II

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Tout commence dans les toilettes du lycée, au coeur du mois de septembre. Tous les élèves sont en classe, en contrôle, endormis. Ils rêvassent ou ils écoutent.
Leurs bouches sont fermées, inspirées, mordues, des lèvres pulpeuses ou fines.
Comme la fine couche de neige qui recouvre le sol, et qui disparaîtra après le passage des élèves, après que la cloche ai sonné.
Tous en classe ? Non.
Il y a Julie dans les toilettes du lycée, qui est assise sur la cuvette, dans le froid.
Lorsque son souffle chaud s'écrase contre la porte et les murs carrelés, de la buée se forme. Et elle souffle encore plus fort, pour troubler l'air.
Julie a les yeux gris, les yeux clairs des basses températures, qui la maintiennent en vie.
Julie fait pipi, débordée par son pull en laine et son gros manteau qu'elle tient à bout de bras.
Enfin, elle renifle. Elle doit être enrhumée. Elle a finit.
De ses mains glacées, elle remonte sa culotte et son collant, se redresse d'un bond, lâche son manteau puis, en se retournant, presse le bouton qui déclenche la chasse d'eau.
Le bruit de broyeur fait trembler le silence. Il engloutit tout, jusqu'aux reniflements de Julie.
Soudain, elle sort en claquant la porte. Bottines sur la neige, stupéfaite, ce qu'elle voit la laisse sans voix.
Ciel bleu glacier, nuages blanc, cris de quelques oiseaux.
Ses doigts sont mordus par l'air gelé, il les aspire, les écorche. Ils piquent maintenant.
Ce qu'elle voit c'est ce qu'elle sent.
Et ce qu'elle sent c'est le froid qui la prend.

(déluge)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant