Assis sur un banc de béton, face à la plage et à l'océan, Steven Lyner dégustait une glace à la vanille lorsqu'il sentit son téléphone vibrer. Se contorsionnant pour le sortir de sa poche sans avoir à se lever, il lut le message qui lui avait été envoyé :
« Je suis chez toi, ramène-toi... changement de plan ! »
Soucieux, il continua de lécher machinalement sa glace tout en réfléchissant. Connaissant la personne qui avait écrit cela, il était fort possible qu'elle soit réellement entrée chez lui... et qu'elle l'attendît, vautrée sur son canapé, ses pieds sur la table basse et un air narquois sur le visage.
Mais soit elle se fichait de lui et il avait donc tout intérêt à ne pas rentrer dans son jeu, soit il y avait vraiment du nouveau et ne pas en prendre connaissance pourrait avoir des conséquences désastreuses.
Finalement, il termina sa glace et se leva, se disant qu'il était préférable de perdre une heure et demie que de risquer la colère de certaines personnes haut placées. Il traversa le parking qui bordait la plage, monta dans sa voiture et démarra. Il rejoignit rapidement la route principale et s'y inséra facilement grâce au peu de circulation du milieu d'après-midi. Se retrouvant bientôt dans les artères plus denses de la ville, il profita d'un arrêt à un feu tricolore pour allumer la radio et écouter les nouvelles.
L'animateur n'avait rien de nouveau à rapporter, mais Steven savait que d'ici le lendemain, ça allait fortement changer. Il ne pouvait pas prétendre ne pas être inquiet, car l'opération lui paraissait insensée, mais il ne pouvait rien faire d'autre qu'espérer que tout se déroule pour le mieux. Et il espérait donc que Samantha lui faisait une blague et que s'il s'avérait qu'elle était bel et bien entrée par effraction dans son appartement, ce n'était que pour se moquer de lui.
Ayant garé son véhicule dans le parking souterrain de son immeuble, il sortit de la boîte à gants son pistolet et le passa à sa ceinture avant de verrouiller sa voiture et d'appeler l'ascenseur.
Quand il se retrouva enfin à son étage, la première chose qu'il remarqua fut que sa porte d'entrée était ouverte. Sortant son arme, il avança doucement dans le petit vestibule et déboucha silencieusement dans le salon.
Samantha, assise comme prévu sur le canapé, lui fit négligemment signe de la main de baisser son flingue :
— Range ça, tu vas te blesser. Je sais que t'es pas très vif, et ça se voit... On peut pas dire que tu te sois dépêché de venir !
— Si j'avais eu besoin que tu testes la qualité de ma serrure, je te l'aurais demandé, répliqua froidement Steven en déposant son pistolet sur un meuble. C'est quoi ton problème ?
— Pauvre chouchou. Va me chercher un truc à boire et ensuite on discute, d'accord ?
— C'est ça, oui, fit Steven en s'asseyant sur une chaise en face d'elle. Vas-y, crache. Fais comme si tu étais la voix messianique de Scire et raconte-moi tout. Et enlève tes pieds de la table.
Samantha s'assit correctement avec mauvaise grâce :
— C'est monsieur Scire pour toi, raclure. Et ne t'inquiète pas, c'est très simple, même toi tu pourras comprendre. Ce soir, tu feras pas le taxi. J'avoue, c'est surprenant, mais apparemment le boss pense que tu es capable de faire plus qu'attendre bêtement dans ta voiture et d'appuyer sur l'accélérateur quand on te le demande. Ce soir, tu es l'équipe dix-sept.
— Je suis l'équipe dix-sept ? répéta Steven.
— Bravo. Ton objectif, c'est une galerie d'art privée, la galerie J. S. Wood. On se fiche de savoir pourquoi Scire lui en veut. Et on se fiche aussi des tableaux, au passage, mais au deuxième étage, Wood entrepose des objets très sympas, dont une pièce unique, qui ressemble à ça...
Elle sortit plusieurs photos d'une pochette et les déposa sur la table :
— ...et qui est ton objectif.
— Un collier ?
— C'est plus un mélange entre une parure et un morceau d'armure, mais c'est pas important. Ce qui est important, c'est que l'alliage utilisé est très rare, donc très cher, que la pièce est très ancienne et que tu vas la voler. Bon, voici les plans du bâtiment, expliqua Samantha en sortant d'épaisses feuilles de papier de son sac et en les étalant bien à plat. Même avec la coupure d'électricité, tu ne franchiras pas la porte principale de la galerie, elle est trop bien conçue. Et la pièce où sont entreposés les objets ayant le plus de valeur n'a qu'une entrée.
— Comment je suis supposé y accéder, alors ?
— Heureusement que les professionnels y ont pensé pour toi, et c'était pourtant tout simple : tu montes sur le building d'à côté, tu rejoins le toit de la galerie, tu brises une fenêtre, tu atterris au deuxième et tu leur fais le coup du conduit d'aération. Classique, mais efficace.
— La chambre forte est accessible depuis la pièce d'à côté en passant par un conduit d'aération ? Ça me paraît débile. Mais après tout, le plan entier me paraît débile.
— La façon dont est conçu l'étage est stupide, oui, mais si tu tentais ça maintenant, tu serais filmé, et tu aurais les flics sur la tronche en moins de deux. Le plan n'est pas débile, il n'est pas compliqué, c'est tout.
— Si je tentais ça maintenant, je n'aurais qu'à passer par la porte, la galerie doit être ouverte à cette heure-ci.
Samantha lui jeta un regard froid, puis se leva :
— C'est ça, fais le malin. Fais le malin, mais t'as intérêt à obtenir des résultats.
— Sinon ? questionna agressivement Steven.
— Ne pose pas de questions auxquelles tu ne veux pas de réponses, Steven, lui rétorqua l'autre en le toisant. Mets-toi au boulot, plutôt.
Elle ramassa son sac, et, sans un regard en arrière, sortit de l'appartement.
Steven s'affaissa contre le dossier de sa chaise, soupira. Il contempla les plans et les photos sur la table. Même s'il ne l'avait pas provoquée, Samantha ne l'aurait pas aidé davantage, il en était sûr. Cette fille le détestait, et il n'avait jamais compris pourquoi.
Soupirant une deuxième fois, il se résigna à suivre son conseil et se mit au boulot.
VOUS LISEZ
Syol - Parallèle Zéro
FantasySix personnes. Un monde inconnu. Pas la moindre indication. À l'origine, elles vivaient chacune leur vie de leur côté, avec leurs rêves et leurs peurs. Mais sur Syoliqa, dans le Parallèle Zéro, leur passé ne compte pas. Les idéologies n'ont plus de...