Le lendemain matin, Kate avait été initiée aux joies du sport. Enfant, elle avait toujours détesté cela mais, aujourd'hui, elle appréciait davantage le fait de pouvoir se défouler pleinement jusqu'à se vider de la moindre de ses forces. De plus, en voyant ses collègues mannequins exécuter les divers exercices proposés dans la salle, elle en était venue à la conclusion qu'il était grand temps qu'elle se reprenne en mains. Ainsi, elle s'était employée à stimuler des muscles trop longtemps oubliés : abdominaux, fessiers, bras et jambes. Ces efforts lui firent un bien fou, tant physiquement que moralement. En effet, jouer un rôle autre que le sien s'avérait plus laborieux que prévu. Alexandra lui aurait d'ailleurs asséné un " Je te l'avais dit ! " si tant est que son amie avait eu le cran de le lui avouer. Au réveil, elle n'avait cessé de ressasser les faits de la veille, son petit tête-à-tête avec Sam, et elle en était venue à culpabiliser et à remettre en question ses motivations. Il faut dire que le bougre n'avait plus rien du bourreau d'antan. Bien au contraire, Kate l'avait trouvé adorable ! Avait-il réellement changé ou était-ce la façade angélique qu'il montrait habituellement à ceux qu'il appréciait ? Dans ce second cas, son côté démoniaque n'était pas, cette fois du moins, dirigé contre la jeune femme, mais vers l'une ou l'autre malheureuse victime. Toutes ces questions s'étaient bousculées dans ses réflexions et elle ne parvenait guère à démêler le vrai du faux. La belle brune aux yeux gris, troublée, avait donc retrouvé ses esprits avec la montée d'adrénaline durant le cours de sport, et s'était décidée à poursuivre son plan. Après tout, Sam n'aurait que ce qu'il mérite. Même s'il avait changé, les évènements passés avaient bel et bien eu lieu. C'était ça la vérité.
La matinée se poursuivit par le cours de cuisine où on devait lui apprendre à préparer des plats sains et à ingurgiter le moins de calories possibles. Kate fut en joie d'apprendre qu'elle pourrait continuer à se délecter de son délicieux chocolat noir spécial moral en vrac. Au menu du jour, avec ses compagnons, elle concocta un tian de légumes à la provençale puis, en dessert, une mousse de fromage frais accompagnée de framboises. Le but du cours était que, à la fin, chacun puisse déguster ses préparations durant la pause de midi. Kate, qui cuisinait déjà bien de base, n'était pas peu fière de ce qu'elle avait fait. Qui plus est, les senteurs qui s'étaient échappées des fours durant ces deux heures s'étaient amusées à titiller son appétit et, maintenant, son estomac criait ouvertement famine. Sa voisine de gauche, nommée Valentine, et son voisin de droite, Esteban, se tournèrent à l'unisson quand ils entendirent son premiers gargouillement sonore. Kate devint rouge de honte et les deux compères rirent en voyant son expression gênée. Désarçonnée par leurs rires honnêtes, Kate se joignit à eux et ils décidèrent de déjeuner ensemble. Quand la professeure leur annonça la fin du cours, tous se précipitèrent dans le grand réfectoire à l'assaut des tables. La jeune femme, accompagnée d'Esteban et de Valentine, optèrent pour une table de quatre personnes apposée à la grande baie vitrée afin de jouir d'un semblant de liberté dans cet endroit confiné. Eux s'assirent côte à côte, en face d'elle. Là, ils en profitèrent pour faire plus ample connaissance. Esteban avait vingt-deux ans et avait fait ses débuts dans l'agence il y a deux ans. Il était issu d'une famille de médecins et c'est tout naturellement que son père désirait qu'il en fasse de même. Mais le jeune homme aux traits hispaniques aspirait à autre chose. Il avait toujours rêvé des podiums et, depuis qu'il était gosse, s'évertuait à cacher sous son lit des dizaines de magazines de mode. Quand, à sa majorité, armé de tout son courage, il annonça à ses parents sa décision de ne pas faire médecine pour privilégier une carrière de mannequin professionnel, ceux-ci entrèrent dans une colère folle et le mirent à la porte. C'est donc avec quelques économies en poche qu'il partit de chez lui. Pendant deux années très difficiles, il frappa à la porte des agences du pays. Sans book de photos, personne ne le prenait au sérieux. Mais quand il arriva ici, à la S-Agency, le miracle opéra et on lui donna sa chance. Depuis, il s'était installé à Liège et vivait humblement de son travail. D'ailleurs, il commençait à se faire connaitre dans le milieu. Selon lui, sa carrière s'apprêtait à décoller, ce n'était plus qu'une question de temps ! Kate, tout en l'écoutant, n'avait pu s'empêcher de remarquer le côté maniéré du beau ténébreux. Aussi pensa-t-elle que les parents de ce dernier n'avaient pu accepter, en plus de son choix de carrière, son coming out. Valentine, quant à elle, du haut de ses vingt-ans, avait toujours connu le monde du mannequinat. Enfant et adolescente, elle avait posé pour diverses marques. C'était un réel rêve qu'elle s'était acharnée à accomplir. La jolie blonde expliqua qu'elle aussi avait été recrutée par l'agence il y a deux ans, trois mois avant Esteban. Elle aussi commençait à avoir du succès et espérait être bientôt engagée sur Paris. Quand leur attention se porta sur Kate, ils lui révélèrent qu'ils avaient d'abord été très étonnés de la voir parmi eux.
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HEEL
ChickLitÀ 25 ans, Kate, jeune enseignante sans emploi, est menacée d'expulsion par le service de chômage. Alors que sa situation parait désespérée, elle se fait remarquer par une agence de mannequinat. Sans y croire, elle se rend sur place et découvre que l...