HEEL - Chapitre 32

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Les weekends sont normalement constitués pour permettre aux travailleurs de se reposer. Toutefois, il semblerait que ce concept fondamental soit inconnu dans le milieu du mannequinat. Et Kate en fit une nouvelle fois le désagréable constat. Hier, elle était rentrée tard du service des urgences où elle avait accompagné Sam dont l'arcade sourcilière, fendue par le premier coup d'Esteban, nécessitait quelques points de sutures. Comme tout le monde le sait, aux urgences, on a le temps de mourir trois fois (au moins !). Ce qui est un comble au vu du nom... Le cas du photographe n'étant pas des plus préoccupants, il dut attendre plusieurs heures, le visage en sang, avant d'être pris en charge par une infirmière des plus antipathiques. Pour le côté social, on repassera également. Toujours est-il qu'à minuit ils purent enfin rentrer respectivement chez eux, affamés et épuisés. Alexandra s'était inquiétée de n'avoir aucune nouvelle de son amie et elle fut d'autant plus inquiète quand celle-ci lui narra ses aventures rocambolesques. La plus grosse des révélations étant bien sûr l'hétérosexualité du mannequin espagnol aux gestes maniérés et aux roulements de popotin tendancieux. Les deux copines conclurent que le proverbe " l'habit ne fait pas le moine " était de rigueur ! En allant se coucher après avoir avalé les restes d'un boulet sauce lapin accompagné de frites ramollies, Kate eut de grandes difficultés à trouver le sommeil. Elle s'agita dans tous les sens, repensant aux nombreux signes qu'elle n'avait pas vus, ou plutôt qu'elle n'avait pas voulus voir : les invitations à manger en tête à tête, la forte proximité parfois tactile (enlacements, embrassades), les compliments, la nuit passée ensemble puis le lendemain (mon Dieu ! il l'avait vue nue sous la douche !), les immiscions entre Sam et elle, la froideur avec laquelle il s'adressait au photographe,... En y repensant, jamais il ne lui avait dit être homosexuel ! Mais alors, peut-être l'avait-elle allumé sans le vouloir ! Elle se sentait honteuse, à la fois traitresse et trahie. Après tout, il était son ami. Par respect pour elle, il aurait pu s'y prendre autrement. Mince ! Elle n'était pas un objet tout de même ! Avait-on idée de se jeter ainsi sur quelqu'un ? Elle avait été heureuse que Sam intervienne... un peu trop hargneusement, certes. Mais n'était-ce pas là une preuve qu'il tenait à elle ? Il faudrait quand même qu'elle lui avoue tout ce qu'elle avait fait, ainsi que son identité. Il avait changé, il la comprendrait certainement et lui pardonnerait. Leur relation serait préservée et pourrait continuer sur des bases saines. Alors qu'elle rêvait d'un avenir aux côtés de Sam, avec un ou deux enfants, un garçon et une fille pour faire la bonne paire, dans une belle maison avec jardin et tout le toutim, le dernier tube de Bruno Mars rompit le silence de la petite chambre. A côté d'elle, Alexandra remua et grogna. Kate observa lascivement son smartphone : Dix heures. Qui pouvait bien lui téléphoner un samedi et interrompre sa grasse matinée ?! 

     -   Allô ? décrocha-t-elle à demi endormie, furieuse d'avoir dû émerger d'un songe merveilleux dont elle avait déjà tout oublié.

     -   Dans mon bureau ! Tout de suite ! hurla de sa voix grave Monsieur Cumonte vibrant de colère avant de raccrocher violemment.

Kate demeura pétrifiée, allongée telle une momie endrapée, son portable sur le coeur. Qu'avait-elle pu faire ? Paniquée, elle se précipita dans la salle de bain, brossa ses dents à la hâte puis se contenta d'appliquer de la BB crème et du mascara. Une fois vêtue des premiers fringues qu'elle extirpa de sa garde-robe (un jeans et un pull banals), elle sauta dans un bus en route pour la gare. 

Elle arriva au bureau de la direction essoufflée, au bord de la syncope. Sam, penaud, était assis sur l'une des deux chaises en face du bureau massif. Le couple s'adressa furtivement un regard apeuré. Pourquoi les avait-on convoqués tous les deux ? Assis lui aussi, le Directeur à l'humeur massacrante l'attendait.

     -   Asseyez-vous ! abboya-t-il à son attention. 

