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Lundi 11 mai

Eric et Céline sont partis travailler. Elisa, bien rétablie après son accident de la veille, est à l'école maternelle, non loin du Vieux Port ; Maminette l'y a conduite ce matin, comme d'ordinaire.

Maintenant, elle accompagne Florian rue de Rome, à son rendez-vous chez l'hypnotiseur ; un quart d'heure à pied leur suffit pour s'y rendre.

Dans la salle d'attente, elle le prévient qu'étant son invité, il n'aura rien à payer pour cette séance : elle réglera ultérieurement cette affaire avec son ami Axel. Il proteste vivement ; mais elle lui conseille de réserver son énergie pour la suite du programme, ajoutant :

« Pas trop quand même, car la clé de la réussite est de faire confiance et de se laisser aller. »

Le praticien vient leur serrer la main et s'incline devant Maminette :

« Bonjour, ma chère Zélie. »

« Ah, c'est donc là son prénom », note Florian qui se promet de ne plus l'appeler désormais par le surnom enfantin auquel toute la famille est pourtant habituée sur le bateau.

Puis Axel le fait entrer dans son cabinet, avec des manières très affables. C'est un petit homme d'une soixantaine d'années, à l'épaisse chevelure gris argenté, vêtu d'un strict costume blanc boutonné jusqu'au cou. Ses yeux de jais, perçants, retiennent tout de suite l'attention et pourraient inquiéter si un léger sourire bienveillant ne flottait en permanence sur ses lèvres fines, lui conférant un abord sympathique.

La pièce, tapissée de bleu foncé, reçoit faiblement la lumière du jour masquée par un lourd rideau de velours. On marche en silence sur une épaisse moquette assortie à la couleur des murs. Au centre, un fauteuil et un tabouret constituent l'essentiel de l'ameublement. Sur la cheminée, une lampe en cristal de sel rose diffuse un éclairage apaisant – et sur une étagère, la flamme d'une bougie crée un certain mystère. On entend le lent tic-tac d'un métronome.

Florian est invité à s'installer confortablement dans le fauteuil dont le haut dossier lui cale les épaules et la tête. L'hypnotiseur s'assied sur le tabouret, en vis à vis, et d'une voix agréable lui pose quelques questions concernant son âge, sa profession, ses goûts et loisirs... « sans doute pour s'assurer de mon bon équilibre psychique », se dit Florian, un peu crispé. Viennent d'autres questions quant aux motivations qui le poussent à modifier son état de conscience pour faire un " voyage " hors de son corps. Il révèle alors sa relation très spéciale avec Phalène, et son vif désir de pouvoir la rejoindre.

Axel ne peut lui garantir que ce vœu se réalisera ; il va seulement essayer de l'aider à quitter son enveloppe charnelle, et précise :

Si vous y parvenez, après je ne serai plus là pour vous diriger. La suite des évènements sera de votre seul ressort ; vos initiatives seront en partie induites par votre subconscient...

Quand et comment revenir ici ?

On revient toujours de ce genre de " voyage ". Vous vous retrouverez dans ce fauteuil, dès que vous le souhaiterez ; ce sera instantané. Et si vous tardiez trop, c'est moi qui provoquerais votre retour.

Vous êtes sûr que je ne risque rien ?

Vous me semblez suffisamment équilibré pour tenter l'expérience sans aucun danger. Mais vous pouvez encore changer d'avis ; c'est à vous de décider...

Allons-y, accepte Florian, qui lui fait confiance.

Avec une lenteur étudiée, d'une voix monocorde et d'un ton grave, Axel lui dit alors :

PhalèneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant