25"Matt"

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Hannah était tellement immobile que j'ai cru que j'avais arrêté le temps.
Moi aussi, j'étais figé. Même mes mains tenaient fermement le pistolet que je braquais sur sa tête. Mon Dieu, j'hallucinais. Ça ne pouvait pas être Hannah. Pourtant, c'était elle. Le clair de lune soulignait les contours de son adorable visage. J'ai senti l'odeur sucrée de son shampooing.
- M... M... Matt, a-t-elle bredouillé dans un souffle.
C'était la réplique parfaite de la voix d'Hannah, rauque avec une pointe de peur. Elle a longé le mur. J'ai baissé mon arme.
- Tu n'es pas réelle, ai-je déclaré.
Les yeux noirs d'Hannah étaient rivés au pistolet. Quand j'ai tapoté le canon contre ma cuisse, ses narines ont frémi. - C'est moi, a-t-elle dit. Matt, c'est moi. D... donne-moi cette arme.
- Te donner mon arme ? ai-je ri, en l'agitant.
Pour tomber dans un rêve horrible dans lequel le fruit de mon imagination me fait exploser la cervelle ? Non merci.
- Je suis réelle, Matt. S'il te plaît. C'est moi, je...
Lorsqu'Hannah a tendu la main vers le pistolet, j'ai reculé avec un petit sourire narquois.
- Oh non, tu n'y touches pas. C'est le revolver de Tchekhov. Tu sais ce que c'est, non ?
J'ai visé le mur et ajusté l'angle de tir. J'ai envisagé l'idée d'aller tirer dans la forêt. Putain, ça ferait du bien. Lorsque la main moite d'Hannah s'est posée sur mon avant-bras, nos regards se sont croisés. Trop réel, ce contact. J'ai détaché mon doigt de la gâchette.
- Hannah ?
- Oui, Matt, c'est moi. Mon Dieu, c'est bien moi. Aide-moi.
Sa main est descendue le long de mon bras jusqu'au pistolet. Elle a posé les doigts sur les miens et l'a lentement baissé.
- Aide-moi, a-t-elle murmuré. Comment je...
Sa main tremblait sur la mienne.
- Tiens, comme ça.
J'ai éjecté le chargeur et fait coulisser la barrette. Une balle a rebondi sur le sol. Hannah a vacillé.
- C'est bon, ai-je murmuré en verrouillant la barrette. C'est vide.
- Je peux...
- Ce que tu veux, ai-je dit
Nous étions si proches que nos hanches se touchaient. Elle m'a pris le pistolet des mains, puis elle a récupéré le chargeur et ramassé la balle.
- Je reviens tout de suite, a-t-elle promis. Tout de suite.
Elle est sortie d'un pas rapide. J'ai traîné des pieds jusqu'à la fenêtre pour jeter un coupd'œil au-dehors, mais j'y voyais que dalle. Mon Dieu, Hannah était là. Était-ce possible ? Et j'avais pointé une arme sur elle. J'ignorais comment elle était venue jusqu'ici, mais elle allait probablement disparaître dans la nuit. Avec mon pistolet.
Merde.
Je me suis effondré sur le canapé. Était-ce bien réel ? J'ai saisi la bouteille posée sur la table basse et bu du bourbon au goulot. Ce tord-boyaux avait un sale goût. Je n'ai pas entendu Hannah revenir, mais soudain, elle était à genoux devant moi. Elle m'observait de ses yeux embués de larmes.
- Tu as un autre pistolet ? D'autres armes ?
- Non, ai-je marmonné. Sauf si tu comptes les couteaux de cuisine.
Un soupir s'est échappé de ses lèvres. Elle a tendu la main vers la bouteille, puis s'est ravisée.
- Oh, Matt... qu'est-ce qui t'arrive ? Regarde-toi.
Je me suis examiné. Je portais un boxer-short de mauvaise qualité et des chaussons défraîchis à pompons.
- C'est pas les miens. Je les ai trouvées ici, les pantoufles. Pas à moi. J'ai avalé une autre gorgée de bourbon. J'étais incapable de réfléchir à tout ça
- la présence d'Hannah, moi, le pistolet, tout ça.
Malgré son sourire, une larme coulait sur sa joue.
- Tout va bien, murmurait-elle, ça va aller. (Elle a tapoté mon chausson.) Ils sont bien chauds. Faut pas avoir froid aux pieds.
J'ai déplacé mes pieds sur le parquet, le regard dans le vague.
- Ouais, il fait froid, ai-je dit.
- Très froid même. Il gèle. Je vais fermer les fenêtres, d'accord ?
La main d'Hannah a caressé mon visage. Il fallait que je me rase. Elle a essayé de m'obliger à la regarder, mais mes yeux me piquaient. J'ai détourné le regard.
- Attends, je vais fermer les fenêtres, ne bouge pas.
J'ai choyé la bouteille pendant qu'elle fermait les fenêtres du séjour.
- Tu veux dormir ? Tu es fatigué ?
- Non, ai-je répondu.
- J'allume la lumière ?
- Non.
- D'accord, et si je faisais une flambée ? J'aimerais bien faire un feu.

Long NightOù les histoires vivent. Découvrez maintenant