Kate obéit. Jamais elle ne l'avait vu dans cet état. Son patron, d'ordinaire si sympathique, était véritablement effrayant. Aussi n'osa-t-elle rien dire et préféra attendre que ce soit lui qui démarre les hostilités. Pour cela, elle n'attendit pas longtemps. Le Directeur jeta devant eux une pile de magazines fraichement parus et d'articles internet imprimés par ses soins. Sous ses yeux écarquillés de stupeur, Kate reconnut plusieurs situations photographiées et commentées par les journalistes ou chroniqueurs people qui s'en étaient donné à coeur joie.

Paris : Deux mannequins du défilé Versace se battent dans un club à la mode ! - Paris : Le célèbre photographe Sam Janssens se laisse aller durant le diner officiel de Versace ! - Paris : La nouvelle égérie de Versace entretient une aventure avec le photographe Sam Janssens dans un hotel huppé de la capitale ! - Paris : Le défilé Versace saboté par la mannequin Valentine Dejardin ! - Liège : Le triangle amoureux de Kate Chot : Sam Janssens se bat pour elle ! Plus qu'une aventure ?

Les titres à scandale se bousculaient, laissant le jeune couple désemparé. Le Directeur, qui n'y tenait plus, reprit rageusement.

     -   J'ai déjà renvoyé l'autre grande blonde... Vous êtes une honte pour mon agence ! Vous, monsieur Janssens, j'aurais dû vous licencier depuis longtemps ! Que j'ai été naïf de ne pas écouter les conseils d'Arabella... Quant à vous, petite écervelée ! Vous pouvez dire adieu à votre carrière. Vous êtes finis, tous les deux ! Dégagez d'ici ! Et ne revenez plus jamais ! cria-t-il sans reprendre sa respiration, agrémentant ses phrases de postillons véhéments et frappant du plat de ses deux mains la surface plane en bois laqué.

     -   Je vous en prie, laissez-moi tout vous expliquer ! supplia Kate dans une tentative désespérée de sauver au moins la carrière de Sam.

     -   Dehooors ! s'époumona le patron écarlate.

Les amants déboussolés filèrent sans plus attendre. Il ne servait à rien d'essayer de raisonner un dément. La jeune femme promit à Sam de revenir plus tard pour retenter le coup. Sa tête tournait. Elle chancela, mais le blond, balafré et contusionné, la retint. Il lui proposa d'aller prendre l'air, ça leur ferait du bien après le savon qu'ils venaient de se prendre. En la soutenant par la taille, ils prirent l'ascenseur pour le septième étage. 

     -   Tu te rappelles ? demanda Sam. C'est là que tout a commencé. Tu avais filé par ici pour rejoindre le toit et moi je...

     -   Chut ! lui intima Kate en posant une main sur son torse pour le stopper. Tu entends ça ?

Ils avancèrent furtivement, en mode ninja, plus avant dans le couloir désertique. Les échos émanant de l'un des bureaux de stockage furent plus nets, plus francs.

     -   Han han... Hmmmm oui  ! Oooohmmmm han han... Encore... 

Les halètements étaient murmurés par une voix grinçante que les deux amoureux connaissaient fort bien. La question sur ce qu'il se passait ne se posait pas. Mais avec qui pouvait bien être Cruella ? Et, surtout, qui osait coucher avec elle ? Quelqu'un de l'agence ? Poussés par la curiosité, le grand blond et la petite brune passèrent lentement leurs têtes dans l'embrasure de la porte pour les retirer précipitamment, consternés. Cette vision d'horreur les hanterait certainement toute leur vie... Sur une pile de cartons, Cruella faisait l'amour avec Esteban ! Soudain, Kate saisit la main de Sam et resserra son étreinte brièvement pour qu'il la regarde dans les yeux. Alors, en un éclair, tout devint limpide.

 Alors, en un éclair, tout devint limpide

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Bonjour chers lecteurs !

Mille excuses pour ces halètements si mal joués ! (rires) Je me suis sentie ridicule en les écrivant, mais en même temps ça se voulait un peu drôle. Est-ce réussi ?

Parvenez-vous à recoller les pièces du puzzle ? J'ai fait en sorte que tout se tienne depuis le début, laissant des indices ça et là, espérant que vous deveniez de vrais petits Sherlock en herbe :p

Mais attention, niveau rebondissements, ce n'est pas terminé. Alors accrochez-vous ! Kate a-t-elle renoncé à sa vengeance ? 

Pour le savoir, rendez-vous dans les prochains chapitres :D

HEELOù les histoires vivent. Découvrez maintenant