Syol - Parallèle Zéro

Chapitre 11.1 - La fugitive

/// Entrée automatique de journal 131285, 5125/08/01 09:18:00. Temps écoulé depuis l'activation de l'unité NOVATEK AA-AI MKI : 30 jours. État du coordinateur : en vie. État des liens avec les contrôleurs : stable. État de l'entité opérationnelle : morte. ///

— Arrête ça, gronda-t-elle à voix basse.

Elle ne supportait pas que le coordinateur s'obstine à vouloir continuellement entrer des lignes inutiles de données dans sa mémoire. Surtout qu'elle était obligée de les lire et que ça lui rappelait à chaque fois qu'elle avait dû tuer pour en arriver là.

Mais voilà, les informations, protocoles et accès récupérés ne contenaient rien sur les fonctionnalités du contrôleur et les manières de les désactiver.

/// Entrée automatique de journal 131286, 5125/08/01 09:19:00. Temps écoulé depuis l'activation de l'unité NOVATEK AA-AI MKI : 30 jours. État du coordinateur : en vie. État des liens avec les contrôleurs : stable. État de l'entité opérationnelle : morte. ///

Arrête ! hurla-t-elle intérieurement.

La manière stupide dont les données étaient consignées dans le journal ne l'aidait pas du tout. Pourquoi le coordinateur évaluait-il l'état de l'entité opérationnelle en termes de vie ou de mort ? Qui était le sombre idiot qui avait trouvé amusant d'incorporer cette fonction au moment de la conception, au lieu d'un simple statut actif/inactif ?

Ça n'était certainement pas drôle, pour elle c'était même tragique. Mais elle ne pouvait rien y faire. Arrêter le coordinateur tout entier, ça revenait à ne plus vivre. Arrêter le coordinateur, c'était se suicider.

Pour autant, elle se serait bien passée de tous ces messages inutiles. Elle ignorait même à quoi faisait référence la date, qui ne lui semblait pas logique. Peut-être le coordinateur était-il endommagé ?

L'entité opérationnelle, elle, aurait su à quoi correspondaient les chiffres. Tout ce qui touchait au monde humain, tout ce qui pouvait l'aider à mieux remplir sa fonction, elle devait l'enregistrer.

Mais elle ne pouvait plus lui poser la question, puisqu'elle l'avait tuée. Elle l'avait bel et bien tuée !

Elle avait voulu se sentir humaine. Jusque-là, elle se sentait surtout bien misérable. Était-ce un bon début ? Non !

Elle y avait cru, l'espace de quelques secondes. Mais l'illusion s'était dissipée, et depuis elle ne ressentait que des regrets, de la peine, de la haine. De l'incompréhension.

Qu'est-ce qu'elle faisait là ?

Pourquoi cette maison de pierres, grise et abandonnée ?

Elle se leva et marcha vers la fenêtre aux carreaux brisés, entrant dans le halo de la lumière du jour et sentant soudainement la chaleur du soleil sur sa peau.

/// Entrée 131287, 5125/08/01 09:19:52. Changement de température de +8 degrés signalé par le contrôleur corporel principal. ///

Elle ne releva même pas. Si le coordinateur avait été doué de facultés supérieures, elle aurait pensé qu'il se moquait d'elle. Mais non, ce n'était qu'un bête dispositif glorifié qui ne faisait que suivre des instructions préprogrammées.

Alors qu'elle...

Qu'était-elle ?

Elle passa sa main dans ses cheveux d'un geste léger, sentant, sous ses doigts, autant la douce matière organique que la rugosité d'un paradoxe.