Partie 77. Joyeuse Pagaille

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« Joyeuse Pagaille »

La pagaille a ceci de positif, c'est qu'elle est joyeuse. L'ordre est triste, le désordre est menaçant, n'apporte rien et ressort de la négligence. Mais la pagaille dans sa perfection devient une « Sainte Pagaille », inventive et créatrice.

Grâce à elle, les opposés se rapprochent, elle organise l'insolite : la rencontre de la chaussette et du bonnet, de la carpe avec le lapin. Il y a de l'effervescence dans les tiroirs : la joie permanente de la découverte.

Parfois, pressé au petit matin, dans la rage de voir surgir du bouillonnement de la penderie l'objet égaré, on prête le énième serment que désormais tout sera rangé, archivé, trié, étiqueté.

Mais ce serait sans la surprise du heureux hasard où resurgit de nulle part ce qui s'était perdu. Le bonheur d'embrasser le dossier égaré depuis un an, remercier Saint Antoine de Padou ... et dire qu'il était simplement là, sous le napperon que cachaient quelques photos coincées sous la boîte de thé.

Alors tout à la joie des retrouvailles, comme le père au retour du fils prodigue, promesses et serments s'envolent. Et l'on s'émerveille face à ces empilements hétéroclites, riches de trésors qu'il faudra vraiment fouiller un jour.

Car un jour, c'est promis, juré ... on s'y mettra.

Mais ce qui rassure... c'est que tout est bien là. Rien ne se perd jamais.


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« Chutes »

Il ne faut pas se moquer des filles qui font tapisserie,

Des boxeurs groggys sur le ring, des savants fous,

De celles qui aspirent la moquette et de celles qui la fument.

Tous sont de pauvres victimes retombées au sol.

Les chemins du Paradis sont pavés de retours au tapis.

Et l'on sait que l'amour comme le génie passent un jour par l'Enfer !


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"Bon pied, bon œil"

L'épine dans le pied, le caillou dans le soulier et le lacet défait, voilà ce qui turlupine le marcheur entravé dans ses pensées, car si tout l'être tient à la bipédie, c'est la chaussure qui assure son repose-pied pour offrir à sa tête la liberté de pensée.

« La vue de votre pied me trouble » balbutie Frédéric face à Mme Arnoux chez le grand Flaubert, et Candide fut chassé du beau château de Thunder-ten-Tronkh « à grands coups de pied dans le derrière ». C'est ainsi que par le pied s'ouvrent des destins insoupçonnés, et que l'on se met en chemin.

C'est encore pieds nus que Cendrillon attendit le Prince charmant pour prendre pantouflede vair à son petit pied.

Toue la vie se résume à bon pied bon œil : en avant, marche !


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« Le coq et le coquelicot »

Cherchant à redorer son blason et surtout à rougir sa crête, un orgueilleux coq sur le déclin croqua un coquelicot. Malheureusement, le coq était faible et le coquelicot plus fort : c'est le coq qui devint coquelicot.

On le planta dans la basse-cour.

C'est amusant, la honte lui a donné la rougeole, il a belle couleur, désormais c'est un magnifique coquelicot chantant. Si rare que les poules l'observent comme le dernier des mutants.

Elles le montrent aux poussins qui rigolent d'entendre une fleur ventriloque, car chaque matin le coquelicot-coq secoue ses pétales et donne l'heure du soleil levant.

Méfie-toi, croquant, de ce que tu croques, tout croqueur finit croqué et se métamorphose... Psychose !


Fables vertes et contes bleusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant