REALITIES (La Communauté de l'Ombre)

Chapitre XXXIV - Devenir l'Agresseur

L'urgence avait mené le groupe a quitter la caverne le soir même, mais jamais en d'autres circonstances ne l'auraient-ils fait. La tempête dehors s'était intensifiée - Il pleuvait des cordes, et la pluie tombait littéralement à l'horizontale. Le vent était horriblement froid. Tous sauf Dante et Nicolaï étaient à l'intérieur, protégés où presque, de la température exécrable. Les arbres qu'ils laissaient derrière eux pliaient dangereusement dans le même sens, comme s'ils avaient essayé de se coucher. Les chevaux devant eux étaient nerveux et peinaient à garder un rythme soutenu. Dante aurait souhaité avoir une de ces voitures qu'il avait vu, jadis, lors de son enfance tranquille à Torla. Il eut une brève pensée pour sa vie antérieur mais ne pouvait absolument pas s'y perdre; la route, souvent accidentée, représentait un danger constant, sans compter le maniaque qui était assis près de lui et qui, au plaisir coupable de Dante, semblait souffrir autant que lui du mauvais temps.

Au moment où Dante n'arriva plus à sentir ses doigts, il sut qu'il leur fallait s'arrêter pour la nuit. Milo et Cerys pouvaient difficilement se le permettre; bien que Noah et Rory fassent tout leur possible pour stopper à la fois hémorragies et blessures importantes mais même les chevaux semblaient incapable de continuer; ils se câbraient souvent et arrêtaient d'avancer subitement.

- Il nous faut nous arrêter pour la nuit! Je ne pense pas qu'il soit sage de continuer!

Nicolaï sembla aquiescer d'un hochement de tête. Dante commença à ouvrir les yeux pour un abri potentiel.

À peine vingt minutes plus tard, ils se retrouvèrent entourés d'un boisé qui abritait un regroupement de maisons de fond de campagne. Une petite  communauté de bûcherons y vivait, et chaque maison était reliée à une terre qu'un propriétaire quelconque devait posséder. Les propriétés étaient très éloignées l'une de l'autre, aussi n'en virent-ils qu'une seule. Une chaumière en rondin; rien ou presque ne pouvait leur apporter plus de soutien, hormis une autre construction humaine - mais ils doutaient fortement trouver mieux à cette heure et dans cette tempête. Ils empruntèrent le chemin de terre qui reliait la demeure à la route et s'arrêtèrent devant une petite écurie qui flanquait la maison elle même. Une seule lumière provenant de l'intérieur, la lueur d'un feu de foyer à travers une fenêtre opaque.

Dante ne pouvant laisser Nicolaï avec le groupe, dut être l'un de ceux qui y entra en premier. Les deux garçons ouvrirent la porte massive qui s'ouvrait sur un hall très étroit ou étaient suspendus des habits chaud et des bottes. Certains étaient très petits - Dante devina qu'ils appartenaient à des enfants. Son regard se retourna un instant vers Nicolaï. Un élan d'insécurité s'installa profondément en lui, accompagné d'un sentiment de responsabilité accablant. Il ne désirait aucun dérapage au contact de ces gens; ils avaient besoin d'aide. Mais Dante craignait que Nicolaï n'utilise des méthodes très peu conventionnelles. Il se prépara mentalement à intervenir si les choses dégénéraient.

Ils avancèrent dans une cuisine occupée. Une famille s'y tenait; un homme, une femme, trois enfants - tous très jeunes. Ils étaient déjà tournés vers eux, immobiles, silencieux. Puis il se produit quelque chose: La jeune mère afficha subitement un air terrifié, comme si elle venait de remarquer une créature monstrueuse dans sa cuisine, et échappa un plat qu'elle tenait, debout près de la table. Il y eut un fracas métallique qui fit sursauter tout le monde. Puis ce que Dante craignait le plus se produisit.

- Oh mon dieu, Florian, ce sont eux...

Dante s'était tenu prêt mais il faillit manquer l'attaque subite qu'effectua Nicolaï. D'un seul mouvement, il prit un couteau à sa ceinture et éleva la main pour le projeter vers elle. Dante lui sauta dessus sans retenue. Il le plaqua de tout son poids; Nicolaï lança son arme; Dante, dans sa chute, put voir le couteau voler dans la pièce et éclater sur le manteau de la cheminée derrière la dame. Il s'effondra avec Nicolaï. Tous deux se relevèrent en hâte; les enfants s'étaient levés de table et, sous un ordre rapide de leur père, fuyaient dans une pièce adjacente. La mère semblait pétrifiée sur place. Son mari se lança vers elle, pris son bras et la tira vers les enfants.