La paroi lisse du calibre sur mon front, une détonation stridente dans la nuit, et tout se passe très vite. Je lâche l'arme qui retombe avec lourdeur au sol et me laisse choir à mon tour. Deux mains tremblantes s'abattent sur mes épaules, mes larmes coulent et mon estomac est prit de spasmes violents. Je me penche en avant et vomis sur les chaussures de la personne qui se tient face à moi. La balle est passée à quelques centimètres de ma tête. Elle n'aurait pas raté sa cible si cette personne ne m'avait pas sauté dessus. Haineuse, je relève la tête vers elle, du sang dégoulinant de ma bouche et les joues trempées de larmes. Adan. Mon oreille droite est complètement assourdie et les seuls bruits qui me parviennent sont lointain et résonnent avec puissance dans ma tête douloureuse. Et malgré ça, je pousse un hurlement aigre. Le visage d'Adan se tord dans un rictus inquiet et il me secoue.
-Laisse moi crever, putain! parvins-je à dire malgré la douleur.
D'ailleurs, je ne sais même plus la localiser cette douleur. Elle surgit de partout et nul part à la fois.
J'éclate de plus belle en sanglot et Adan sort un appareil noir de sa poche. Après avoir balancé quelques mots confus en son égard, il se penche vers moi et tente de capter mon attention. Il prononce sans doute mon nom, mais dans la confusion, mon cerveau, ma peau ne captent que ce qu'ils ont envie de percevoir. Le ciel obscur, la clarté de la lune, les étoiles mortellement brillantes, la fraîcheur nocturne, et le ciel, la lune, les étoiles, le vent sur ma peau, et le noir, le blanc, les étincelles, la brise affectueuse...
Deux pépites argentées se mettent à danser sous mes yeux et je me sens légère, légère comme l'air qui m'enveloppe. Bientôt, mes yeux se referment et les seules choses que je pus encore ressentir, c'étaient la chaleur de la peau qui m'entourait, les battements lents de mon cœur et le goût âcre du sang dans ma bouche.
Je me réveille, prise de spasmes douloureux et me redresse sur mes draps trempés de sueur. La casa où je me trouve est plongée dans l'obscurité complète et je la reconnais rapidement, je suis chez Caylan. Je n'ai pas le temps de me poser des questions que j'eus un reflux gastrique. C'est alors que je remarque une présence à mes côtés. Étendu sur les draps, Caylan dort. Et ce spectacle est tellement étrange, terrifiant et spontané à la fois, que je n'arrive plus à bouger. Mais la réalité me rattrape vite et je me penche en avant et vomis au sol. C'est infernal. Mes douleurs à l'estomac sont de plus en plus insupportables et ces vomissements inquiétants ont tous la même couleur noirâtre. Je n'ai rien dans l'estomac et je vomis des litres et des litres.
-Qu'est-ce qu'il t'arrives, Thalya? demande une voix dans mon dos.
Et c'est l'une des premières fois que je vois Caylan inquiet. Je l'entends se relever et se pencher par dessus mon épaule. Et j'ai honte. J'essuie ma bouche d'un revers de main lorsque Caylan sort du lit pour s'avancer vers un réfrigérateur.
-Depuis combien de temps est-ce que tu vomis comme ça? demande t-il en me tendant un verre d'eau et un comprimé, sans doute pour le mal de ventre. Je m'empresse de les avaler.
-Depuis ce matin, quand je suis sortie pour aller voir Oliver à l'hôpital... je réponds d'une voix que je ne me reconnais pas.
Caylan pose une serpillière sur mon vomis et s'assoit à côté de moi sur le lit.
-Dors, dit-il en me forçant à m'allonger.
Je hoche la tête mais une fois allongée, des spasmes douloureux me tordent violemment l'estomac. En sueur, je me relève une fois de plus et court jusqu'à la porte d'entrée de la casa. Une fois sur le perron, je me laisse glisser à même le sol et inspire de grande bouffée d'air. Caylan ne tarde pas à me rejoindre et sans un mot, il s'assoit à côté de moi, les yeux rivés sur moi.
-Je n'ai plus rien à perdre, plus rien. Laisse moi m'en aller, je t'en supplie.
Il se lève, rentre dans la casa et en ressort, une arme en main. Maintenant, il me la tend, et son regard insistant pénètre le miens sans scrupule. D'une main tremblante, je prend l'arme dans ma main et l'observe d'un œil nouveau. Caylan lui, me fixe intensément et aucun scrupule ne déforme ses traits.
