Chapitre 9.1 - Les chaînes

77 12 11
                                    

Son esprit plongé dans un perpétuel brouillard, une douleur sourde pulsant dans ses bras et sa nuque, Crys oscillait entre des périodes de sommeil léger et sans rêves et un état conscient rempli d'incompréhension et de désespoir.

Dans les moments où elle manquait de lucidité, elle ne parvenait pas à se rappeler avoir jamais vécu ailleurs que dans cette cellule ni n'arrivait d'ailleurs à savoir qui elle était. Cependant, quand elle recouvrait ses sens et sa mémoire, d'autres éléments lui revenaient alors, comme le flash blanc qui semblait être à l'origine de tout.

Hochant doucement la tête, elle se lança alors, comme elle le faisait parfois, dans un récital étrange pour tenter de s'arracher à sa torpeur et de revenir à elle.


... Qui suis-je ?

Crys Kinox ?

Que s'est-il passé ?

Aucune idée. Je ne sais pas. Tu ne sais pas. La lumière blanche ?

Les... les chaînes.

Les chaînes ! L'armure ! Ils m'ont enlevé mon armure...

Les chaînes... c'est les chaînes. Le flash. Capturée. L'armure. Les soldats, tous ces soldats.

La magie ?

La magie, le transport... la cellule.

Où suis-je ?


Ouvrir les yeux lui demanda beaucoup d'effort : ses paupières étaient comme soudées et la lumière ambiante, quoiqu'extrêmement ténue, lui était inconfortable.

Elle balaya du regard la pièce qui lui était devenue familière — la pierre froide et dure, les angles agressifs, l'unique porte, renforcée, l'absence de tout meuble ou objet.

La cellule n'était pas vide, cependant. Crys avait un compagnon d'infortune, attaché de la même manière qu'elle et au même mur, deux mètres sur sa gauche. La première fois qu'elle était véritablement revenue à elle et qu'elle l'avait remarqué, elle avait compris pourquoi sa propre liberté de mouvement était extrêmement restreinte : comme elle, il était immobilisé par un anneau de métal qui lui entourait le cou, et qui était relié au mur par une chaîne d'à peine moins de quarante centimètres.

Tous deux ne pouvaient ni se lever, ni vraiment se coucher, ni s'éloigner du mur. Et bien sûr, comme si cela ne suffisait pas, pour éviter qu'ils ne touchent aux mailles ou tentent quoi que ce soit, leurs bras étaient attachés au sol.


L'une des questions récurrentes que se posait Crys dès qu'elle regagnait sa lucidité concernait son existence : comment était-elle encore vivante ? Personne ne leur avait apporté de la nourriture, et ce depuis le début. Elle aurait de toute façon été incapable d'avaler quoi que ce soit, mais cela ne changeait pas les faits.

Ils voulaient la garder en vie, d'une manière ou d'une autre.

Mais pourquoi ?

Si c'était pour l'interroger, il valait mieux le faire avant qu'elle ne soit trop faible pour parler ou trop folle pour que ce qu'elle raconte ait une quelconque valeur, or personne n'était jamais venu.

Ils voulaient les garder en vie, d'une manière ou d'une autre.

Mais comment ?

L'autre lui avait affirmé que c'était les chaînes. Selon lui, elles transportaient quelque chose, un courant d'énergie, qui pouvait grandement les affecter. À la fois de manière positive, en les empêchant de mourir, mais aussi de manière négative, en les affaiblissant et en leur causant douleurs et hallucinations.

Syol - Parallèle ZéroOù les histoires vivent. Découvrez maintenant