La Favela du Crime - Tome 1

40

Partie 40

J'ai défaits mon chignon, et mes cheveux volent au vent, emporté par de fraîches bourrasques . Ni Cassio ni moi ne parlons, mais cet étrange sourire candide barre mon visage et je ne peux m'empêcher de lui lancer un regard discret. Après dix minutes de route environ, il finit par garer la voiture dans une large allée animée. Les regards des passants se retournent sur la voiture luxueuse et je ne peux m'empêcher de ressentir un petit malaise. Je m'apprête à faire remarquer à Cassio combien c'est peu brillant de laisser un tel bijou sous des yeux envieux, mais me désiste en m'assurant que personne de sensée ne voudrait avoir à faire avec Cassio. D'ailleurs, il le fait bien comprendre en lançant un regard dominant et froid sur l'assemblée.

Face à nous se dresse une petite échoppe bien bâtie et dont les murs sont peint d'une multitude de couleurs explosives. Une chanson de Beth Carvalho atteint mes oreilles, et je me décide enfin à traverser le petit rideau de perle brune qui sert de porte. A l'intérieur, c'est assez sombre, une odeur de crevettes et de piments frais me caresse les narines et mon ventre réclame son dû. La pièce est petite mais est remplie de monde, je me demande si on va réussir à trouver une table. Au fond, il semble y avoir une piste de danse où quelques personnes se mouvent, riant aux éclats. Je peine à me frayer un chemin à travers tout ce monde, et Cassio le remarque car il s'empresse d'attraper ma main et de m'attirer près de lui. Ce geste, aussi minime soit-il, me réchauffe tout le corps et j'eus l'impression de ne plus avoir demain.

-Tu verras, on sert le meilleur vatapa ici, me glisse t-il à l'oreille.

Au même moment, un homme assez trapu nous bloque le chemin, un large sourire au visage. Cassio me lâche aussitôt la main pour serrer celle de l'homme. Ils discutent ensemble, mais je peine à les entendre tant la musique est forte. Je crois comprendre qu'ils se connaissent, et que Cassio a l'habitude de venir ici. L'homme nous trouve rapidement une table, dans un coin du restaurant, et nous nous installons sans attendre.

-Comme d'habitude? demande t-il en se penchant vers Cassio.

-C'est ça, et sert lui la même chose, répond Cassio en me désignant d'un signe de tête.

L'homme s'en va rapidement et, ne sachant trop quoi faire, je me contente de me tripoter mes mains sous la table. Mon regard parcourt la salle de fond en comble, et lorsqu'il se pose sur Cassio, je remarque qu'il a les yeux rivés sur son téléphone. Et pour je ne sais quelle raison, j'ai envie qu'ils se posent sur moi.

-Tu viens souvent ici? dis-je en me penchant au dessus de la table.

-A chaque fois que je passe par Magé, répond t-il en rangeant son téléphone.

-Et tu...

Je me tais sur le champs et pour cause, sa main chaude vient de se poser contre ma joue, il la caresse lentement à l'aide de son pouce et ses sourcils se froncent. Quant à moi, tout mon corps se paralyse et je ne réalise pas tout de suite que mon cœur tambourine dans ma poitrine. Qu'est-ce qu'il est en train de faire?

-Tu as mal? demande t-il en retirant sa main.

Cette dernière se repose lourdement contre la table et son poing se serre légèrement. Mal? Pourquoi aurai-je mal? Tout ce que je ressens, à cet instant, c'est un vide indescriptible. A mon tour, je fronce les sourcils d'incompréhension.