-Vas-y, fais le. C'est tellement simple après tout, d'appuyer sur la gâchette. Fais le Thalya, et tu ne souffriras plus après ça.
Je baisse les yeux vers l'arme, livide. Caylan me défie de le faire, et je braque le calibre sur ma tempe. Mes yeux se ferment, j'inspire, j'expire. Mon oreille droite est encore un peu bouchée, mais de la gauche, j'arrive à percevoir le chant des grillons et la respiration lourde de Caylan. Ma peau est tremblante, mais l'air frais de la nuit me la pénètrent lentement, et j'ai la chair de poule.
-Je ne peux pas, je murmure tandis que mes larmes se mettent à couler.
Même me tuer, j'en suis incapable. Je rouvre les yeux, fixe l'arme, puis Caylan qui arbore ce même regard insistant. Rien n'a changé dans ses traits, et au milieu de cet océan d'étoile, je fais le rapprochement entre son regard gris et ses petites pépites argentées que j'ai vu quelques heures plus tôt.
-Si on pouvait faire tout ce qu'on voulait, tout serait plus simple, hein? Moi aussi j'ai déjà voulu me planter une balle dans la tête, mais c'était trop dur. Une petite pression... beaucoup trop difficile pour ce qu'elle représente. Et même si vivre c'est dur, je ne peux pas me résoudre à partir. Ma vie c'est de la merde, mais il y a deux trois petites choses qui l'illuminent et qui valent plus qu'une simple pression sur une gâchette.
En disant ces derniers mots, le regard perçant de Caylan semblait prendre possession entière de mon âme. Il me fixe d'un air pesant et finit par détourner le regard pour le porter au loin. Je ne réalise pas tout de suite que mon cœur bat à cent à l'heure. Est-ce que je fais parti de ces deux trois petites choses qui illuminent sa vie? Tu rêves ma pauvre, ricane une voix dans ma tête.
-Et détrompe toi, tu as beaucoup à perdre si tu t'en vas, dit-il alors en reportant son attention sur moi.
Il s'approche lentement de moi et me prend dans ses bras. Ainsi blottie, je ferme les yeux et mon pouls semble se calmer. La douleur dans mon estomac s'estompe peu à peu et je m'enfonce un peu plus dans ses bras. Ses mains chaudes caressent mon dos et à chaque fois que sa peau entre en contact avec la mienne, je frissonne de la tête au pied. Dans ses bras, j'ai l'impression d'être à l'abri de tout. Sa respiration lourde semble se calmer au moment où il dépose un baiser au sommet de mon crâne. Bientôt, le seul bruit qui me parvient est le chant des grillons. A l'aide de sa main sur mon menton, il me fait relever la tête jusqu'à ce que nos regards se croisent. Une braise ardente mêlée d'inquiétude, voilà ce que je vois, et mon cœur s'emplit de milles et unes émotions. Délicatement, il dépose un baiser sur mes lèvres et se recule pour m'observer à nouveau. Ses yeux brillent. Je cale de nouveau ma tête dans le creux de son cou, et ses mains s'immobilisèrent dans mon dos.
Être dans ses bras, c'est comme une chute. Oui, l'une de ses lourdes et terribles chutes dont on ne croit jamais s'en sortir. A la différence, celle-ci me pousse vers le bas pour plus d'élan, elle m'électrifie, me redonne des forces. Me prépare au pire.
-J'ai beaucoup à perdre, ajoute t-il en déposant ses lèvres sur ma tempe.
NDA
Salut tout le monde! J'ai conscience que cette fin est assez courte mais no panic, je compte écrire la 44 incessamment sous peu! Quoi qu'il en soit j'espère que vous avez aimé, faîtes le moi savoir en commentaire si c'est le cas!
Sinon, j'ai lancé ma F.A.Q donc n'hésitez pas à me poser vos questions!
J'aimerai aussi pour ceux qui ne l'ont pas fait, que vous alliez lire les trois premiers chapitres de ma nouvelle histoire : Nos Certitudes Immuables
Merci encore et bisou à tous!
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La Favela du Crime - Tome 1
ActionMorro da Babilônia est la plus grande favela de Rio de Janeiro. Thalya da Silva y vit. Et chaque jour, elle endure, ainsi que des milliers de moradores innocents, la présence du Premier Commando Militant, l'un des plus puissants cartels de drogue du...