Chapitre 35: Veuillez pardonner mon retard. Yury

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Lord Garett est souriant, charmeur comme à son habitude. C'est la première fois que je suis convié à une telle soirée. Calme, élégante, sans risque d'une mort accidentelle ou meurtrière. Je ne lui ai pas vraiment laissé le choix. Après tout ce qu'il s'est passé ces derniers jours, j'ai prévenu le Lord que j'accompagnerais Nastasia à tous ces diner sans lui donner aucune raison. Le message était simplement à titre d'information et ma condition, indiscutable. Il a accepté sans rien dire. Sans poser de question. Parce que c'est comme ça qu'on fonctionne avec Barry Garett.

Nous sommes dix autour de la table. Une pancarte gracieuse et distinguée était placée à côté de chaque verre pour que les convives respectent le plan de table préalablement établi. Ce qui a réussi à me faire perdre toute ma bonne humeur lorsque nous sommes arrivés. Nastasia a dû s'installer en face de moi et le siège, toujours vide à côté d'elle, est destiné à un invité qui n'est toujours pas arrivé et qui, je l'espère fera faux bond à son très cher père.

Face à elle, je ne peux décrocher mes yeux de son visage. De son sourire. Je suis ravi de voir à quel point elle fait attention à contenir ses rires, mesurer son ton et ses paroles. Je me délecte de ce spectacle, de cette femme qui se transforme tel un papillon en devenir.

Un autre siège reste vide. La place d'un certain Monsieur Simpsons qui ne nous accompagnera pas ce soir. Lord Garett a présenté toutes ses excuses en son nom justifiant un empêchement de premier ordre. Je ne connais cet homme que de réputation, seul son nom fuite dans les plus grands magasine de business mais aucune photo n'a jamais été partagée. Et comme si mon comportement de ces derniers temps ne m'énervait pas déjà assez, je me retrouve à être agacé de ne pas savoir à quoi il peut ressembler.

Mais ma curiosité dévorante se dissipe sous les œillades intenses de mon humaine. Des regards auxquels je ne peux rester de marbre. Je suis heureux de voir que ce monde lui siée si bien. Elle ne mérite que ça. Les merveilles de la fortune. Un entourage doux et bienveillant. De magnifiques robes...

Beaucoup se plaisent à croire que les plus fortunés cachent de sombres secrets, ils se persuadent que leur gentillesse ou leur bonté ne sont que des façades érigées pour dissimuler leurs véritables intentions. Mais mon expérience sur cette terre, tous ces siècles à parcourir le monde prouvent le contraire. Il n'y a pas besoin d'argent ou de pouvoir pour être mauvais, il faut seulement une détermination sans faille et un besoin irrépréhensible à faire du mal.

Ce soir, je suis reconnaissant envers le Lord, envers chaque humain de cette table, ces personnes qui partagent ce diner avec nous, parce qu'ils remplissent petit à petit le vide béant de ma Nastasia.

— Bonsoir, veuillez pardonner mon retard !

Presque tous...

A l'écoute de cette voix, mes yeux se rivent sur ceux de mon humaine. Ma mâchoire se crispe de les voir briller. Elle le suit du regard. Elle dévisage Timothy Garett.

Il prend soin de saluer chaque convive ainsi que son père et sa mère. Il arrive près de moi et pose sa main sur mon épaule. Il fait tourner son cure dent dans sa bouche, me parle comme si nous étions de vieux amis. Nastasia me regarde enfin et je ne réponds pas au futur héritier d'EDCA. Mon regard, plus sombre maintenant, reste figé sur elle.

Il finit par prendre place à côté d'elle. Mon humaine semble gênée, presque intimidée. Mon cœur se jette contre mes côtes et me hurle qu'il était bel et bien la cause de son sourire indéfectible lorsqu'elle est rentrée de son tout premier diner. De brèves images s'insinuent dans mon esprit. Pas des flashs d'avertissements, non. Juste quelques scènes réconfortantes où je me vois lui planter son foutu cure dent dans l'un de ses yeux. Il serait beaucoup moins élégant avec un œil crevé.

Le tonnerre gronde au-dessus de nos têtes, les nuages s'épaississent et se regroupent pour amorcer l'orage. Je regarde à travers les vitres de la salle de restaurant et secoue la tête pour me ressaisir et faire comprendre au Grand patron que ce n'était qu'une fichue boutade.

— Bien ! Nous voilà tous réunis, intervient le Lord en claquant son couteau contre son verre à champagne. Je voulais profiter de ce diner pour vous partager de bonnes nouvelles.

Ses yeux se posent sur son fils, déjà trop fier, et il ne tarie pas d'éloges sur ses capacités marketing et ses idées innovantes. Mon humaine n'ose plus regarder le bel héritier arrogant mais je ne peux m'empêcher d'entendre les battements de son cœur qui battent à tout rompre depuis qu'il s'est assis près d'elle. La voix d'Asmodée me revient comme une piqûre de rappel. « Je connais tous les humains que j'aie pu influencer et Nastasia Volha fait partie de ceux qui m'ont donné le moins de fil à retordre. » Mes dents grincent, mes yeux fusillent Nastasia qui n'a pas daigné me regarder depuis l'arrivée de son foutu dandy.

— Timothy va donc siéger à mes côtés lors des prochains conseils, en espérant que vous ferez partie du jeu, termine le Lord.

Les deux vieillards qu'ils courtisaient à travers les talents joviaux de mon humaine semblent sous le charme. Ils se relèvent pour honorer le toast et accepter officiellement leur nouvelle collaboration.

Tout le monde se lève, sauf moi. Je reste assis, figé sur ma chaise pendant que l'arrogant chuchote à son oreille. Elle sourit et manque même de glousser avant de retrouver contenance et de frapper dans ses mains se calquant au rythme des applaudissements.

J'ai servi de tapisserie ce soir. Aucun flash, aucune mort accidentelle ou meurtrière à prévoir. Seulement des banalités, des mondanités et des chuchotements répétés de cet enfoiré à mon humaine qui a complètement oublié que c'est moi, son accompagnateur. 

Brutale RédemptionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant