Chapitre 11.4 - Le détroit

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— Vite ! pressa Steven.

Nova et lui traversèrent hâtivement l'espace dégagé, habituellement réservé aux marchandises, qui les séparait du quai où était amarré l'Aramian.

Le navire à l'aspect robuste avait quelque peu perdu de sa superbe depuis qu'ils l'avaient quitté, à peine une heure plus tôt : ses deux mâts gisaient sur l'embarcadère avec l'ensemble de la voilure, tandis que sur le pont, leurs compagnons s'affairaient à détacher et mettre de côté tous les câbles et cordages restants.

Ces modifications radicales étaient la conséquence les remarques qu'avait faites Gheor, lorsqu'ils étaient parvenus à la ville côtière ce matin-là, à propos de l'absence d'équipage pour les aider en mer.

Ses réflexions étaient légitimes : le Scaripioso avait été manœuvré par des marins expérimentés depuis son départ de Denevrios jusqu'à son naufrage. Un voilier n'était pas une péniche, et l'océan n'était pas le fleuve au courant régulier qu'ils avaient descendu jusqu'à Cleora, donc il se demandait comment les deux Eles avaient envisagé leur trajet jusqu'à Icataïl.

Evolène lui avait répondu qu'elles y avaient déjà songé et que leur plan impliquait de modifier un navire existant afin de le rendre plus aisément dirigeable. L'Aramian avait été choisi parce qu'il était de toute façon le seul candidat — le port était en effet à l'image de la ville, c'est-à-dire désert, ce qui n'avait rien d'étonnant puisque le groupe était suivi par une armée entière qui venait vers eux lentement, mais sûrement.

C'est donc en arrivant, qu'ils avaient découvert que les habitants, prudents, avaient préféré éviter les retombées d'une éventuelle confrontation en évacuant les lieux. Les neuf Élus et leurs deux alliées ne s'en étaient pas plaints, car leur tâche n'en était que facilitée. Après avoir investi l'endroit, Sinirielle, Nova et Steven s'en allèrent surveiller les abords de la cité tandis que le reste de l'équipe s'employait à reconfigurer le deux-mâts.

— Voilà Sini, fit Steven en désignant l'Ele, qui venait d'apparaître plus loin sur le quai et venait dans leur direction.

Lui-même et Nova n'étaient plus qu'à quelques mètres de la passerelle qui reliait le pont de l'Aramian à la terre ferme et Flamos les héla depuis le navire :

— Vous êtes déjà de retour ? Ils sont là ?

— Leurs éclaireurs, oui ! répondit Steven. Mieux vaut ne pas trop traîner ici, le reste ne va pas tarder !

Comme Sinirielle arrivait à la hauteur du gaillard avant, Evolène lui demanda si elle aussi avait vu quelque chose. La chasseresse répondit par l'affirmative en confirmant la présence de cavaliers dans les champs environnants, ce qui conduisit sa sœur à ordonner le départ :

— Vous avez entendu ? Il faut qu'on bouge ! Balancez sur le quai tous ces cordages et tout ce qui encombre le pont, on y va !

Nova se précipita à bord et aida Sinirielle à ramener la passerelle en bois, avant d'aider au ramassage de débris et autres objets inutiles tandis que ses compagnons s'agitaient autour d'elle. La fébrilité ambiante monta d'un cran lorsqu'apparurent plusieurs silhouettes en haut des collines qui s'élevaient derrière la ville, signe que les forces armées envoyées après eux étaient proches.

Proches, mais pas assez pour représenter un danger pour les Élus, car l'Aramian était prêt à partir. Tout d'abord, l'ancre fut levée par Kardal. Ensuite, après quelques secondes, un soubresaut se fit ressentir et le vaisseau quitta le port, fendant silencieusement les flots à grande vitesse, poussé en avant par la force constante que lui insufflait Invear, immobile sur le château arrière.

Syol - Parallèle ZéroOù les histoires vivent. Découvrez maintenant