LA MORSURE DU DESTIN

CHAPITRE 35 - Iris

Ça fait plusieurs jours que je n'ai pas de nouvelles de Ciarán.

Après tout, je n'ai pas cherché à le recontacter. Surtout après notre dernière entrevue, durant laquelle il a essayé de me violer, puis a fini par me confier qu'il était également une victime de viol...

Plus paradoxal, tu meurs.

Bon.

Après tout, en tant que future étudiante en Fac de psycho, je peux décemment dire que c'est simplement une relation de cause à effet.

La victime devient bourreau.

Un schéma plutôt classique.

Mais un comportement qui reste inexcusable.

Pourtant, je ne cesse de me dire que lorsque sa fureur prend les commandes, il n'est plus vraiment conscient.

Je ne sais pas vraiment si je tente de lui trouver des excuses ou si mes opinions sont fondées, mais je m'en fiche éperdument. Le fait est que, dans ces moments-là, il n'est plus lui-même.

Au fil du temps, j'imagine que Ciarán est devenu l'ombre de lui-même, au point de se laisser engouffrer dans sa propre perversité. Cela explique pourquoi, quand il est excité, j'ai l'impression d'être avec une personne différente. Il a tellement baigné dans la violence, qu'il devient violent à son tour et est tout bonnement incapable de se contrôler.

Il a besoin d'aide.

Et d'une aide lourde.

Et pourtant...

Malgré tout ce qu'il a pu me faire subir, je crois que j'ai des sentiments pour cet homme. Peut-être parce que je sens, tout au fond de moi et depuis toujours, que nos âmes communiquent. Que nous avons besoin l'un de l'autre pour vaincre nos démons respectifs. Et depuis le premier soir. Lorsqu'il a plongé son regard dans le mien, cette nuit-là, dans les toilettes de la discothèque, j'ai su. J'ai su qu'il allait jouer un rôle important dans ma vie, et que j'allais jouer un rôle important dans la sienne. Or, une question reste en suspens...

Ciarán...

Si seulement je pouvais t'aider...

Après notre entrevue, ce soir-là, je suis partie comme une voleuse. J'ai pris peur.

J'ai eu peur de voir mon passé me revenir en pleine face, celui que je m'étais efforcée d'enfouir au plus profond de mon cerveau pour pouvoir vivre ma vie pleinement sans être hantée par lui. Seulement, je crois que Ciarán a fait ressortir mes démons, et je ne peux définitivement pas rester comme ça. Il a réveillé mes traumatismes.

Il faut que je lui parle...

Je ne sais pas comment ça va tourner, et je m'en contre-fiche. J'ai besoin de le voir, et je suis intimement convaincue que de son côté, c'est la même chose. Nos âmes sont comme en harmonie. Je le sens.

Je décide alors de lui envoyer un SMS mûrement réfléchi.

Moi (texto) : Chez moi, 15 Boulevard Albert Camus. A 21h.

Ciaràn (texto) : Non. 

 — Quelle tête de mule... Marmonné-je dans ma barbe.

Il m'a répondu.

C'est déjà ça.

Je réfléchis quelques minutes, ne sachant pas comment le motiver. Puis, la réponse tombe sous le sens. Je lui ouvre mon cœur.

Moi (texto) : Je t'en supplie... J'ai besoin de toi, Ciaràn.

Ciaràn (texto) : Je ne peux pas, Iris. Je ne veux pas te faire de mal. Et si je viens, je risque de te faire souffrir... Encore.