Le langoureux baisé est interrompu par un vacarme assourdissant. Les deux portes du temple ont été balayé d'un coup sec.
- Élien ! Viens là, malaka !
Léandros sort du contrejour en traînant du pied. Son séjour à Argos semble avoir été assez sympa. Un bandeau blanc , contenant du cataplasme, est enroulé autour de sa boîte crânienne. Une dizaine d'hoplites débarquent à ses côtés.
Ça fait beaucoup là. Des soldats d'élites en plus, réfléchit Élien.
Le spartiate regarde autour de lui mais Cléo a disparu.
Elle est passée où celle-là ?
- Où-est elle ? Je sais qu'elle est ici.
Une haine viscérale se dégage à chaque lettre envoyées. Une confiance inhabituelle dans sa démarche est notable, surtout qu'il arbore un sourire terrifiant.
Ne me dis pas que... Ses yeux. Quel idiot !
Une lueur rouge intense miroite dans ses iris. Un léger filet de bave coule le long des commissures de ses lèvres. Les athéniens ne sont plus qu'à cinq mètres et finissent par s'arrêter, en demi-cercle.
- Qu'as-tu fait Léandros ?
- Pff, rien de tout à fait hors-normes. Comme tu le sais probablement, nous avons déjà passé plusieurs accords avec Arès. Un autre en plus ne fait pas de mal...
Ses paroles toujours aussi horribles semblent cracher du venin. Cette fois, ça y est. Son avidité a pris sur lui, sur sa personne. Léandros n'est plus, Haine est.
- Où-est elle ? Demande-t-il avec insistance.
- Qui ?
- Tu sais qui. Arès m'a confié qu'elle est ici, avec nous, ajoute-t-il en haussant la voix pour se faire entendre dans tout le temple.
Élien ricane légèrement.
- Maintenant, parle ou meurs.
- Tu es devenu bavard, dis donc.
- Malaka ! Attrapez-le ! Vivant !
Un garde est resté en arrière pour garder la sortie. Les neufs autres encerclent Élien. Hélas, il n'a plus la même colère qu'autrefois. Il semble qu'Arès ait arrêté de le soutenir. Cela aurait été dérangeant si l'Amycléens n'avait pas du sang divin dans ses veines.
- Hélios, entends-moi. Montre moi ta force, murmure-t-il.
- Qu'est-ce que tu baragouines ? Demande Léandros.
Alors que les gardes ont complètement encerlé le grec et qu'ils resserent leur emprise, un éclat lumineux explose du soleil sur l'armure d'Élien. Une telle déflagration solaire brûla instantanément les quatres hommes les plus proches. Les cinq autres sont tellement aveuglés et abasourdis qu'ils s'effondrent sur le sol. Léandros, resté en arrière, retire sa main de son visage.
- Qui es-tu, mortel ?
Ce n'est plus sa voix mais celle d'Arès qui résonne dans la pièce.
- Celui qui va venir te botter les fesses, malaka.
Un cri guttural inhumain s'évade du corps du stratège. Léandros, bien que la haine l'aveugle toujours , semble avoir repris un peu plus contrôle de son organisme. Élien n'attend pas et enfonce sa lance dans le thorax d'un athénien au sol. D'ailleurs, la pointe s'enfonce avec une telle aisance dans le plastron en bronze qu'il en est déstabilisé. L'homme crache du sang tout en se contractant violemment. Les trois derniers se relèvent et foncent sur Élien. Cependant, instinctivement, il tend sa paume vers le braséro et envoie le feu dans leur direction. Deux d'entre eux sont carbonisés instantanément tant la température des flammes a augmenté. Le dernier des soldats hésitent en voyant ses camarades, ou plutôt ce qu'il en reste. Cela suffit à Élien pour lui envoyer sa lance entre les deux yeux.
- Garde ! Quitte la porte et vient ici, ordonne Léandros.
Personne ne répond. En effet, il a eu l'intelligence de détaler avant d'être réduit en cendres comme ses collègues.
- Il faut tout faire sois-même.
- Si c'est moi que tu veux, viens me chercher.
Léandros se tourne. Cléo se tient en armure. La maligne s'est faufilée le long du mur et a profité de la confusion générale pour aller rendre visite à leur cheval.
- Tu es toujours aussi magnifique, Cléo. J'ai des projets pour toi, pour moi ! Ensemble, la Grèce sera à nos pieds !
- Tes promesses ne valent rien. Tu as juré sur ton honneur pour servir Athènes et pourtant tu n'as protégé que tes propres intérêts.
- Roooh, l'autre chien de spartiate t'as corrompu l'esprit, semble-t-il. Il te manipule.
- Culotté, répond Élien.
- Je vais te faire regretter tes paroles.
Léandros se rue sur lui en tendant sa lance en avant. Élien effectue un pas de côté pour esquiver la charge et contourne l'agresseur pour rejoindre sa bien-aimée.
- Plutôt sympa tes tours de magie, commente l'athénienne.
- T'as vu...
Il n'a pas fini sa phrase que Léandros projette sa lance, la rage ayant remplacer la raison, sur son ennemi. Le lancé est puissant et juste mais Élien pare le choc avec son bouclier. Le stratège ramasse la lance et l'écu d'un des macchabées puis sonde ses rivaux. Cléo attaque par la gauche tandis qu'Élien s'occupe de la droite. Malheureusement, Léandros est rapide et décide de tout miser sur un côté : celui de Cléo. Plusieurs coups de lances des deux côtés sont donnés mais rien ne fait mouche. Le nouveau serviteur d'Arès donne un puissant coup de pied dans le bouclier de l'Amazone pour la projeter sur une colonne. Élien arrive alors par derrière mais il fait volte-face avec une rapidité inhumaine. La pointe de la lance se fige dans le plastron du spartiate mais ne le transperce pas.
Cela fait longtemps que quelqu'un ne m'avait pas aussi fortement touché.
Élien repousse sur le côté l'arme de son ennemi et envoie un coup d'estoc dans l'épaule découverte de son ennemi. Il tranche un tendon et une partie du deltoïde. Un cri violent sort de sa bouche mais ce n'est pas à cause de la douleur. C'est seulement un cri de colère. Léandros effectue un moulinet avec sa dori et frappe Élien sous le menton avec l'arrière du manche. Le choc est effroyable. Élien est sonné et prend quelques centièmes de secondes de trop à réaliser qu'une pointe en métal se dirige droit vers son visage. Un courant électrique lui parcourt l'échine et déclenche un réflexe surhumain. Sa tête se penche de quelques centimètres de côté, suffisamment pour que la lance vienne érafler son casque. Le bruit, strident, réveille Élien qui réalise que son cimier a perdu quelques ficelles rouges.
C'était moins une.
Une vingtaine de gardes de Delphes entrent dans le temple à ce moment-là. Léandros alors, stupéfait, hésite. Élien en profite alors pour lui donner un puissant coup d'épaule. Le stratège est violemment envoyé sur Cléo qui lui enfonce sa lance dans le dos. Cette-fois ci, la douleur ne l'épargne pas.
- Arès, sors moi d'ici.
- Cléo ! Achève le !
La femme, n'arrivant pas à sortir sa dori, dégaine son épée et vise le coup de Léandros. Son coup part tout comme Élien qui arme sa pointe vers le ventre de son adversaire. Hélas, au tout dernier moment, la présence ténébreuse de toute à l'heure refait surface et happe le blessé de toute part. En un clin d'oeil, Élien et Cléo se retrouvent seul, avec les gardes de Delphes.
- Ce malaka, crie Élien.
Malheureusement, le temps presse car les soldats qui les entourent sont à deux doigts d'exécuter les assassins de la Phytie ! Élien serre Cléo de son bras gauche contre lui puis claque des doigts. Un éclair lumineux puissant mais non létal éclate. Lorsque les hoplites cessent enfin de se plaindre de leur cécité, le duo a disparu, pour de bon.
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Kairos, Le Moment Opportun
Ficción históricaDans le monde grec, la guerre gronde et le destin appelle ses héros. Entre mythologie et réalité, le jeune Élien d'Amyclées va devoir tracer son chemin parmi d'obscurs événements. Quel rôle va jouer Cléo, une jeune aristocrate athénienne en quête d'...