II

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La voiture file dans la nuit, et les phares sont du rouge le plus juste et le plus humain, dosé au degrés près.
Il y a des restes de sable et de sel dans les chaussettes tricolores, une odeur de lessive douce et pas de peluches.
Maxence lape lentement son coca, sucre ses lèvres orangées et mordille la paille, distraitement.
Le noir engloutit la carcasse métallique et, des ombres se dessinent sur les visages des passagers.
Léa somnole lorsque l'opéra joue, au près de sa joue, déjà dans son cou couvert.
Son souffle glacé s'abat sur la vitre, au rythme de la chanson qui s'infiltre sous sa peau, fraîche et claire, clairement dissimulée dans l'obscure.
Elle frissonne, son pouls s'accélère et ses poils se dressent sur sa chair, lorsque la voix forte emplit le silence pour mieux mordre. Les clés crissent comme les pneus sur la route, elles déchirent le tissu pour s'en séparer, et s'y noient en essayant de le fuir.
L'incendie de la ville est au loin, celui de ces mains sur les siennes, aussi.
Léa se fige et s'effrite, à se remémorer la mer sauvage, puis, la baraque à frites.
C'est con de s'accrocher comme ça, à quelques souvenirs perdus, jetés au fond des crevasses et destinés à être oubliés. 
C'est con mais c'est bon quand on est seul, et, déjà, si loin des marches de l'été dernier.

(déluge)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant