Partie 44. Le sapin à Noël

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« Le sapin à Noël »

Petit sapin deviendra grand, rien n'est moins sûr. Vous n'imaginez pas le stress du sapin de moins de deux mètres dans les trois semaines qui précèdent Noël.

Pour lui la vie en forêt devient l'enfer.

A chaque minute, il lui faut surveiller les mouvements de passants pas toujours désintéressés. Les gens les plus dangereux surviennent crépusculairement pour observer ; ils reviendront nuitamment, porteurs de haches ou laisseront la place aux spécialistes de la scie, aux maniaques de la tronçonneuse.

Et hop ! En un instant, c'est l'exécution : de petit conifère, vous voici devenu « sapin de Noël », autant dire la fin de l'existence.

Vous aurez droit à un enterrement hors classe pendant trois semaines dans un salon surchauffé.

Embaumé de givre artificiel, paré de boules colorées, de guirlandes scintillantes,

Vous perdrez progressivement vos aiguilles avant d'être jeté à la voirie un petit matin de janvier, brisé, la tête enfouie dans le caniveau.

Tant que le sapin n'atteint pas deux mètres, il reste anxieux en début d'hiver.

On dit même en forêt que certains, à trois mètres, s'inquiètent encore.

L'homme pacifique a rangé la hache et la tronçonneuse,

Il ouvre son sapin artificiel comme un parapluie.

Les guirlandes sont intégrées.

Sous la neige, la forêt peut s'endormir paisiblement quand le bûcheron de Noël reste au chaud.

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« Appel »

06 ou 07, Bip ! Bip ! Je commence à pianoter.

08, 09, Bip ! Bip ! Mon appel est en cours.

10, 11, 12, Bip ! Bip ! Bip ! J'achève mon numéro.

Premier Tut ! Espoir.

Deuxième Tut ! Impatience.

Troisième Tut ! ... Mais alors t'es où si t'es pas là ?

Tut ! Tut ! Tut ! Veuillez renouveler votre appel ultérieurement.

Ecran noir : désespoir. Il faut raccrocher.

Il me reste le SMS en signal de détresse.

Je stresse.


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"Chant d'hiver"

J'avoue qu'écouter le loup, le renard et la belette

Qui chantent à tue-tête : « l'hiver viendra, l'hiver viendra !

Ça finit par m'horripiler.

Ce sont toujours les mêmes qui chantent,

Et toujours les mêmes qui travaillent.

J'ai déjà entendu la cigale grincer tout l'été,

Le corbeau et sa médiocre voix passant au-dessus des labours,

Le coq et son cri d'ahuri, chaque matin.

Tous, ils chantent. Et maintenant voilà ces trois oisifs,

Qui slament à n'en pas finir : « l'hiver viendra, l'hiver viendra ! »

Bien sûr que l'hiver viendra, on le sait.

Il ne faut pas être grand clerc pour bêler pareil refrain.

C'est bien la peine d'avoir des antennes pour ne capter que pareilles sornettes.

Allons, reprenons notre ouvrage ; on m'attend à la fourmilière.



Fables vertes et contes bleusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant