Lundi 4 mai
Laura endormie dans son giron, Florian somnole. Il est vingt-trois heures et le film qu'il regardait à la télévision vient de se terminer. Il n'en a pas vu la fin, s'étant assoupi avant, tant l'histoire lui paraissait insipide. De plus, la fatigue du dimanche avec Lydiane se faisait sentir. Après la visite du château de Gevrey, ils s'étaient promenés sur les chemins boisés de l'Arrière-Côte et avaient dîné dans une auberge à l'ambiance bucolique près de Vougeot, où elle avait désiré passer la nuit.
Il baille et s'étire. Des images de cette soirée à la campagne lui reviennent alors...
« J'ai l'impression qu'hier, Lydiane s'est un peu dégelée. D'habitude, elle veut tout régenter, même sa sexualité, et ne peut jamais s'abandonner. Mais là, dans cette chambre qui sentait bon le seringa, elle a sans doute pu se laisser aller... De mon côté, il est possible que je me sois montré plus attentionné... »
Soulevant Laura, il va la porter dans son panier.
« Tu dois rêver, ma belle », dit-il à la chatte en la voyant papilloter des paupières.
Lui aussi va se coucher. Mais le sommeil ne revenant pas, il pense de nouveau à Lydiane :
« Elle semble faire des efforts pour se désintoxiquer, comme elle l'avait décidé. A l'apéritif, elle a choisi un cocktail sans alcool, et n'a pas commandé de vin au dîner. Quand elle a allumé une cigarette sur la terrasse, je lui ai suggéré d'arrêter de fumer ; elle m'a répondu calmement que j'avais raison et que c'était sûrement la dernière, en l'écrasant dans un cendrier. Cet hiver, je lui avais déjà donné ce conseil ; elle m'avait répliqué : " Mais je fais ce qui me plaît ! ", d'un ton acerbe. Elle est en progrès...
Ce matin, dans la poubelle de la salle de bain, j'ai vu son paquet à peine entamé. En sortant de l'auberge après le petit déjeuner, on voyait bien à sa nervosité qu'elle était en état de manque... Je lui ai dit de respirer à fond pendant quelques minutes, ce qu'elle a fait aussitôt ; j'ai même eu droit à un sourire reconnaissant. J'espère qu'elle pourra tenir... »
N'arrivant pas à dormir, Florian se lève et va boire un verre d'eau fraîche. Puis il ouvre la petite fenêtre de sa chambre et se penche à l'extérieur afin d'apercevoir un coin de ciel étoilé.
Un regard à son radio-réveil lui apprend qu'il est presque minuit. Un papillon entre dans la pièce.
« Il est attiré par ma lampe ; une phalène ?... »
Un prénom féminin, cher à sa mémoire, lui revient : « Phalène ! »
Il ressent un vertige et doit s'asseoir, oppressé, le cœur battant la chamade.
Peu à peu, il retrouve une foule de souvenirs vieux de dix ans, avec des émotions aussi vives que celles qu'il éprouvait à cette époque...
On était en juillet. Florian avait alors dix-sept ans et passait ses vacances à Porquerolles. Il y avait fait la connaissance de Phalène. Matinale comme lui, elle pratiquait assidûment le VTT dans les nombreux chemins qui sillonnent l'île. L'après-midi, ils allaient à la plage en famille, s'adonnant au volley ou aux sports nautiques avec quelques autres adolescents de rencontre.
Regardant à distance s'ébattre les jeunes, leurs parents respectifs préféraient le farniente à l'ombre des parasols, sans pour autant se fréquenter. Ceux de Florian, viticulteurs opulents, possédaient une villa en bord de mer – tandis que ceux de Phalène, petits fonctionnaires, louaient un logement modeste au centre du village.
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Phalène
ParanormalVictime d'un grave accident de la route, Phalène est plongée dans un coma profond. Sortie de son corps, elle vient alors retrouver Florian, son grand amour d'adolescence, trop vite perdu de vue dix ans plus tôt. Ils renouent une relation hors du co...