Chapitre 8: La nuit est en train de tomber. Nastasia

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            Je ne l'ai pas revu depuis quatre jours. Depuis qu'il m'a sauvé la vie pour la deuxième fois. Je n'ai toujours pas réglé mes dettes auprès de Grand Daddy mais il semblerait que l'ours mal léché a compris qu'il valait mieux ne pas s'en prendre à moi. J'ignore pourquoi, mais mon Apollon n'est jamais bien loin. C'est un peu dur à croire mais peut-être s'intéresse-t-il à moi finalement ? Comment expliquer qu'il intervienne toujours au bon moment si ce n'est pas le cas ?

Cette folle hypothèse fait battre mon cœur plus vite et plus fort. Mes joues picotent. Mon ventre fourmille. Peut-être que le jour est enfin arrivé ? Ce jour que chacun d'entre nous mérite. Ce jour où la personne qui nous est destinée débarque pour chambouler toute notre vie.

Je descends de mon bureau sur lequel je suis assise, les jambes en tailleur, face à la fenêtre. Je prends mon nouveau téléphone, celui que Dave m'a dépanné, et enfile mes écouteurs. Je positionne mes manches comme il faut. Les bras parfaitement recouverts, jusqu'aux poignets. Je prends une grande inspiration et claque ma porte, déterminée à donner un coup de pouce à ma destinée.

Je me mêle à la foule et m'active une fois de plus à sa recherche. S'il me suit, pourquoi n'aurais-je pas le droit de le faire ? Mais comme je me suis déjà fait la remarque, Londres est une satanée grande ville. Je marche sans m'arrêter et toujours aucune trace de ce beau brun. Pourtant je ne cible que les quartiers chics. Il ne peut-être que dans cette partie de la ville. Peut-être qu'il n'est pas du genre à sortir ? Je n'ai aucune chance de le trouver s'il est cloitré chez lui dans son duplex hors de prix. Hormis sa belle gueule et sa voix rauque, je ne sais rien de lui. Ni son nom, son prénom, ni quoi que ce soit d'autre d'ailleurs.

Bordel, Nastasia, à quoi tu joues ?

Je vire au ridicule.

— Bonsoir, me coupe un inconnu qui se poste devant moi.

Mes yeux s'arrondissent, mon cœur rate un battement. Une sensation pesante m'assaille des pieds à la tête.

— Bon...bonsoir, bafouillé-je en ne décrochant plus mes yeux du jeune rouquin au costume bleu marine.

Ce même homme que j'ai surpris plusieurs fois à me regarder. Celui que j'ai percuté, il y a quelques jours. Celui qui n'est jamais bien loin de moi. Cet homme est d'une beauté inégalable. Sa voix pourrait ensorceler quiconque bavarderait avec lui, mais mes tripes se retournent. La nausée me monte. Mes poumons se compriment. Mes sens sont en alerte. Je ne dois pas rester ici une minute de plus.

Mon corps me trahi. Il se tétanise et m'empêche de fuir. Il ne prend pas la peine de discuter davantage et se contente de ce silence angoissant, ses yeux perçants, sur ma posture voûtée. Sa présence est dans le seule but de m'intimider. De m'effrayer. J'avais peine à le croire toutes ces fois où je l'ai déjà croisé mais je ne vois pas d'autres raison. Il doit travailler pour Grand Daddy. Sa mission est simple. Me faire craquer et m'obliger à régler mes dettes, fissa.

Mes yeux se baladent alors sur le Grand Boulevard, à l'affût du moindre traquenard, d'un mauvais signe. Puis je croise de nouveau cette jolie femme aux cheveux châtains. A quelques mètres de nous, assise à une table, en terrasse. Elle me sourit et lève son verre dans ma direction, portant un toast à mon attention.

Mon cœur s'emballe. Il essaie de s'enfuir de ma poitrine.

— Il va être l'heure de rentrer, Nastasia, me coupe le rouquin. La nuit est en train de tomber. Il ne fait pas bon de se promener seule à cette heure-ci.

Je quitte la jeune femme du regard et tire mes manches jusqu'à recouvrir mes mains. Mes tremblements doivent passer inaperçus. Les sociopathes ou autres prédateurs ont tendance à s'exciter davantage quand ils remarquent que leur victime est terrifiée. Je ne lui offrirais pas ce plaisir.

Je parviens à recouvrer mes forces et le contourne d'un pas qui se veut tranquille. J'ai envie de hurler. De lui demander comment il connait mon nom, mais le plus important est que je m'éloigne de lui. D'elle.

Je sais qu'il s'est retourné. Je sens son regard peser sur moi.

Il n'y a plus de doute. Cet homme et cette femme sont de mèches et envoyés par Grand Daddy pour me faire craquer.

Bordel, ils sont flippants ! Je ne pensais pas mériter autant d'effort. Je ne lui dois pas une cargaison de drogue à des milliers de dollars un peu de justesse, merde.

Il va falloir que je me trouve un travail, et vite, parce que si ce n'est pas Grand Daddy ou eux qui auront ma peau, c'est mon cœur qui finira par me lâcher.

Contre toute attente, alors que je rebrousse chemin pour rentrer chez moi, mes yeux virevoltent et se baladent - sans vraiment se concentrer sur autre chose qu'une potentielle filature qui me mènerait à une mort certaine - je m'arrête et porte mon attention à l'intérieur du Queen's.

Le bar, réputé pour être le quartier général des hommes d'affaire, avocats ou procureurs et toutes autres puissances masculines en tout genre, semble abrité un dos musclé qui m'est familier. A côté de la silhouette que je croie reconnaitre, un grand métisse en costume et cravate, le crâne rasé.

Je prends mon courage à deux mains et pénètre cet antre rempli de testostérones, persuadée d'avoir reconnu mon Apollon. J'en arrive à oublier ma rencontre, pas vraiment fortuite, avec l'homme au costume bleu marine tant je suis excitée de pouvoir lui parler.

J'ajuste mes manches et m'assure que chaque partie de mes bras est bien recouverte pour ne rien laisser paraitre.

J'avance lentement tandis que mon cœur bat la chamade et que mes yeux ne se décrochent pas de mon sauveur. 

Brutale RédemptionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant