11"Matt"

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Préparer l'appartement pour Hannah :

1. Gagner du temps (un jour)
2. Nourriture surgelée (Pam ?)
3. Photos, albums photos
4. Vêtements et produits de toilette de Bethany
5. Trucs de fille (surtout salle de bains)
6. Mes livres
7. Mes travaux d'écriture
J'ai relu ma liste.

J'ai levé les yeux vers la télé.Très troublant.
Ma liste semblait infiniment plus importante que les reportages sur les émeutes au Brésil, où ma petite amie était justement en vacances.
Toutefois, je savais que Bethany était en sécurité. Elle m'avait envoyé un e-mail dans la matinée.

Si jamais tu te fais du souci, ce dont je suis sûre puisque je sens ton inquiétude jusqu'en Amérique du Sud (sarcasme), mes parents et moi-même allons bien. Nous avons manqué de peu les émeutes de Florianopolis mais à présent, nous sommes à l'abri du danger. Je ne vais pas tarder à te téléphoner si tu ne m'écris pas. Les repas te plaisent ? Bisous, Bethany.

Sa menace de me téléphoner me paraissait très réelle - et très dissuasive.
Il me serait impossible de prendre un appel de Bethany en présence d'Hannah ; or j'avais envie de passer tout mon temps avec Hannah. La déposer chez elle la veille au soir m'avait coûté cher.
Je l'avais reconduite dans un silence hébété - c'était la première fois qu'une fille me faisait jouir aussi vite et aussi fort avec sa bouche. Son effronterie m'enrageait, mais elle me plaisait également. J'aimais être surpris. J'aimais qu'on me provoque. Je ne souhaitais qu'une chose, passer prendre Hannah, la ramener chez moi, la plaquer contre le plan de travail de la cuisine, la fesser jusqu'à lui arracher des larmes. Et la baiser fort et la faire jouir, aussi.
J'avais sacrément cette fille dans la peau. Le pire était sa déception quand j'avais garé la voiture devant chez elle. Elle avait tenté de le cacher, mais c'était une mauvaise comédienne. Elle venait de me sucer comme personne de toute ma courte vie, et j'avais dû lui paraître offusqué.Sans cela, pourquoi terminer la nuit aussi abruptement ? Pour quelle autre raison ne l'avais-je pas invitée chez moi ?
Ses interrogations étaient aussi manifestes que sa peine.
Elle m'avait remercié pour le dîner.
J'avais à peine répondu.
J'étais déjà en proie à mille questions.

Comment pourrais-je inviter Hannah chez moi alors que tout indiquait que j'avais une petite amie. « Une fille habite ici ! Là, des tampons ! », hurlait l'appartement.

Étape 1 : gagner du temps
Objet : Dynamite
Expéditeur : Matthew R. Sky Jr
Date : Mardi 2 juillet 2013
Heure : 8 : 15 AM
Bonjour, Hannah,

J'ai des choses à faire ce soir après le travail. Comme ça risque de durer, si tu n'as pas de mes nouvelles, tu sauras pourquoi.
Matt

J'ai envoyé l'e-mail, et appelé Pam.

Étape 2 : Me débarrasser des plats surgelés étiquetés qui risquent d'éveiller les soupçons. Ce serait dommage de jeter de la nourriture à la poubelle, et de toute façon, je n'ai pas le cœur sec à ce point. J'ai éprouvé un sentiment de culpabilité en songeant que Bethany s'était donné la peine de cuisiner et de classifier mes repas.
Mon comportement commençait à soulever la question évidente : pourquoi ne pas tout simplement rompre ? L'appeler et s'y coller. Autant être clair, c'était inévitable.
D'accord, mais pas tout de suite.
Plaquer ma copine par téléphone pendant ses vacances, c'était aussi mal que de la tromper dans les mêmes circonstances, et deux faux pas...

Merde, j'y penserai plus tard.

- Matthew ? résonna la voix guindée de Pam.
- Salut, Pam. (J'arpentais la cuisine.) J'ai un service à te demander. J'aimerais que tu passes prendre un truc.
- Tu as des nouvelles pages à me remettre ?
Pauvre Pam, tellement ridicule dans son exaltation. J'ai souri en coin en considérant l'amoncellement de Tupperware dans le congélateur. Pam était la seule personne de ma connaissance qui puisse les conserver et me les rendre sans poser de questions. Pour elle, j'étais simplement M. Pierce, écrivain excentrique.

- De nouvelles pages ? ai-je répété en refermant la porte du congélateur. Euh... pas tout à fait...

Pam était partie avec trois sacs de plats surgelés (en m'assurant qu'elle me les rendrait à ma demande), j'ai passé mon appartement au peigne fin pour éliminer toute trace de Bethany.
Je comptais sur le hip-hop pour me faire oublier mon ignoble attitude, mais après « 99 Problems » et « Heartless », j'ai balancé mon iPod dans un coin.
Tout est rentré dans des sacs matelot : les photos de Bethany et moi, tous mes albums photos, ses ra soirs, son maquillage, ses shampooings et ses produits de beauté en tout genre, ses bijoux et ses vêtements, mes livres, mes manuscrits, mes décomptes de droits d'auteur et de cession de droits pour le cinéma - putain, j'ai même fourré mes taxes d'imposition dans ces sacs. Comme si Hannah allait fouiller mes dossiers. Je devenais parano.
J'ai tout enfermé dans le coffre de ma Lincoln.
Je me faisais l'effet d'un truand qui cache un cadavre. Ça commençait à devenir barjot. En retournant chez moi, j'ai encore été assailli par la culpabilité.
J'avais l'impression d'avoir couru dix kilomètres, sauf que j'étais toujours aussi stressé. De plus, je n'avais plus rien à manger à part quelques boîtes de soupe, des pâtes et des céréales. Génial.
Il était 19 heures.
Il m'avait fallu la journée entière pour transformer mon domicile en piaule de célibataire, et à la fin de cette expérience, je me sentais sale et vidé. De plus, Hannah me manquait. Sa voix et le parfum sucré de son shampooing me manquaient. Ses jambes écartées me manquaient. Ses joues empourprées me manquaient, son con humide...
J'ai vérifié mes e-mails.
Elle avait envoyé un épisode de notre récit la veille, mais rien depuis.

Long NightOù les histoires vivent. Découvrez maintenant