CHAPITRE 16 - Ciaràn

111 12 6
                                    

Je l'ai vue.

Je savais qu'elle nous regardait depuis son arrivée derrière la boîte. Et je n'ai volontairement pas réagi.

Je voulais qu'elle capte ce qu'est la vraie vie.

Ce qu'est une vraie femme.

Ce que c'est que de baiser comme il se doit.

Ah, Iris...

Étrangement, cette jeune femme m'intrigue. Je sens qu'elle cache quelque chose sous sa carapace de pucelle coincée. Or, elle semble me suivre à la trace, et d'un côté, ça me gonfle.

Qu'attend-elle de moi, si ce n'est pas du sexe ?

S'attend-elle à ce que je sois son prince charmant ?

Celui qui lui mijotera de bons petits plats et qui lui apportera le petit déjeuner au lit ?

Celui qui lui écoutera ses péripéties au travail, et qui sera là pour sécher ses larmes ?

Celui qui devra la défendre quand elle se fera emmerder par un autre type ?

Et surtout, et ça c'est le clou du spectacle pour moi, je devrais être l'amant parfait, qui lui ferait l'amour langoureusement et qui m'attarderait à lui donner du plaisir chaque semaine.

Laisse-moi rire cinq minutes, Iris.

J'ai une gueule de prince charmant ?

Non.

Je suis le méchant de l'histoire, et ça, tout le monde le sait.

Je suis un monstre.

J'en suis pleinement conscient.

Et le pire, c'est que j'adore l'être. Je ne changerais pour rien au monde, et surtout pas pour une chatte, aussi docile soit-elle.

***

Je suis confortablement assis sur un siège, dans un coin de la boîte. J'aurais bien aimé aller danser un peu, mais il y a trop de monde. Je n'aime pas ça. Tout le monde se bouscule, se fait des croche-pattes accidentels, se gueule dessus pour avoir cinq centimètres de plus...

Pauvres êtres humains.

C'en devient affligeant.

— EH ! CIARÁN ! M'interpelle Elior.

— Ah, salut.

— Comment ça "salut" ? Répète-t-il en faisant de grands gestes. Mec, t'as disparu depuis deux heures !!!

— Et alors ? Où est le problème ?

— On s'est inquiété, putain !

— Va chier, Elior. T'es pas mon père, que j'sache.

— Heureusement, sinon je t'aurais déjà flanqué une rouste, m'annonce-t-il, sur un ton faussement comique.

Mes lèvres s'étirent en imaginant cette scène : Elior, me flanquer une fessée. Là, on aura vraiment tout vu et on pourra crever en paix. Je ramène un énième verre à mes lèvres. Le liquide ne brûle même plus mon œsophage, je suis comme anesthésié.

— ALLEZ ! PLUS QUE CINQ MINUTES ENSEMBLE, CE SOIR ! CINQ MINUTES ! FINISSEZ VOS VERRES, REMETTEZ VOS FRINGUES, ET ALLEZ VOUS COUCHER ! ON SE RETROUVERA BIENTÔT MES AMIS !!! PROFITEZ DE VOS DERNIÈRES GORGÉES ! Brame le Deejay au microphone.

— Bon... Allez ! M'exclamé-je pour me donner du courage.

J'ai tellement donné de mon corps tout à l'heure que mes jambes me semblent plus lourdes, contrairement à mes couilles, qui sont plus légères que jamais et qui doivent ressembler à deux pruneaux séchés à l'heure actuelle.

LA MORSURE DU DESTINOù les histoires vivent. Découvrez maintenant