18 - SORA

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Plus la nouvelle lune s'assombrissait, plus elle déchaînait une marée de folie dans le corps de Sora.

Une marée qu'il n'avait d'autre choix que de contenir et, pour la contenir, il devait être plus fort qu'elle. Plus fort que chaque mouvement qu'elle poussait contre les parois de son abdomen, contre les parois de son crâne ; plus fort que les pensées qu'elle draguait dans son esprit.

L'homme n'avait d'autre choix que de se procurer le seul remède contre cette attraction fatale : l'Aether. Il devait en être rempli comme une bouteille débordante et il devait veiller à ne pas en perdre une goutte au risque d'être saoul de son absence.

Cette lune, ne lui en laissait pas le choix.

Sora marchait flegmatiquement à travers la foule qui elle-même marchait à travers la brume bleue. En soirée, le Quartier Ouvert était toujours bondé ; mais, un soir de concert des Nal-Ari, il était assailli principalement de visiteurs valtais. Caché sous le voile scintillant de son chapeau, l'homme, ne laissait que ses lèvres paraître. Il n'avait qu'un seul but, rejoindre la Lanterne Blanche et obtenir sa dose d'Aether. Il ne pouvait presque plus se rappeler d'un temps où cela n'était pas sa seconde préoccupation. Cette seconde préoccupation rendait le fait qu'il n'arrivait pas à satisfaire sa première préoccupation plus supportable.

A la vue des lanternes lumineuses qui dansaient à travers l'épais brouillard, ses muscles se décrispèrent. Il sourit, presque, tant il était avide ce soir-là.

Mais, ses muscles se crispèrent à nouveau à la vue d'une personne qui venait de sortir de chez l'apothicaire Kurage. La femme en question était en train de traverser la route principale en regardant sa main. Elle regardait sa propre main fixement, comme si elle venait de découvrir qu'elle en avait une. En ignorant toute autre réalité, dont les voitures qui se frayaient dangereusement un chemin à travers les passants dont elle faisait partie.

Avant qu'un drame n'arrive, Sora attrapa la femme par cette main qui obnubilait sa propriétaire. Il la tira vers lui, l'écartant du sillage des véhicules prêts à la renverser.

La femme leva ses grands yeux noisettes vers les lèvres de Sora. À peine entrouvertes, elles trahissaient sa stupéfaction d'être à nouveau nez à nez avec la fonctionnaire qui lui avait foncé dessus la vieille à la Lanterne Blanche.

— Vous ? s'étonna la femme ayant clairement reconnu la moitié de visage qui la surplombait. Que me voulez-vous ?

— Vous alliez vous faire écraser.

Elle regarda autour d'eux le flot ininterrompu de gens et de véhicules. Son regard s'adoucit légèrement et ses joues rosirent carrément lorsqu'elle reposa ses yeux sur Sora.

— Comment avez-vous survécu aussi longtemps en ne regardant jamais vraiment devant vous ? lui demanda-t-il.

— Venant de quelqu'un qui voit le monde à travers un voile, je pourrais vous poser à peu près la même question.

Un sourire apparut au coin des lèvres sombres de l'homme.

— Contrairement à vous, et bien malheureusement pour moi, lui avoua-t-il, je ne peux pas mourir si facilement.

Il vit une ombre passé sur le visage de la femme, il eut soudain peur qu'elle ait compris ce qu'il insinuait. Étonné par ses étranges aveux, il décida de changer de sujet, ce qui ne fut pas difficile lorsqu'il vit les vêtements que portait la fonctionnaire. Elle était habillée de la tête au pull en merchandising des Nal-Ari.

— C'est votre panoplie de pervers ? lui demanda-t-il sarcastiquement avec un léger sourire crispé au coin des lèvres.

Elle rit amèrement.

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