprends vite !
— Il ne faudra pas dire tout haut tout ce qui te passe par la tête. On arrête la dérision, les blagues douteuses et la vulgarité.
— Juré !
Je rabaisse ma main et porte l'autre à ma bouche en me rendant compte de mon geste.
— Désolée, il faut que je perde cette habitude, m'excusé-je en grimaçant.
Mais Yury reste de bonne humeur, il a laissé sa morosité au placard. Il n'est pas non plus le plus expressif mais il a le mérite de continuer de sourire malgré ma bourde.
Je ne veux pas gâcher ce moment en lui posant la question qui ne cesse de me tarauder. Je crois en son histoire. Aujourd'hui, je sais que les Anges existent et par conséquent, les Infernaux aussi. Ceux qu'il m'a dépeint comme des démons séduisants, tentateur et prêt à tout pour attirer les humains dans leur filet. Mais n'en reste pas moins que je ne connais toujours pas notre mission. Je veux bien travailler avec le ciel mais je veux connaitre les enjeux.
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Brutale Rédemption
ÜbernatürlichesYury est un jeune homme, élégant, chic et populaire sur les réseaux, à son insu, évidemment. Il y a les pour...et les contre. Sous ses apparences de bel étalon en costume, Yury est en réalité un Céleste qui répond au nom d'Uriel. Comme sa mission l'...