Phalène

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Lundi 2 novembre

Lydiane se remet difficilement d'une mauvaise grippe qui l'a beaucoup éprouvée en raison d'inquiétants problèmes respiratoires associés à une température approchant les 40°. Mardi dernier, devant la gravité des symptômes, son médecin avait envisagé de l'hospitaliser, ce qu'elle a refusé.

Au début de sa maladie, afin de pouvoir la soigner, Florian s'est installé chez elle, occupant une chambre d'amis. Quoique reconnaissante des attentions qu'il lui prodiguait, Lydiane était fort gênée de cohabiter en une telle circonstance. Elle craignait d'être contagieuse, et se sentait humiliée de devoir se montrer sous un aspect dévalorisant, se trouvant laide et repoussante.

Contrairement à ses appréhensions, cette épreuve s'est révélée positive, et finalement leur relation en est sortie renforcée. Ils se sentent encore plus proches l'un de l'autre. A présent, Lydiane est sûre de la profondeur des sentiments que Florian lui porte, et qu'il a su lui témoigner, alors même qu'elle redoutait de ne plus lui plaire.

Dans la journée, il ne la quitte que pour aller passer quelques heures chez lui, l'après-midi – à l'arrivée de Mme A qui vient comme d'ordinaire faire le ménage et préparer le repas du soir.

Aujourd'hui, elle est toujours affaiblie, mais n'a plus de fièvre.

− J'espère que je vais bientôt récupérer mon énergie, dit-elle, étendue sur le canapé, vêtue d'un long et chaud peignoir de bain blanc.

− C'est normal que tu manques de forces, Lydiane : tu ne mangeais presque pas.

− Rien ne pouvait passer, à part les fruits.

− Instinctivement, tu sélectionnais ce dont ton corps avait besoin pour se rétablir. Tu buvais beaucoup d'infusions... Je t'en prépare une ?

− Oui, s'il te plaît, Florian... avec du jus de citron et du miel de thym, lui demande-t-elle, confuse de se sentir si languissante.

− Tes bains fréquents et prolongés dans la balnéo ont dû également te faire du bien.

− Depuis ma cure, je ne doute plus des bienfaits de l'hydrothérapie, associée aux huiles essentielles.

Ayant pris ses habitudes à la cuisine, Florian en revient bientôt avec un plateau qu'il pose sur la table basse, et verse la tisane dans deux tasses filetées d'or. Elle le remercie, puis ajoute avec un pâle sourire :

− Je suis soulagée de voir que je ne t'ai pas donné ma grippe.

− J'ai probablement des résistances naturelles... renforcées peut-être par le crudivorisme (qui a fait ses preuves chez mes amis de Marseille).

− Apparemment, c'est efficace.

− Mais parfois frustrant... Maintenant que tu es presque guérie, je vais reprendre une alimentation plus traditionnelle.

Assis l'un auprès de l'autre, ils dégustent leur boisson odorante au bruit léger de la fontaine d'intérieur créant une ambiance zen. Florian, qui a offert hier à Lydiane cet objet décoratif et relaxant (où l'eau s'écoule en une cascade cristalline sur des galets blancs, dans un réceptacle de schiste), apprécie de plus en plus ce logement et commence à s'y sentir chez lui.

« Est-ce le bon moment pour lui apprendre l'existence de Phalène ?... », se demande-t-il, perplexe.

Il hésite encore, se racle la gorge... puis se décide enfin et, d'une voix rapide où perce son sentiment de culpabilité, commence une phrase qui lui semble aussitôt fort mal engagée :

− Je dois t'avouer quelque chose...

− Oui ?

Incapable de poursuivre, Florian renonce à en dire davantage ; il s'en sort avec une pirouette verbale :

− ... Je me sens vraiment bien chez toi !

Le regard de Lydiane, qui s'était un peu obscurci l'instant d'avant, s'éclaire immédiatement ; elle espère qu'il va lui annoncer son intention de s'installer chez elle à demeure. Mais il se contente, en souriant à demi, de lui caresser lentement le dos.

« Mieux vaut qu'elle soit tout à fait guérie pour lui faire une pareille révélation », pense-t-il, sans être dupe de son manque de courage, soi-disant diplomatique.