Plusieurs minutes plus tard, nous sommes assis là, dans la pénombre. La fraîcheur et le silence nous entourent.
Mon corps se détend peu à peu, en sachant qu'il ne me fait plus de mal. Je suis assise à plus de deux mètres de lui, les jambes recroquevillées contre ma poitrine, de peur qu'il ne me saute encore une fois dessus. Je me protège, juste au cas où.
Aucun d'entre nous ne semble décidé à parler. Il faudra pourtant bien que l'un d'entre nous se lance, sinon, nous risquons de dormir à la belle étoile.
Je regarde ma montre : il est déjà minuit.
— Ciarán...? L'interpellé-je.
Il ne répond pas.
Son regard est plongé dans le vide. Pourtant, c'est moi qui devrais être en position de faiblesse ou de rébellion. Or, j'ai l'impression de devoir jouer les psychologues avec mon propre violeur, n'ayons pas peur des mots.
Génial pour un début de carrière, non ?
— Parle-moi, je t'en supplie...
— Tu devrais partir en courant, me conseille-t-il, sèchement. Maintenant. Dégage de là. Sauve-toi.
Ses mots m'assaillent. Ils sont forts, trop lourds de sens.
— Hors de question, rétorqué-je.
— Tu devrais. Pour ta santé mentale.
— Je me fiche de ma santé mentale, sache-le.
— Pourquoi ça ?
— Parce que je t...
Il se tourne vers moi et me lance un regard interrogateur. Mais je me rétracte automatiquement.
Comment ai-je pu songer à dire cela ?
D'ailleurs, est-ce que je le ressens réellement ou est-ce que je suis en train de développer un syndrome de Stockholm pervers et malsain ?
Mieux vaut ne pas penser à ça.
— Non, rien, me résulté-je à dire.
— Si tu ne veux pas te sauver, c'est moi qui vais te sauver, m'annonce-t-il.
Qu'est-ce que ça veut dire ?
Ciarán se relève rapidement et s'apprête à partir. Mais je le rattrape rapidement par le bras. Il esquive violemment, manquant de me faire tomber.
— ARRÊTE !
Je lève automatiquement les mains en l'air comme s'il pointait une arme sur moi. J'ai déjà oublié. Décidément, je n'apprends rien de mes erreurs.
Pourtant, le simple fait de le toucher m'a sauvé la vie, quelques minutes plus tôt...
Rien que ça...
— Pardon... Pardon...
Qu'est-ce qui le bloque à ce point ?
— Ciarán... Pourquoi tu...?
— Tu veux vraiment savoir, hein ?! Tu veux que j'te raconte tout ?! M'agresse-t-il.
— Oui ! M'exclamé-je. Je pensais que c'était assez clair !
— On ne t'a jamais dit que t'avais la curiosité mal placée ? Me provoque-t-il.
— Je m'en fiche. Je veux savoir.
— Non.
— Si.
— NON.
— SI.
Il sourit.
Pourquoi est-ce qu'il sourit ?
Est-ce que cette situation l'amuse ?
Parce que moi, pas du tout.
— Alors sois prête à plonger dans les ténèbres de ma chienne de vie, m'annonce-t-il comme un générique de film. Mets ta ceinture, car le choc va être terrible !
Sur ces mots, il se rassoit dans l'herbe fraîche, et je m'assois à ses côtés. Assez près pour l'écouter, assez loin pour l'empêcher de m'étrangler. C'est alors qu'il me laisse plonger dans son monde...
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LA MORSURE DU DESTIN
RomanceIris est une jeune femme modèle de dix-huit ans : bonne élève, serviable, équilibrée. Elle a tout pour plaire, et son intelligence la destine à un avenir prometteur. Pour Ciaràn, vingt-cinq ans, la vie n'est qu'un vaste terrain de jeu macabre. Il e...