1. Je ne veux pas oublier

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Une branche qui craque, le souffle d'un vent sifflant à travers les bois, le bruit de ma respiration qui s'affaiblit, mes pas lourds sur le sol. Telle est aujourd'hui ma vie, se réveiller et s'endormir la peur au ventre, et se sentir seule, désespérément seule.
Deux ans, celà fait maintenant deux ans que je ne suis plus qu'une partie de moi même. Un sentiment de vide parcourt mes bras nus. Il ne fait pas très froid aujourd'hui et le soleil éclaircit l'horizon, mais sans une veste me recouvrant je me sens à la merci du moindre danger.
Je dois trouver de la nourriture, de l'eau et une veste.. une veste..

C'est plutôt ironique : les oiseaux chantent et la température a dû dépasser les 20 degrés depuis maintenant quelques semaines, et je cherche pourtant plus un habit pour me couvrir que quelque chose à manger, car le mal psychologique est plus fort que le mal physique..
Je veux seulement me cacher, me chacher de ce monde, de la peur, mais surtout de moi même depuis ce que j'ai fait il y a maintenant 2 ans...

La forêt semblait s'étendre à perte de vue, et plus je m'enfonçais plus je me demandais si elle aurait une fin.
Je n'ai jamais aimé être en forêt, l'atmosphère qui y reigne faisait remonter mes peurs d'enfant, mais c'était maintenant de loin l'endroit le plus sûr, le plus calme et le plus reposant.
Inlassablement, je passais ma main sur ma ceinture, au niveau de la poche de mon couteau, je l'effleurai et poussai un petit soupir de soulagement : il était toujours là.
Un geste qui était devenu une manie, vérifier à tout moment que je sois en sécurité, ou plutôt capable de me défendre en cas de danger, ce qui en soit se résumait à : n'importe où et n'importe quand.

Je marchais sans but depuis plus de deux jours, et je pris la désicion de reprendre mon souffle contre un arbre.
Assise dans l'herbe j'en profitais pour faire un état des lieux de ma tenue : hormis le fait que j'étais couverte de boue, mon jean noir semblait en tout cas en meilleur état que mon débardeur bleu marine, et même si j'avais été fière de trouver de superbes rangers noires censées s'adapter à tout type d'efforts, elles n'avaient cependant pas tenu le coup face à mes nombreuses heures de marche aussi bien dans la boue, à travers les ronces que dans l'eau.

Je soupirai puis décidai de déballer mon sac en espérant pouvoir faire l'inventaire de mes affaires tranquillement.
Mais la vue de mes réserves ne fit que serrer d'avantage mon coeur qui était déjà au bord de la rupture : un petit matériel de toilette m'avait toujours permis de rester dans le seuil limite de la propreté, je gardais une couverture pour dormir où je le voulais mais ce qui m'inquiétait le plus était mes réserves alimentaires : la bouteille d'eau que je conservais depuis des mois était vide, et l'eau de pluie n'était cette fois plus là pour me secourir. Il me restait toute fois une boîte de converse.

Bon sang, je m'étais toujours promise de garder le meilleur pour la fin, mais évidemment je ne tiens jamais mes promesses. Et puis c'était cette tablette de chocolat qui m'appelait alors que j'essayais de l'ignorer !
Tant pis, je regardais avec dégoût l'étiquette vieillie entourant la conserve : endives sauces tomates. Mais qui avait pu inventer un mélange pareil ?

J'aimais bien encore prendre le temps de m'énerver contre des choses futiles, parce qu'au fond celà ne me dérangeait pas, c'était de la nourriture, et j'avais arrêté il y a bien longtemps d'être difficile.

Je bouclai mes bagages et me relevai prête à accomplir ma mission : continuer de me perdre en fôret.

Alors que jusque là je la réussisais à merveille, je vis se dessiner devant moi une maison de campagne, cachée parmis les branches. Je m'avançai d'un pas incertain, et je pus la découvrir plus amplement. Celle-ci était faite de bois qui avait été repeint en blanc, et tout autour d'elle je remarquais d'autres maisons : un petit quartier à la lisière d'une forêt.
Mon coeur fit un bon dans ma poitrine : j'avais l'espoir de trouver de quoi manger et boire. Un endroit où dormir.
Il y en avait beaucoup dans la région, à Sallet, enfin d'après ce que me racontait ma grand-mère, qui avait toujours rêvé d'une de ces maisons là.

▪ Fuir ne vous sauvera pas ▪ Carl GrimesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant