Une geôle peu commode

5 3 3
                                    

La cité est bien gardée mais ils ne me reconnaîtront pas dans cette tenue.

Élien, lorsqu'il arrive devant les portes, n'est pas totalement confiant. L'immense rempart entourant les habitations intimident quiconque ose avoir de mauvaises intentions.

Après avoir retrouvé ses hommes, il leur a ordonné de rentrer à Sparte. De son côté, le jeune grec doit affronter son destin. Il a troqué son armure et ses armes pour une simple tenue de printemps, tout en gardant une dague au cas où la situation dégénère.

Il fait un signe de tête aux gardes postés à l'entrée pour les saluer.

Ils n'y ont vu que du feu, se réjouit-il malicieusement.

- Eh ! Toi !

Oh, merde.

Élien s'arrête.

- Retire ta capuche, demande le garde.

Le spartiate s'exécute sans discuter.

- C'est bon, tu peux partir. La capuche est prohibée à Àrgos.

Un bruit de soulagement indistinguable sort de sa bouche.

- Très bien, je ferai attention.

La cité est plutôt jolie. En effet, elle est très ancienne et constitue un pilier des plus importants au Péloponnèse.

Je ne sais même pas ce que je suis venu faire ici.

- Figues pas chères ! Allez ça part vite, il faut en profiter !

Le marché s'est installé sur l'Agora. La foule s'amasse sur les étales pour négocier les meilleurs prix.

Il n'y a pas si longtemps, papa, nous faisons la même chose à Sparte. Je te disais que je détestais ce moment, mais à vrai dire avec le recul, j'ai adoré. Le bandit que j'ai arrêté. Tout part de là !

Son cœur se resserre. Il y a quelques années, il aurait probablement pleuré. Un grand frisson lui transperce l'échine. Soudain, quelque chose lui saute aux yeux.

Qu'est-ce c'était ?

Sous l'émotion et la vitesse, son cerveau n'a eu le temps que de lui adresser une décharge d'adrénaline. Ses pupilles se rétrécissent pour distinguer au loin, parmi la foule, une personne.

Où est-ce que je t'ai vu toi ?

Les souvenirs sont tellement enfuis dans sa mémoire qu'ils semblent lui frapper le crâne lorsqu'ils refont surface.

La procession du Péplos. Ce bras...


Cléo se réveille dans sa geôle. Elle tend sa main devant son visage pour se cacher du filet de lumière intense qui vient l'éblouir parmi toute la pénombre. Un simple plateau en bois avec du pain d'orge et des olives est posé par terre. Elle se trouve sur une paillasse qui sent particulièrement mauvais.

Cela doit faire 10 ans qu'elle n'a pas été changée.

L'athénienne s'assied en tailleur et tire le plateau vers elle. Son ventre gargouille à peine la nourriture en main. En quelques crocs, plus rien ne reste mais son estomac, lui, ne semble guère rassasié. Son objectif, un instant perdu de vue, refait surface.

Élien. J'ai échoué.

Des bruits de pas viennent perturber son apitoiement. Des cliquetis résonnent dans tout le bâtiment en pierre. Rien qu'avec l'écho, Cléo peut déterminer que celui-ci est énorme. Un garde s'arrête devant la porte en bois et tire la visière pour observer la prisonnière.

Kairos, Le Moment OpportunOù les histoires vivent. Découvrez maintenant