-Monsieur le baron, c'est un plaisir de vous rencontrer !
La vieille mais élégante comtesse s'adressait au baron d'âge moyen d'un ton transpirant l'hypocrisie, sous les sourires mielleux de ses enfants et le regard éteint de son majordome. Les 5 enfants, âgés de 27 à 13 ans saluèrent l'invité de leur mère de la même manière, bien que l'un d'eux fixait le majordome à la dérobée. Ce dernier ne faisait pas attention. Il tentait de se préparer à ses actions futurs, à chacun de ses gestes qui seront millimétrés et calculés avec précision en avance. Après tout, il n'avait pas droit à l'erreur. La moindre faute pouvait causer sa perte. Et cela, Edward le savait. Et il s'en inquiétait, contrairement à ses frères et soeurs qui soit ignoraient ce qu'il se tramait, soit le savaient et n'y prêtaient aucune attention. Après tout, le majordome faisait son métier, n'est-ce-pas ?
Ce dernier servit le thé à tout le monde dès qu'ils furent installés sur les élégants canapés moelleux du salon puis resta debout dans l'entrée. La comtesse, prénommée Catherine, discutait avec le baron avec un sourire d'ange simulé à la perfection. Des fois ses enfants aînés, John junior, Edward et Mary, avaient une peur bleue de son côté manipulateur. Les plus jeunes, Terrence et Amber, ne connaissaient pas cette face cachée de leur mère. Et il était clair qu'ils devaient être au courant le plus tard possible.
Le majordome resserra sa queue-de-cheval blonde platine tout en fixant le sol de ses yeux noirs inexpressif dont le regard bleu ciel d'Edward tentait désespérément de capter l'attention. John junior lança un regard réprobateur à son cadet, aussi ce dernier baissa les yeux sur le liquide brunâtre contenu dans sa tasse. Mary retint un soupir d'énervement. Leur mère n'eut aucune réaction, se contentant de continuer sa discussion en vérifiant par moment que ses cheveux grisonnants restaient bien coiffés. Sa fille ainée l'imitait avec talent, même si elle avait l'avantage de la jeunesse qui embellissait ses gestes et expressions faciales. Terrence, 15ans et Amber 13ans, s'ennuyaient visiblement à mourir et semblaient se défier au concours de celui qui boirait son thé le plus lentement. Et pendant ce temps le majordome restait à l'affut des moindres mouvements du baron.
-Monsieur le baron, j'ai ouï dire que vos affaires marchaient plutôt bien, ces temps-ci, lança cordialement John junior.
-Tout à fait, mes affaires aux Amériques sont plutôt fructueuses et j'en suis plus que satisfait. Je me plais à espérer qu'elles continueront à être aussi rentables jusqu'à la fin de ma vie.
«Si seulement tu savais que tes affaires chéries vont t'apporter... pensait le majordome sans vraiment ressentir la moindre chose.»
-_*_-_*_-
Peu après ce thé de courtoisie John junior et Catherine entreprirent de faire visiter l'immense jardin de leur demeure en espérant parler affaire. Le majordome, lui, se retrouvait seul dans son laboratoire de décoction, dont les murs au papier peint à moitié déchirés étaient décorés d'horloges. Il entendit plusieurs coups répétés à sa porte. 5, puis 2, puis 5. Il ouvrit la porte et tira Edward à l'intérieur avant de la fermer à clef.
-Qu'est-ce-que tu me veux ?
Le ton du majordome était loin d'être respectueux, tout comme ses paroles loin d'être recherchés.
-Qu'est-ce-qui te dit que je veux quelque chose, répliqua Edward ?
-Le fait que tu soies venu et tes regards tout à l'heure. Il y a un problème quelconque ?
-Le baron a survécu à de nombreuses tentatives de meurtre, qu'est-ce-qui te fait dire que toi tu y arriveras ?
-Parce que moi je ne suis pas les autres et que j'ai un savoir-faire. Et surtout parce que je sais me débrouiller comme un grand. Arrête de t'inquiéter pour rien.
-...
Edward contempla les horloges présentes sur les murs.
-Et puis le meurtre, c'est comme les horloges : il faut s'armer de patience pour réussir l'un ou l'autre parfaitement.
-Encore une devise déformée de ton père ?
Le majordome lui lança un léger sourire :
-T'as bien deviné. Maintenant files et laisses-moi travailler avant que ta soeur ne s'inquiète de l'endroit où tu te trouves.
-Je me fiche éperdument de ma soeur !
-Moi aussi. Mais cela ne signifie pas que nous avons tort de la croire inférieure.
Edward déposa un baiser sur la joue du majordome et sortit, laissant ce dernier continuer ses décoctions.
-_*_-_*_-
Très peu de personnes étaient présentes au diner ce soir-là. Catherine et son mari, John senior, siégeait chacun en bout de table. Entre les deux se trouvaient John junior, Edward, Mary et le baron. Le diner semblait bien se dérouler. Grâce aux beaux discours de John junior et de sa mère, John senior et le baron avaient réussi à établir un partenariat, de manière étonnamment rapide, qui plus est. Le majordome restait debout, en retrait, à observer le repas, à écouter le tintement des couverts et à sentir l'odeur alléchante des plats qui étaient servis. Et il s'ennuyait à mourir.
Une jeune fille servant les boissons passa devant le majordome. Ce dernier versa discrètement quelques gouttes d'un liquide ambré dans le verre de l'invité. Verre qui lui fut servi quelques secondes à peine plus tard.
«Pauvre petit baron persuadé d'avoir fait une affaire en or et de se marier bientôt à une belle jeune fille...»
Peu après, le jeune baron fut pris de violentes convulsions. Il semblait également avoir de grandes difficultés à expirer. John senior but un peu de son verre et dit d'un ton étrangement calme :
-Vous savez monsieur le baron, il n'a jamais été question d'un partenariat entre nous. La seule chose qui importe est que je puisse posséder votre affaires si florissantes. Vous n'en aurez pas besoin après tout, vu le magnifique cadeau que vous a offert Adrian. Cela vous plait n'est-ce-pas ?
Adrian sourit. Un immense sourire sadique et amusé. Edward le regardait avec un sourire heureux, aimant. John junior, senior, Mary et Catherine restaient impassibles, insistants au décès du baron qui pleurait et gémissait des supplications. Le majordome était fier de son travail. Il espérait également qu'il pourrait recommencer ses jeux sous peu. Une fois le baron décédé, 4 des membres de la famille sortirent de table. Edward se leva à son tour mais s'approcha d'Adrian.
-Tu es heureux ?
-Oui, très, fit ce dernier avec un sourire. Tu voies, je t'avais dit que je l'aurais.
-Je t'aime, tu sais.
-Je sais. Bref, si je me débarrassais du cadavre avant que quelqu'un d'autre le voit ?
Le jeune homme sourit et laissa le majordome tirer le cadavre vers lui et le sortir de la maison avant qu'il ne l'enterre dans le jardin.
VOUS LISEZ
Ombres (EN PAUSE)
ParanormalSi vous êtes sensibles, prière de ne pas lire. Je publierai de manière totalement décousue, donc il ne faut pas s'étonner si je suis capable d'oublier ce livre 6 mois avant de me remettre à écrire dedans tous les jours. J'en serais capable.