L'aube de la délivrance

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- Galope, Astrapè !

Le cheval s'en va à toute allure. Les passants, qui pensaient pouvoir effectuer un pèlerinage tranquille, doivent se jeter sur le côté pour esquiver l'équidé lancé à pleine vitesse.

- Il ne pourra pas tenir longtemps avec nous deux et nos sacs sur le dos ! Crie Cléo.

- Tant pis, le but est de s'éloigner un maximum de n'importe quel être humain. Chaque témoin est un danger pour nous.

La jeune femme acquiesce et encourage une nouvelle fois la monture à accélérer.

Un peu plus tard

- Pas mal, l'idée du bateau.

- Je sais, merci. En une heure nous sommes déjà au Péloponnèse ! Dit Élien fièrement en posant ses mains sur ses hanches.

Cléo le regarde, dépitée, avec l'entièreté du contenu de l'estomac du cheval sur ses habits.

- Tu devrais te laver, tu as une drôle d'odeur, s'exclame Élien en se pinçant le nez.

- Ouvre encore une fois ta bouche et je te ferai manger le fumier d'Astrapè, ajoute Cléo avec un ton sérieux.

- Ouuh.

Après un rinçage nécessaire, le duo repart pour Sparte. Ils ont besoin de se préparer pour affronter Arès, sauf s'il en décide autrement, bien sûr. En ce qu'ils les concernent, l'accueil à la cité des Lacédémoniens est plutôt lugubre. La plupart des citoyens, le moral dans les chaussettes, traînent des pieds, sans un mot. Denys se trouve à l'olivier où Anaximène et Élien aimaient se retrouver. Celui où leurs victuailles "empruntées" étaient dégustées. Lui aussi, tire la gueule.

- Qu'est-ce qu'il se passe ici ? Tout le monde est triste. Je suis de retour, mon vieux !

Denys se lève lentement en grognant. Il s'avance rapidement vers son ami et le repousse violement.

- Où étais-tu ? Sparte a besoin de toi ! Tes hommes ont besoin de toi ! J'ai besoin de toi !

- Hein ?

- Athènes prend de l'ampleur. Leur puissance est désormais menaçante.

- J'ai eu beaucoup à faire mon ami. Je t'expliquerai plus tard, avant dis moi tout.

Sans un mot, Denys dépasse Élien et se dirige vers les habitations. L'Amycléens et Cléo le suivent de près, également en silence. L'activité humaine aux alentours battent leur plein. À vrai, dire plus que d'habitude mais Élien ne remarque rien.

- Alors ? S'impatiente-t-il.

Denys s'arrête et se tourne vers lui en tendant les bras autour de lui. Il bouillonne d'énergie, celle du désespoir, de la peur.

- N'entends-tu pas les forgerons forger les lances et les épées ? N'entends-tu pas les tanneurs tanner le cuir pour préparer les linothorax ? N'entends-tu pas les prêtres prier ardemment les dieux ? N'entends-tu pas les femmes et les enfants pleurer pendant que les hommes contemplent leurs champs ? Regarde autour de toi, Élien. La guerre gronde comme le tonnerre de Zeus tonne lors d'un été humide. Le fils de la Nuit et des Ténèbres vient chercher les âmes des mortels, Thanatos est impitoyable et inélucable, Élien ! Que les mortels aient peur, qu'ils fuient la mort car elle, elle viendra les chercher dans leur foyer.

Élien reste silencieux. Sa mâchoire mordille un aliment invisible tant les mots ont été dur.

Comment ai-je pu être aussi dupe ?

Il contemple les artisans, les femmes, les enfants, les commerçants, les hoplites en fonction. Cette guerre n'est pas comme les autres, ça se sent. Mais pourquoi ?

Kairos, Le Moment OpportunOù les histoires vivent. Découvrez maintenant