12. Stay...

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Je voyais flou, j'étais en état de choc.

Non...

Deux hommes maîtrisèrent Ron, qui ne semblait pas réaliser ce qu'il venait de faire.
Je ne voyais pas son visage car il se débattait, mais je tenais fermement mon couteau dans ma main droite, respirant à plein poumon : si je devais dégainer cette arme ce serait exclusivement pour lui.
Rapidement, Denise avait accouru auprès de Carl, aidé de Aron qui le portèrent par ses bras et ses jambes puis coururent jusqu'à l'infirmerie.

Pas ça...

Denise avait changé du tout au tout : elle hurlait des ordres et déjà plusieurs habitants s'activaient en direction de l'infirmerie de fortune.
Je repris mes esprits, négligeant la colère qui brûlait en moi :
La vie de Carl était bien plus importante que la mort de Ron.

Je m'élançai à toute vitesse vers le centre médical, et à la moitié du chemin j'avais déjà dépassé tout ceux qui étaient partis avant moi.
J'ouvris à la volée la porte, le battant claqua contre le mur adjacent.
J'avais retenu les consignes de Denise, mais lorsque je cherchais le matériel sur les étagères, mes mains ne s'arrêtaient pas de trembler, le stress faisait larmoyer mes yeux. J'allais de toute évidence craquer. Une main rassurante se posa alors sur mon épaule : Glenn était venu aussi vite que possible, il n'avait pas assisté à la scène, j'avais appris que de son côté il était allé sauver maggie qui était en danger.
-Ça va aller, on va le soigner. Il va s'en sortir, me rassura t-il.
Mais lui même avait la voix qui tremblait.
-Et Maggie ça va ? Demandai-je le souffle court.
-Elle va bien ne t'inquiètes pas. Elle se repose. Je... j'irais lui expliquer la situation après..
-D'accord, dis-je entre deux respirations.
Glenn me prit par les épaules, m'enveloppant de sa douceur apaisante.
-Viens avec moi, on va aller attendre dans la maison tous les deux.
-Mais....
-Que tu sois là n'arrangera pas son état, viens avec moi.
Je cédai et l'accompagnai en dehors de l'infirmerie, tandis qu'il me soutenait par les épaules afin que je ne tombe pas.
Les déplacements des habitants autour de Denise affluaient, mais la pression était déjà redescendue d'un cran : Carl respirait et Denise allait faire tout ce qui était en son pouvoir pour lui permettre de continuer aussi longtemps qu'elle le pouvait.

On se retrouva dans mon salon à  parler, Glenn et moi. Cette conversation me fit énormément de bien. J'avais besoin de parler à un adulte, de ressentir une protection, de me rappeller que je n'étais pas seule. Je lui confiais tout ce que j'avais sur le coeur, le fait que je me sentais affreusement coupable, que ma seule envie était d'égorger Ron et que j'aurais dû faire quelque chose.
-Tu n'aurais pu rien faire Sarah, rien.

La porte s'ouvrit sur Tobin. Son visage était pâle et fatigué. Comprenant qu'il avait coupé notre conversation, il s'arrêta net sur le pas de la porte. Mais Glenn lui fit signe qu'il pouvait continuer :
-Son état est stable mais.... on ne sait pas encore si il va se réveiller.. il est dans le coma pour l'instant.
Je serrai Glenn dans mes bras, et me reculant je lui expliquai que j'allais rester un peu avec Carl. Il approuva d'un hochement de tête et passa une main dans mes cheveux.
-Ça ira, ne t'inquiètes pas.
-J'espère...
Il m'embrassa sur le front, puis me laissa partir.

Dans la petite chambre, allongée sur le sol, je fixais indéfiniement le plafond, l'esprit vide.
Maggie passa dans l'après midi, prenant de nos nouvelles à tous les deux.
Le lendemain, Denise passa pour nettoyer son oeil. J'avais passé la nuit làbas, à vrai dire depuis que j'étais rentrée dans cette chambre je n'en étais pas ressortie.
-Tu devrais aller prendre l'air un petit peu, me dit-elle gentillement.
-Je viens juste d'arriver, lui répondis-je en lui rendant son sourire.
-D'accord. Elle me sourit mais me donna un plateau repas, celui qu'elle aurait donné à Carl si il s'était réveillé.

