Syol - Parallèle Zéro

Chapitre 12.4 - Eaal

Même s'il s'agissait de son second passage à travers un portail, Eaal n'y était pas vraiment préparée. Elle perdit l'équilibre en sortant et se reçut, avec un petit cri de surprise, à quatre pattes sur le sol recouvert de sable.

Malgré sa confusion, elle eut le réflexe de s'écarter immédiatement du chemin, ce qui s'avéra être une bonne idée puisque Kardal apparut au même endroit moins d'une seconde plus tard.

La guérisseuse s'épousseta tout en se redressant et regarda autour d'elle. Fini, l'espace et la lumière, ils se trouvaient dans une pièce sombre et en mauvais état qui ne lui inspirait rien de bon.

— Par les Cercles, c'était quoi ce truc ? s'exclama Iria.

— Probablement l'une des raisons pour lesquelles cet endroit n'a pas une très bonne réputation, répondit Crys en observant les environs grâce aux émetteurs de lumière intégrés à son casque. Ça commence à donner aux légendes un peu de tangibilité.

Invear se matérialisa derrière eux :

— Juste à temps, souffla-t-il. Ce piège électrique était inarrêtable et se rapprochait un peu trop à mon goût. Tout le monde est là ?

— Non... Où est Gheor ? demanda Eaal d'une voix pressante après avoir parcouru l'ensemble du groupe du regard sans y trouver la silhouette du militaire.

Steven ouvrit la bouche, sembla se raviser, la regarda brièvement et finit par articuler :

— Il est mort.

— Quoi ? s'égosilla Flamos.

— Non... comment ? s'enquit Sinirielle, horrifiée.

— Je crois que lui et son reflet se sont entre-tués. C'est ma faute, déclara Steven, sa voix se brisant. Jamais ça ne serait arrivé si je ne lui avais pas donné l'une de mes armes.

Eaal se tourna immédiatement vers le portail, prête à retourner en arrière, mais elle dut se rendre à l'évidence — il s'agissait d'un sens unique.

— Tu ne peux pas dire ça, Steven, affirma Evolène. Tu ne peux pas t'en vouloir. C'est un ensemble de circonstances dont il a été victime, pas d'une cause unique dont tu serais, toi, responsable.

Eaal était en partie d'accord avec l'Ele. La mort de Gheor n'était effectivement pas de la faute de Steven, c'était en réalité de la sienne. Le Créateur l'avait engagée sur ce chemin pour une raison, il lui avait confié ses compagnons pour qu'elle fasse de leur protection, et de leur survie, sa mission... et voilà que l'un d'entre eux était mort.

Gheor. Un homme relativement âgé, usé par les guerres et les années, qui ne voulait que rentrer chez lui pour retrouver sa famille et qui ne pouvait tolérer n'être qu'un pion baladé par des forces qui le dépassaient.

Sans qu'elle soit directement celle qui lui avait ôté la vie ou qui l'avait originellement envoyé sur Syoliqa, elle avait tout de même manqué à la tâche divine qui lui avait été confiée.

— Ce sera dur, mais on ne doit pas se torturer avec ça, fit sombrement Crys. Gheor, même s'il imaginait sûrement parvenir jusqu'au bout de toutes ces épreuves, en connaissait les risques. Quant à nous, il faut qu'on se concentre sur ce qui est encore à venir.

La guérisseuse acquiesça intérieurement — c'était parfaitement logique. La mort du militaire était et resterait son fardeau, mais elle allait devoir continuer à assurer la survie de ses neuf autres compagnons, en accord avec la volonté du Créateur.

— L'un d'entre vous est-il blessé ? s'enquit-elle.

— Pas que je sache, répondit Invear.