LE MOIS DU VIDE

15 - VALDEMAR

Sous le regard de Valdemar Sternheart, True Faith entra tranquillement dans l'infirmerie au milieu du chaos que sa disparition avait causé.

Le personnel de la base était si paniqué qu'ils en étaient presque à retourner les meubles pour voir si l'héritier ne s'était pas perdu dessous. Avant que Sternheart ne soit appelé à la rescousse, pas une personne n'avait pensé à vérifier les enregistrements des caméras qui surveillaient une bonne partie du bâtiment.

Finalement, un de ses agents, vint lui glisser à l'oreille :

— Le Conseiller Faith était dans la grande halle, monsieur le Ministre.

L'homme fronça sévèrement les sourcils.

— Qu'y faisait-il ? demanda-t-il à voix basse.

— Il a rejoint une femme sur la mezzanine.

Sternheart, intrigué, leva un de ses sourcils fins et noir.

— Cette femme est-elle connue de nos services ?

— Son signalement concorderait avec celui de l'Aijiro qui s'était introduite dans le Quartier Administratif. Celle qui avait échappé aux Gardes Républicains.

— Où est-elle désormais ?

— Elle nous a échappé... aussi, avoua l'homme, gêné. Nous avons regardé les enregistrements mais son entrée et sa sortie dans la base restent intraçables.

Sternheart grogna audiblement sans que l'expression de son visage ne change.

— Une fois que nous serons de retour à la capitale, déclara-t-il, je veux voir ces images.

L'agent hocha la tête et se retira pour laisser place à True Faith et son sourire charmant à toute épreuve que Sternheart détestait.

— Où étiez-vous ? lui demanda le Ministre.

— Je suis allée me dégourdir les jambes, répondit candidement l'homme blond. J'ai toujours trouvé l'atmosphère sur cette île oppressante. Lorsque je reste trop longtemps sur place, j'ai l'impression qu'elle essaye de m'étouffer.

— Vous deviez rester dans le bureau du Général, lui rappela Sternheart dont l'agacement créait un rictus aux coins des lèvres. Vous avez affolé tout le personnel avec votre escapade.

Comme réponse, True décida de sourire à tous les médecins, infirmières, soldats et fonctionnaires qui les entouraient. Au grand dam de Sternheart, ils lui sourirent tous en retour sans même qu'un quelconque protocole les y oblige.

— Je suis désolée, s'excusa True en leur servant encore un peu plus de ce charme inné que Valdemar trouvait grotesque. L'héritier Faith se tourna vers le Ministre et lui glissa : peut-être que si vous m'aviez laissé en compagnie d'un babysitter plus loquace, je ne me serais pas ennuyé au point de vouloir lui échapper par toutes les manières possibles et imaginables.

Sternheart ne pouvait pas soutenir ce visage radieux trop longtemps, il détourna le regard, se râcla la gorge et demanda à True :

— Que puis-je faire pour rendre votre attente moins ennuyeuse, Conseiller Faith ?

— Il y a bien quelque chose, finit par dire True après une réflexion que Sternheart devina être fausse.

Cela n'empêcha pas le Ministre de se crisper subtilement, trahissant un haut signe d'énervement que peu de personnes arrivaient à causer chez lui. Mais cet héritier flamboyant en était capable, à chaque fois.

— Dîtes-moi, l'encouragea Sternheart à contrecœur.

— Le défunt Guide m'avait parlé d'une employée de cuisine aijiro particulièrement talentueuse. Elle doit se trouver dans une de vos prisons, j'aimerais l'employer chez moi.