24"Hannah"

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Comme mon vol en partance de Denver a été retardé, j'ai eu le temps de me demander si j'avais complètement perdu la tête.
Malheureusement, je n'ai pas eu l'occasion de faire machine arrière. Pas avec Nate qui me filait comme un garde du corps. Le salopard avait omis de préciser qu'il projetait de prendre l'avion avec moi puis de m'accompagner sur les cinq heures de route reliant Newark à Geneva. Neuf heures de tête-à-tête avec le frère de Matt m'attendaient. Comme si la situation n'était pas assez trouble comme ça.
- Hannah, s'il vous plaît, a dit Nate en saisissant la bandoulière de mon sac de voyage pour la vingtième fois.
J'ai agrippé les lanières de mon sac à dos.
- C'est bon, ai-je lancé en le regardant de travers.
Voyant qu'il fronçait les sourcils, j'ai éprouvé des remords. Ah ces types riches... arrogants... présomptueux... si séduisants ! Comment pouvaient-ils être agaçants et pitoyables en même temps ?
De l'agacement et de la pitié : les mêmes émotions que j'éprouvais dès que je pensais à Matt. Matt, l'homme que j'allais sauver.
C'était le premier week-end d'octobre, ce qui fait que j'avais eu une semaine environ pour ruminer la requête de Nate. Et j'ai fait sembler de réfléchir, même si j'avais pris ma décision à l'instant où j'avais appris qu'il buvait. J'ai essayé d'évoquer mes congés avec Pam. Comme chaque fois qu'elle ne souhaitait pas aborder un sujet, elle a à peine levé le nez de l'ordinateur.
- Oui, tout est réglé, Hannah. J'en ai déjà parlé avec Nathaniel. Je pars à Los Angeles ce week-end-là et Laura sera à Chicago. Nous fermerons le bureau.
- Seulement, ai-je poursuivi, je ne sais pas quand je reviendrai exactement. Ça risque de prendre plus qu'un week-end. Je ne sais pas trop.
- Oui, pas de problème. Tout est réglé, Hannah. C'est peut-être difficile à croire, mais je peux survivre sans toi.
Pam m'a jeté un coup d'œil. Zut, elle devait croire que j'essayais d'obtenir des congés payés, ce qui n'était pas du tout le cas. Grâce à Nate, j'avais cinq mille dollars de plus en banque. Je me suis demandé si Matt était au courant. Possible que ce soit son argent. Il fallait que j'arrête de creuser la théorie du complot.
- Super, bon. Je vous enverrai un e-mail si je vois que ça risque de prendre plus d'une semaine, mais ça m'étonnerait.
- Très bien. Bonne idée, Hannah.
Malgré sa voix et son attitude qui m'indiquaient que je pouvais disposer, je me suis attardée devant son bureau pour l'obliger à me regarder.
- Oui, Hannah ?
- Vous êtes en contact avec Matt ?
J'ai cru voir une ombre passer dans ses yeux, mais elle a disparu avant que je ne l'aie identifiée.
- Oui. C'est toujours mon auteur. Il nous arrive de communiquer.
- Comment va-t-il ?J'ai fermé les yeux ; je refusais d'affronter son regard cinglant.
Cette femme est un requin, m'avait dit Matt un jour, mais il était lui-même un tigre et Nate un faucon. Ils étaient tous dangereux. Ils vivaient tous dans la bulle du succès et, plus que jamais, j'avais l'impression d'être un enfant. Un enfant dans le noir. Je me posais sans cesse la question : comment osaient-ils ? Comment Matt avait-il osé se servir de moi et me mentir ? Comment Nate avait-il osé surgir sans prévenir et acheter mon aide ? CommentPam osait-elle me traiter avec froideur et indifférence alors que je partais sauver son maudit auteur ?
D'accord, j'étais amoureuse de Matt. Debout dans le bureau de Pam, alors que mon pouls s'accélérait, j'ai senti toute la colère et la chaleur de mon amour. Je n'avais pas besoin de cinq mille dollars pour aller le rejoindre. Cet argent était insultant. Et je ne rendais pas non plus service à Pam en partant le retrouver. Une chose était sûre, il ne méritait pas que je lui tende la main. J'allais le retrouver parce que je l'aimais, et que rien n'arrête l'amour.
- Il a connu des jours meilleurs, a répondu Pam d'une voix calme.
J'ai ouvert les yeux dans un battement de paupières. Pam ne me toisait pas du regard. Son expression s'était radoucie et elle fronçait délicatement les sourcils.
- Il a changé, Hannah. Je ne le reconnais plus. C'est difficile à dire mais...
Ses doigts ont survolé le clavier. L'émotion la rendait rétive. Ça avait le même effet surMatt ; le même effet sur Nate. Je me suis sentie victorieuse simplement parce que j'étais capable d'être humaine.
- Mais toi, tu pourras me le dire, a repris Pam en s'éclaircissant la voix. Tu vas le voir, alors tu me diras comment il va.
Clignant des yeux, j'ai hoché la tête.
- D'accord, promis, ai-je répondu.
Je suis sortie précipitamment avant de fondre en larmes. Pam avait besoin de moi. Tout comme Nate et Matt. Pourquoi ne l'admettaient-ils pas ?
J'ai préparé mes bagages le jeudi, après avoir appelé Nate et accepté son plan. Il a très maladroitement dissimulé son soulagement. Quand j'ai voulu lui rendre son argent, il m'a rembarrée. Il m'a conseillée de prendre des vêtements chauds, et précisé qu'il me conduirait à l'aéroport. Ce n'est qu'en passant me prendre qu'il a ajouté que nous allions voyager ensemble. Connard.
Nous avons embarqué avec quarante minutes de retard. Pendant que je rangeaismon sac, bouche bée, Nate avait un grand sourire. J'ai allongé mes jambes.
- Avez-vous suffisamment de place pour vos jambes, Mademoiselle Catalano ?
J'ai rougi.
- C'est la première fois que je voyage en première classe.
- On ne devrait jamais voyager autrement.
Je me suis tournée vers le hublot ovale, le regard perdu au-dehors. Ouais, on ne devrait pas voyager autrement si on en a les moyens.
J'avais envie de bavarder, après le décollage, alors que nous traversions une zone de turbulence - je suis nerveuse en avion -, mais je le snobais depuis le début. Malgré les secousses, il a fermé les yeux et s'est assoupi.
J'ai observé son visage. Une fois de plus, sa ressemblance avec Matt m'a frappée. Cependant, les cheveux de Nate étaient noirs, et ceux de Matt châtains avec les pointes plus claires et quelques mèches plus foncées. Je me souvenais de la douceur de sa chevelure entre mes doigts... quand on s'embrassait... quand il plongeait la tête entre mes cuisses.
Merde.
Je n'allais pas à New York pour sauter dans le lit de Matt. J'allais à New York pour tenter de l'aider, puis je retournerais à ma vie.
Une fois que j'aie été certaine que Nate était profondément endormi, j'ai sorti mon exemplaire de The Silver Cord. Ces trois derniers mois, j'avais relu les livres de Matt. Contenu dans ses phrases, codé dans ses mots, je trouvais l'homme que j'aimais et tous ses secrets. Lire ses livres, c'était comme entendre sa voix. Ses traits d'esprit, son sarcasme, ses sautes d'humeur, mais aussi sa sagesse désespérée caractéristique - tout s'y trouvait.
Le vendredi matin, j'avais téléphoné à Pam pour savoir si de nouvelles pages du Substitut étaient arrivées. Les envois de Jane Doe étaient réglés comme du papier à musique, ils nous parvenaient tous les jeudis, mais nous n'avions pas reçu de nouveaux chapitres depuis deux semaines. J'avais espéré avoir des feuillets à lire dans l'avion. Mais il n'y avait rien, et Pam n'a pas donné d'explication.
Très embêtant. L'auteur était coincé sur une scène que j'étais impatiente de lire, mais que je redoutais également. La scène d'amour.
Nate a fermé mon livre pour vérifier la couverture.
- Nate !
J'ai bondi en détournant mon ouvrage.
- Désolé, je me demandais ce que vous lisiez.
J'ai rangé The Silver Cord dans mon sac à dos.
- Maintenant vous le savez.
J'avais les joues en feu.
- C'est l'un de ses livres que je préfère.
J'ai jeté un coup d'œil à l'homme impeccable assis à côté de moi. Pour voyager, j'avais choisi une tenue confortable composée d'un leggings et d'une tunique grise. Nate ressemblait à un cadre de Wall Street avec son costume gris et sa cravate dorée, avec un nœud Eldredge si réussi que j'avais envie de fixer sa gorge. Quand Nate ne me mettait pas les nerfs en pelote, il m'intriguait. Que faisait-il dans la vie ? J'avais remarqué son alliance imposante.
Est-ce que tous les Sky trompaient leur femme ou juste leur petite amie ?
- Est-ce vrai ? ai-je demandé.Que ça parle plus ou moins de... votre famille ?
- Oui, a répondu Nate en souriant.
J'ai froncé les sourcils. Il avait par moments des sourires si chaleureux que ma colère se dissipait, et dès qu'il me parlait, il m'accordait toute son attention. C'était déconcertant. Il venait de se tourner entièrement vers moi, visiblement indifférent aux yeux ronds de plusieurs hôtesses de l'air.
- Je crois comprendre que c'est ce que vous avez lu sur Internet ?
Loin du cynisme de Matt, il parlait avec une franche curiosité.
- Eh bien, oui. J'ai... suivi l'histoire pendant un moment.
- Je ne peux pas vous le reprocher.
Tandis que Nate me regardait patiemment, j'ai pensé à The
- Alors comme ça, vous avez grandi dans une famille très religieuse ?
- Oui, très.
.- Je ne l'aurais jamais deviné, ai-je marmonné.
J'ai posé la main sur ma bouche - merde, ce n'est pas ce que je voulais dire- mais Nate a seulement ri.
- Pensez à nos prénoms : Matthew, Seth, Nathaniel. Tous bibliques. Nos parents nous emmenaient à l'église deux fois tous les dimanches. Notre oncle, pas tant que ça.
- Vos parents, ai-je chuchoté.
- Oui. Matt a très mal vécu leur mort. Il était jeune. Assez vieux pour se souvenir d'eux, et trop jeune pour vraiment comprendre. Je pense qu'il ne comprend toujours pas. Il souffre comme je n'ai jamais vu personne souffrir, depuis toujours. Il est très émotif.
Sans quitter Nate des yeux, je l'ai supplié en silence de poursuivre. Au bout d'un moment, il a repris.
- Je me souviens d'un jour où nous étions en vacances dans le Maine. Notre père est entré dans une grotte, on ne le voyait plus du tout. Matt... (Nate a fait un petit sourire) il s'est écroulé sur le sable et il a pleuré toutes leslarmes de son corps. Il a cru que notre père avait disparu. Il était inconsolable, même quand notre père a réapparu. Toute la journée, il a eu les larmes aux yeux, et je voyais... (Nate a montré ses yeux) je voyais que ça allait plus loin que ça pour Matt, la disparition de notre père dans l'obscurité. Ça allait au-delà de la peur. Il s'est senti trahi en quelque sorte.
- La plus petite séparation renvoie à un au revoir plus vaste, ai-je dit d'une voix calme.
C'était une phrase extraite de The Silver Cord. Ma citation préférée.
- Oui, exactement.
- Il a toujours voulu devenir écrivain ?
- Oh, je ne sais pas. Il dirait que non. Il en parle rarement, bien qu'un jour, je l'aie entendu déclarer que la seule chose qu'il aime encore moins qu'écrire, c'est de ne pas écrire. (Nate a ricané.) Quand il a quitté l'université, j'ai cru qu'il allait passer le restant de sa courte vie à boire. Mais il écrivait - et il est devenu dépendant de l'écriture.
Jusqu'à aujourd'hui, ai-je pensé.
- Oui, je comprends. Merci.
- Mais de rien. Il semblerait qu'entre Internet et The Silver Cord, vous soyez assez bien informée sur ma famille et moi.
J'ai baissé la tête en faisant semblant de chercher quelque chose dans mon sac. J'étais mal à l'aise. C'était une chose de fouiner dans la vie de Matt en tant qu'anonyme sur Internet, mais c'en était une autre d'évoquer le fruit de mes recherches avec son frère assis à côté de moi.
- Oui, peut... peut-être.
- C'est de bonne guerre, Hannah. Je sais pas mal de choses sur vous et votre famille, moi aussi.
Mon ventre s'est serré. Que savait Nate ? Que lui avait raconté Matt ? Il a dû sentir mon angoisse puisqu'il a rapidement ajouté :
- Matt ne parle qu'en bien de vous et de votre famille.
J'ai souri froidement.
Cette conversation a donné le ton à la suite du voyage. Nous avions posé les bases d'une camaraderie forcée, et nous l'avons entretenue tant bien que mal, malgré la gêne évidente quenous inspirait notre aventure. Je continuais d'espérer que Nate m'offre son explication de l'état désastreux de Matt, mais il n'en a rien fait. Peut-être qu'il n'en savait rien. Était-ce ma faute ? Était-ce parce qu'on avait découvert sa véritable identité ? Les deux ? Honnêtement, je ne croyais pas que notre séparation ait pu le mettre à terre.
La voiture de Nate, une berline Cadillac noire, était garée à l'aéroport de Newark.
- J'habite du côté de Trenton, a-t-il expliqué pendant que nous rangionss nos bagages dans le coffre. Il y a quelques petits aéroports entre ici et Geneva, mais il n'y a pas moyen d'éviter un détour improbable - descendre en Floride, remonter à Philadelphie et direction New York - et même là, il faut encore faire de la route. C'est mieux comme ça, et puis ça nous donne le temps de bavarder.
J'ai serré mon sac à dos sur mes genoux. Du temps pour bavarder. Génial.
- Je veux bien prendre le volant, ai-je dit, mais à mesure que nous traversions Newark àla nuit tombante, j'ai éprouvé un soulagement de plus en plus vif à l'idée que ce soit Nate qui conduise.
- Vous allez conduire. Nous irons chercher votre voiture de location à Geneva.
J'ai vérifié mon téléphone. Il était 19h. Même en roulant bien, nous ne serions pas à Geneva avant minuit.
- Ça m'étonnerait que les agences de location ferment aussi tard.
Nate a secoué la tête. Par bonheur, Nate était plus attentif que Matt en voiture. Il avait une conduite agressive, mais son regard perçant restait rivé sur la route et ses mains posées sur le volant.
- J'ai tiré des ficelles pour que le responsable nous attende. C'est une urgence, après tout.
Regardant par la fenêtre, j'ai souri en coin. Alors lui aussi, vous l'avez soudoyé. Je me suis souvenu que Matt voulait acheter tout ce que je touchais. J'imaginais sans mal les Sky passant leur vie à grogner et à sortir leurs gros billets au moindre problème.
Lorsque nous sommes arrivés en Pennsylvanie, il faisait nuit noire. Au-dehors, je distinguais à peine les collines et les clôtures des entreprises agricoles.
- Beau pays, a dit Nate. Très fertile. C'est la première fois que vous venez dans l'Est ?
- Ouaip. J'ai grandi dans le Colorado.
- C'est dommage qu'on ne voie pas grand-chose. Demain matin, vous verrez comme les Finger Lakes sont magnifiques. Toute la région est comme ça - on trouve surtout des fermes dans l'État de New York.
J'ai hoché la tête en souriant, bien que les fermes ne correspondent pas à l'image que j'avais de New York.
Je repensais sans cesse à la phrase de Nate.C'est une urgence, après tout.
Étais-je vraiment la personne de la situation ? Qu'étais-je censée faire ?Lorsque nous avons traversé New York, Nate s'est détendu. Il me lançait des coups d'œil de temps en temps, et s'est mis à bavarder gaiement. Souhaitais-je m'arrêter pour manger ? Non. Avais-je besoin d'un café ?
Non. Voulais-je écouter la radio ? Du chauffage ? La clim ? Il a accéléré.
- Je vous ai pris un hôtel à Geneva, au bord du lac. Ça va vous plaire. J'ai réservé une suite.
Vous avez certainement consulté les documents que je vous ai donnés.
- Oui, vite fait...
J'avais fait des recherches sur l'hôtel mais j'avais rapidement fermé mon ordinateur, préférant ignorer combien Nate dépensait pour moi.
- Ce n'était pas nécessaire, enfin, c'est très gentil...
- Mais non, vous me rendez service, Hannah. Si quelque chose ne vous convient pas ou s'il y a le moindre souci, appelez-moi. Je suis joignable en permanence. Et bien sûr... (il a trituré le rétroviseur, s'est passé la main dans les cheveux, et a tapoté le volant) j'imagine que vous aimeriez aller voir Matt dès votre arrivée.
J'ai planté mon regard dans l'obscurité pour dissimuler ma peur. Je m'étais habituée au calme de Nate, à sa présence imposante. Si, audépart, je ne voulais pas d'un compagnon de route, brusquement, l'idée de me retrouver seule dans la région de New York me terrifiait. Abandonnée avec Matt dans un état instable, ni plus ni moins.
Mise à part notre relation éclair, nous nous connaissions peu. Nous étions des inconnus. De nouveau. Toujours.
- Il... (j'hésitais) enfin, pourquoi...
- Pardon ? Si vous êtes fatiguée, évidemment, allez plutôt à l'hôtel. Attendez demain matin pour aller le voir. Il est dans le coin. Il est...
- Vous lui avez rendu visite ? ai-je bredouillé.
- Bien sûr. Oui, évidemment. (Nate a souri, mais sans desserrer les lèvres.) Plusieurs fois. Il est, vous savez... je suis son grand frère. C'est différent. Quand je suis là, il a l'impression que je le traite comme un bébé. Ça ne marche pas, a-t-il expliqué en riant.
Le sourire de Nate, son bavardage, son rire anxieux - rien de rassurant. J'ai surpris son regard sur moi.
- Il n'est pas dangereux, Hannah.
Je me sentais minuscule. J'ai serré mon sac contre ma poitrine. Pas dangereux. Facile à dire pour Nate. Matt n'avait pas fait éclater sa vie.
- Est-il suicidaire ? ai-je murmuré.
- Non ! Mon Dieu, non
Ses phalanges étaient blanches.Nous avons poursuivi notre route en silence. Mille questions me brûlaient les lèvres
- Quand l'avez-vous vu pour la dernière fois ? Comment savez-vous qu'il ne pense pas au suicide ? -, mais mes interrogations semblaient le crisper, et sa nervosité alimentait la mienne.
Je n'avais pas décidé si j'irais voir Matt ou à l'hôtel à mon arrivée. Je me dégonflais à vue d'œil.
Un employé de l'agence de location, amical mais visiblement fatigué, m'a emmenée chercher ma voiture. Nate s'est chargé de remplir les formulaires, puis m'a demandé designer ici et là. Comme de bien entendu, il avait réservé une Ford Escape, pas un véhicule de classe économique.
La nuit était glaciale. Nate a porté ma valise jusqu'à la voiture et nous nous sommes attardés, le temps de vérifier les directions sur mon iPhone. Il m'avait surchargée de cartes routières, de conseils et de coordonnées. À la fin de la conversation, je grelotais.
Sans prévenir, Nate m'a prise dans ses bras.
- Merci, Hannah, a-t-il dit en me lâchant brusquement.
J'ai fixé mes pieds.
- Je tiens à lui, ai-je dit. Beaucoup.
- Je sais. Maintenant je le sais. Il a besoin de vous.
- Je sais.
L'entendre me dire ça - il a besoin de vous - m'a redonné du courage. J'avais un objectif. J'étais là pour l'homme que j'aimais, pas pour me planquer dans un hôtel huppé.
- Je vous téléphone, a-t-il dit.
J'ai pressé l'épaule de Nate avant de monter en voiture.
.L'hôtel se trouvait à quelques minutes de route de l'agence de location ; le chalet, à quelques minutes de l'hôtel, au nord de la pointe du Lac Seneca. J'ai quitté Geneva en longeant le lac, et facilement trouvé mes repères. Dix minutes plus tard, j'empruntais le chemin de gravier qui menait au chalet de l'oncle de Matt. Comme il faisait nuit, je conduisais prudemment. Mes pneus crissaient sur le chemin de campagne et mes phares éclairaient des portions de forêt. Mes mains étaient moites sur le volant.
Matt, mon Matt. Je ne l'avais pas vu depuis une éternité. Je brûlais d'envie de le voir, de le toucher. Mon cœur bondissait à sa rencontre.
J'ai franchi deux ornières en traversant les bois. Je me suis arrêtée quand mes phares ont révélé une fenêtre. Si Matt dormait, je préférais éviter de le réveiller. J'ai continué à pied. La fraîcheur de cette nuit d'octobre me donnait la chair de poule.
De grands arbres entouraient le chalet, une construction douillette de taille moyenne avecune véranda enveloppante. Des carillons suspendus aux avant-toits tintaient délicatement dans le noir.
J'ai d'abord envisagé de frapper à la porte mais, finalement, j'ai appuyé sur la poignée. Je suis entrée sans bruit, le cœur battant. À mesure que mes yeux s'adaptaient à l'obscurité, j'ai distingué une table de cuisine et un bar américain jonchés de bouteilles, vides pour la plupart. Seule une mouche brisait le silence. De la vaisselle sale était empilée dans l'évier et une odeur rance flottait dans la pièce.
Du verre brisé sur le sol.
Des cendriers pleins de mégots.
Des vêtements et des papiers éparpillés.
J'ai perçu un bruissement. Jetant un coup d'œil dans le coin, j'ai vu Laurence assis dans sa cage. Ses yeux brillants m'observaient. Je suis allée vers lui sur la pointe des pieds. Je l'ai rapproché de moi et j'ai souri, caressant sa fourrure à travers les barreaux.
- Salut, toi, ai-je murmuré. T'inquiète pas, ça va aller maintenant
Un cliquètement métallique a résonné dans mon dos.
Je me suis retournée.
Matt était là.
Le canon d'un pistolet pointé sur moi.

À SUIVRE...
La fin de la saison 1 de Long Night approché 😏

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