Deux jours s'était désormais écoulés, sans que je ne sois une seule fois sortie de cette chambre. Je répétais à tous les gens qui rendaient visite à Carl que je venais à peine d'arriver pour ne pas les inquiéter.
Je n'avais pas vu Ron depuis et c'était tant mieux. D'après Tobin, il était enfermé en attendant de rétablir la situation.
On était le troisième jour, je ne m'étais déchargée de aucun des sentiments qui m'envahissaient, je continuais de fixer un point dans le vide, les yeux dans le vague.

Je ne faisais que repenser à ce que Carl voulait me dire avant que tout bascule.
J'aurais tellement aimé le retenir, lui laisser terminer sa phrase...

Une heure avait passé : j'étais allongée sur le sol, les jambes pliées en angle droit et posées sur le lit.
Une heure de plus : je faisais les cents pas dans la chambre.
Encore une heure : je m'étais assise sur une chaise, les coudes posés sur mes genoux, le visage entre les mains.

-Je t'en supplie... réveille toi... marmonnai-je. Ne me laisse pas seule maintenant... surtout pas ici.. s'il te plaît s'il te plaît..." Je sanglotais désormais. Une vague de douleur tourbillona au creux de mon ventre.
J'aurais voulu hurler, mais aucun son ne sortait de ma bouche.

Encore une fois, j'avais négligé les risques, j'avais une fois de plus laissé quelqu'un se mettre en danger à cause de moi, ça aurait dû être moi, ça aurait dû être moi..
Je me levai d'un bond et frappai le mur.
Avec force, aussi fort que je le pus.
Et je recommançai.
J'enchaînais les coups de poings comme si ce mur venait de prendre la vie de Carl, comme si ce mur était moi. J'avais le souffle court et sûrement le visage rouge.
Je m'arrêtai quand je vis une tâche de sang tomber le parquet, je regardais mes mains bleutés et ouvertes. Je voulais me faire mal, me punir de toujours laisser les gens que j'aime dans des situations atroces, de ne pas réagir au bon moment.

Je me laissai glisser le long du mur épuisée et, pour la première fois depuis me sembla t-il une éternité, je pleurais.
Je pleurais toutes les larmes de mon corps, l'état de Carl, le fait que Michonne et Rick n'étaient même pas au courant, mais aussi tout ce que j'avais affronté avant : la perte de mes parents, de mon frère et de ma soeur, des gens que j'aimais... Ce monde là que je ne supportais plus, et la désillusion de toujours retomber plus bas que terre alors que l'on pensait que tout s'était enfin arrangé.
Et la seule personne qui pouvait m'aider à me sentir mieux était allongée à côté de moi, inconsciente.

Mes mains, tout mon corps, mes lèvres tremblaient, je les mordis jusqu'au sang, levant les yeux au ciel pour retenir un nouveau flots de larmes, en vain. Je rammenai fébrilement mes jambes contre mon torse, me balançant d'avant en arrière, répétant les mêmes mots :

-Réveille toi, je t'en supplie, réveille toi...
J'essuyai mon nez qui avait coulé, me relevai et m'approchai de son lit. M'asseyant sur la chaise, j'enveloppai sa main dans la mienne :

-Je suis tellement désolée...
Et soudain, comme dans mes rêves, sa main ressera la mienne.
Il bougeait.
Je n'arrivais pas y croire, je devais vraiment rêvé : j'avais imaginé cette scène tellement de fois !
Pourtant je dus me rendre à l'évidence lorsqu'il ouvrit difficilement les yeux, enfin son oeil...

Je lâchai un cri de surprise, portant mes mains à ma bouche, pleurant pour la énième fois de la journée.
Même si ma voix tremblait, je réussis à parler :

-Hey....
Je voulus carresser ses cheveux, mais lorsque je passai mes doigts sur le haut de son visage, il eut un mouvement de recul et s'écarta.

-Oh excuse moi, je ne voulais pas te faire peur...
-C'est pas grave, il me sourit. Tu es là depuis combien de temps ?
-Je viens juste d'arriver, lui répondis-je en lui rendant son sourire.
Regardant la couverture posée au sol et le plateau repas, il reporta son regard sur moi :
-Je ne te crois pas, fit-il avec un sourire aimable.
Un sourire trop aimable, comme si il était gêné que je sois là.

Il m'observa et fronça les sourcils. Il semblait chercher ses mots, et l'immense reconnaissance et la joie et que j'avais éprouvé quelques minutes plus tôt se dissipaient peu à peu.
Sa réaction m'inquiétait.
Il me regarda une nouvelle fois, prenant un sourire forcé :

-J'aimerais au moins connaître le nom de celle qui a veillé sur moi.

Et le monde bascula.

▪ Fuir ne vous sauvera pas ▪ Carl GrimesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant