Chapitre 188 : 1980 : C'est une fille !

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Chapitre 188 : 1980 : C'est une fille !


Enfin, Chrysoline revint dans la chambre, seule.

– Votre mère ne devrait plus tarder, dit-elle. Elle prend le temps de se déguiser. Voyez ce que vous lui imposez.
– Les enfants ne devraient pas imposer ce genre de choses, approuva Mona avant de hurler de nouveau.
– C'est normal qu'elle souffre autant ? demanda Rogue.
– Peut-être pas, admit Chrysoline. Je devrais vérifier que tout se passe bien.

À nouveau, elle regarda entre les jambes de Mona.

– Effectivement, dit Chrysoline. Ça commence.
– Comment ça, ça commence ? demanda Mona horrifiée.
– On se détend, on pousse et on relâche. Ensuite, on pousse de nouveau et on relâche.
– Pousser, relâcher, pousser, relâcher, répéta Mona.
– C'est quand vous voulez, dit Chrysoline.
– Je pousse quoi ? hurla Mona.

J'aurais bien fait une blague nulle, mais ce n'est pas très approprié.

– Le bébé, dit Chrysoline.
– Je n'ai jamais accouché, comment je fais pour savoir comment il faut pousser ?
– Vas-y à l'instinct, suggéra Rogue. Le mécanisme devrait se mettre en place tout seul.

Mona le regarda en acquiesçant rapidement. Puis elle... poussa.
OK, stop. C'est au-dessus de mes forces. Vu que ça se passe plutôt bien, je propose qu'on en vienne à la chose hurlante. De toute façon, on sait comment ça se passe, Mona va pousser, arracher la main de Rogue et le bébé va naître.

Quelques courtes minutes plus tard, Chrysoline ressortit de l'entre-jambes de Mona en tenant une petite chose dégoulinante.

– C'est une fille, dit Chrysoline.
– Une fille, répéta Mona en sueur.

À présent que Mona ne criait plus, c'était la nouvelle Moon qui se chargeait de brailler.

– En tout cas, elle a la puissance de voix de sa mère, souligna Rogue d'une voix serrée.

Mona rit doucement et regarda Chrysoline emmener l'enfant à l'écart. Elle le nettoya rapidement et le souleva avec sa baguette magique avant de le reposer sur la table de travail. Encore quelques secondes de notes griffonnées à la va-vite et Chrysoline revint déposer le bébé dans les bras de sa mère.

– Je vous laisse, dit Chrysoline. Pensez à vous coucher. Mettez simplement l'enfant dans le berceau. On reviendra s'occuper de vous. Pensez à son prénom également.

Elle sortit de la pièce, où trois personnes respiraient à présent.

– Une fille, dit Rogue. Ce n'est pas plus mal.
– Ah ? dit Mona.
– C'est très bien, dit-il.

Mona acquiesça sans comprendre vraiment ce que Rogue voulait lui faire comprendre.
Ben oui, la prophétie parle d'un « celui ». Un peu sexiste quand même.

– Tu as choisi son prénom ?
– On verra ça demain, dit Mona. Pour le moment, je ferais mieux de me coucher, je devrais partir tôt demain. Tu la mets dans le berceau ?

Rogue regarda Mona, l'air horrifié. Pourtant, lentement, il tendit les bras vers l'enfant.

Avec peine, il parvint à prendre le bébé dans ses bras et à la reposer dans le berceau.

– C'est bon comme ça ? demanda Rogue.
– Parfait, répondit Mona. Tu me la rapportes.

Il acquiesça et traîna le berceau jusqu'à elle. Mona se renfonça dans ses draps et se tourna vers sa fille. À travers la fenêtre, la lune particulièrement lumineuse tombait sur le petit corps endormi du bébé.

– Une vraie fille de la lune, commenta Mona Moon en s'endormant.

Jour 5

Mona ouvrit lentement les yeux, les refermant presque aussitôt, aveuglée par la lumière du jour. Elle avait aperçu une chose, une chose qui ne lui convenait pas. Son cerveau s'activa lentement, émergeant doucement de l'obscurité du sommeil. Son bébé, sa petite fille, c'était elle que Mona avait vue. La nouvelle-née était portée et bercée dans des bras... oui, voilà, c'était ça.
Mona dut faire de sérieux efforts de concentration. Magda ! C'était sa propre mère qui tenait sa fille dans ses bras. D'un coup, Mona ouvrit les yeux, devenus subitement insensibles à la puissance du soleil.

– Qu'est-ce que tu fais là ? agressa presque Mona.
– J'admire ma petite-fille, répondit Magda d'une voix douce, qu'elle n'employait que lorsque l'un de ses enfants était malade.
– Tu n'es pas déguisée ? s'étonna Mona en se mettant sur le bord du lit.
– Si, ton père a réussi à me bricoler un chapeau hier soir.

Mona s'approcha lentement et regarda son bébé après avoir jeté un coup d'œil au chapeau pointu posé négligemment sur un siège.

– Tu me la passes ? demanda-t-elle, priant intérieurement pour que sa mère ne la prive pas de sa fille.

Elle veut récupérer son jouet.

– Assieds-toi d'abord, ordonna Magda.

Elle avait retrouvé sa voix dure habituelle. Mona retourna aussitôt sur son lit et regarda sa mère poser doucement le bébé endormi entre ses bras.

– Elle n'a pas arrêté de brailler toute la nuit, dit Magda.
– Je ne l'ai pas entendue, répondit Mona. Elle dormait à côté de moi pourtant.
– Je l'ai emmenée dehors pour que tu dormes. Nous devons repartir d'ici avant que quelqu'un ne découvre que tu es ici.

Mona regarda autour d'elle et vit que son sac de voyage, qu'elle se souvenait pourtant avoir défait, l'attendait soigneusement auprès de la porte.

– Qui est Rosaire Bouquet ? demanda subitement Magda.
– C'est Grace, répondit Mona. On s'est dit que si elle arrivait déguisée en homme, nous attirerions moins l'attention.
– Judicieux, accorda Magda. Vous auriez peut-être dû penser à vos faux noms par la même occasion.
– On a improvisé, dit Mona.
– Je me doute. Je vais reprendre la petite, lève-toi et habille-toi. Nous partons.

Mona se leva sans broncher après avoir rendu la petite aux bras de sa grand-mère. 

Un jour, Mona Moon sera une rebelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant